Si la perte de poids grâce à une intervention chirurgicale semble bien diminuer le risque de certains cancers (sein, endomètre), « une controverse persiste autour de certains cancers et en particulier les néoplasies gastro-œsophagiennes » (adénocarcinomes œsophagiens, cancers gastriques), expliquent les auteurs d'une nouvelle étude. Ce travail publié dans le « Jama Surgery » tend à prouver que la chirurgie bariatrique exerce là aussi un effet protecteur vis-à-vis de ces types de cancer.
L'obésité est le second facteur de risque évitable de cancer après le tabagisme. Le surpoids serait ainsi associé à 7,8 % des cas de cancers et à 6,5 % des décès par cancer. L'obésité est un facteur de risque majeur des cancers gastro-œsophagiens.
Le RGO, un facteur de risque lié à la chirurgie
Dans le même temps, la chirurgie bariatrique, en particulier la sleeve gastrectomie et l'anneau gastrique, est associée à une augmentation du risque de reflux gastro-œsophagien (25 à 40 % des patients opérés en souffrirait). Or, de tels reflux sont connus pour favoriser l'apparition de néoplasies gastro-œsophagiennes malignes. Ainsi, l'œsophage de Barett, une lésion précancéreuse, est observé chez 10 % de patient après une chirurgie bariatrique, contre 1 % à 2 % de la population générale.
La grande question est donc la suivante : la perte de poids et les effets métaboliques induits par la chirurgie bariatrique contrebalancent-ils la fréquence des reflux ? Pour tenter de répondre à cette question, les médecins du centre hospitalier intercommunal de Créteil (Chic) et les chercheurs de l'Université de Paris ont constitué, à partir des données du PMSI, une cohorte de 908 849 patients souffrant d'obésité sévère. Les participants étaient tous majeurs, recrutés entre 2010 et 2017 inclus, dont un tiers a bénéficié d'une chirurgie bariatrique.
Les deux groupes étaient comparables en termes d'âge, de poids, de sexe et de comorbidité, à une différence près : plus de la moitié des patients opérés étaient en état d'obésité morbide (IMC>40) contre un peu moins d'un tiers des patients non opérés.
Le suivi moyen était de 5,62 ans dans le groupe contrôle et 6,02 ans dans le groupe chirurgie. On a dénombré 337 nouveaux cas de cancers gastro-œsophagiens, dont 83 dans le groupe chirurgie et 254 dans le groupe contrôle.
Un quart de cancer en moins
Les auteurs ont constaté une diminution significative de l'incidence des cancers dans le groupe chirurgie : 4,9 cas pour 100 000 habitants par an contre 6,9 dans le groupe contrôle, soit une baisse significative du risque de cancer de 24 %, une fois les facteurs de risque pris en compte. Par ailleurs, la mortalité toutes causes était réduite de 40 %. « Ces résultats semblent contre-intuitifs, compte tenu des études qui montrent une augmentation des facteurs de risque après une opération de chirurgie bariatrique, reconnaissent les auteurs. Il semble que l'équilibre entre les facteurs protecteurs (perte de poids, effets métaboliques et éradication des infections à H. pylori) et les facteurs de risque (reflux gastro-œsophagiens) aient tourné à la faveur des facteurs protecteurs. »
Cette étude étant rétrospective, avec une durée moyenne de 6 ans, les auteurs estiment que d'autres travaux seront nécessaires pour trancher la question.
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