CERTAINES études montrent leur intérêt pratique directement par leurs conclusions, d’autres davantage par les réflexions et les perspectives qu’elles ouvrent. C’est le cas d’un travail britannique publié dans le «Lancet». Il suggère l’intérêt de la prévention du cancer colorectal par sigmoïdoscopie souple. Le lecteur médecin en conclut d’emblée que la technique est probablement efficace en dépistage d’une lésion allant du rectum au colon gauche, mais quid du transverse et du colon droit. C’est ici que les réflexions imposées par les Britanniques prennent tout leur intérêt. Elles montrent comment la simple prévention sigmoïdoscopique dépasse ses limites anatomiques.
Deux tiers sont localisés au rectum et au sigmoïde.
Wendy S. Atkin (Londres) et coll ont formulé une hypothèse : le dépistage par sigmoïdoscopie souple entre 55 et 64 ans peut-il faire baisser l’incidence et la mortalité du cancer colorectal dans la population ? Cette hypothèse se fondait sur plusieurs faits. Deux tiers des cancers colorectaux et des adénomes sont localisés au rectum et au sigmoïde ; la grande majorité des sujets déclarant un cancer distal du colon ont eu un adénome avant l’âge de 60 ans ; l’examen, enfin, est bien accepté, rapide et adapté au dépistage de masse.
Dans 14 centres britanniques quelque 170000 personnes ont été enrôlées, 57 099 ont été sélectionnés pour subir l’endoscopie et 112 939 ont servi de témoins. En pratique 40 674 sigmoïdoscopies ont été réalisées. Au cours de la période des dépistages et de suivi, soit 11,2 ans (valeur médiane), 2 524 cancers colorectaux ont été diagnostiqués, 1 818 dans le groupe témoin et 706 parmi les participants. Dans le même temps 20 543 décès ont été notés, dont 727 par cancer colorectal.
Les médecins britanniques en concluent qu’en 11 ans la sigmoïdoscopie a permis de réduire globalement l’incidence de la tumeur d’un tiers et sa mortalité de plus de 40 %. Analysées en intention de traiter, les données montrent plus précisément, dans le groupe dépisté, une réduction d’incidence de 23 % et de mortalité de 31 %. En analyse per protocole ces taux passent respectivement à 33 et 43 %. L’incidence du cancer distal (rectum sigmoïde) a été abaissée de 50 %.
Voila pour les données brutes. Mais les résultats les dépassent au plan des prévisions. En effet, il faut savoir que de nombreuses études ont suggéré que l’existence d’un cancer situé au-delà du sigmoïdoscope peut être prédite par les caractères d’un adénome plus bas situé. Un tel adénome ainsi découvert justifierait donc une coloscopie. Ce fut d’ailleurs le cas au cours de l’étude.
Association à un test de type Hémoccult.
Mais d’autres réflexions sont faites dans un éditorial par un médecin américain de Chapel Hill (Californie), David F. Ransohoff. En premier lieu, il se montre dubitatif, écrivant qu’une réduction de 50 % de l’incidence du cancer colorectal est inférieure au taux auquel on s’attendrait avec une coloscopie. Même si la poursuite du suivi de la cohorte risque d’améliorer cette donnée. Mais à l’inverse, il rapporte deux études suggérant que si la coloscopie réduit bien la mortalité par tumeur gauche, elle est peu ou pas efficace sur les tumeurs droites. Les raisons de cet écart sont mal connues : préparation, difficultés techniques, Quoi qu’il en soit un essai européen en cours pourra peut-être fournir la solution. Enfin, également en faveur de cette endoscopie courte, il évoque l’intérêt de l’association à un test de type Hémoccult, d’autant que de nouveaux tests aussi spécifiques mais plus sensibles sont disponibles.
Cet ensemble de données explique mieux que malgré ses limitations anatomiques « la sigmoïdoscopie flexible est un test sûr et pratique. Quand elle est proposée une seule fois à une population âgée de 55 à 64 ans, elle offre une protection substantielle et de longue durée contre le cancer colorectal » concluent les auteurs.
« Lancet », édition avancée en ligne du28 avril2010.
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