L'incidence du cancer de l'endomètre va croissant dans le Monde. Il représente désormais le quatrième cancer féminin aux États-Unis. Au moment du diagnostic, 10 à 15 % sont des formes avancées et près de la moitié de ces cancers surviennent avant 65 ans. Bien que les chimiothérapies par sels de platine aient amélioré leur pronostic, la survie à cinq ans plafonne à 17 % en présence de métastases à distance. Au regard des enjeux en termes de Santé Publique posés par les cancers de l'endomètre, les essais cliniques testant de nouveaux schémas thérapeutiques se multiplient. Parmi les pistes explorées, il existe celle de l'immunothérapie. En effet, beaucoup de ces tumeurs de l'endomètre possèdent de nombreuses mutations et/ou sont porteuses d'instabilité génétique, deux facteurs bien connus pour favoriser les réponses à l'immunothérapie. Mené après échec de la chimiothérapie, un essai de phase 2 (11-KEYNOTE-146) avait évalué l'association d'un anti-PD1, le pembrolizumab, à un inhibiteur de tyrosine kinase multi-cible des récepteurs du VEGF (VEGF 1, 2 et 3), le lenvatinib. Il avait donné des taux de réponse allant jusqu'à 35 % chez des patientes n’ayant presque pas de déficience dans le système de réparation mismatch repair (MMR). Chez ces patientes dites « pMMR » (proficient MMR), l’immunothérapie seule ne marche quasiment pas (1). Aujourd'hui, l'étude de phase 3 ouverte 309-KEYNOTE-775 vient d'être publiée (2) …
Près de 85 % de tumeurs pMMR
Les 827 femmes incluses dans l'essai ont 64 ans d'âge médian ; 50 % ont moins de 65 ans. Une majorité est blanche (61 %), suivies par les Asiatiques (22,5 %), bien loin devant les femmes noires (moins de 4 %). Dans ce vaste essai international (21 pays, 167 sites) mené entre 2018 et 2020, les tumeurs avancées de l'endomètre, en échec après platine, étaient dans 84 % des cas pMMR (16 % de tumeurs dMMR ou deficient MMR).
Toutes ces patientes ont bénéficié d'une chimiothérapie par platine et près de 45 % ont subi par le passé une irradiation pelvienne. Leur état général est plutôt bon (ECOG 0: 60%, ECOG 1 : 40 %). Au diagnostic initial, la tumeur de l'endomètre était un carcinome épidermique dans 60 % des cas, ou séreux chez 26 % des patientes. Plus rarement, il s’agissait d’un carcinome à cellules claires (6 %) ou de type mixte (4 %).
L'étude a été précédée d'une période de quatre semaines de screening avant inclusion, suite à laquelle les femmes ont été randomisées en deux bras de traitement : elles recevaient soit l’association pembrolizumab-lenvatinib, soit une chimiothérapie (doxorubicine ou paclitaxel) laissée au libre choix de l'oncologue traitant.
Le traitement préalable par platine avait été administré par voie générale uniquement, en situation néoadjuvante (35 %) ou adjuvante (38 %). Enfin, près de 80 % de ces femmes avaient eu une seule ligne de platine (20 % deux lignes).
La survie sans progression et la survie globale jouent les prolongations…
Dans le bras pembrolizumab-lenvatinib, 30,5 % de l'ensemble des femmes et 27,8 % de celles pMMR n'ont toujours pas interrompu ce traitement après un an de suivi. Dans le bras chimiothérapie, seules 2,6 % et 2,8 % respectivement poursuivent la chimiothérapie à un an. Dans tous les groupes, la principale cause d'arrêts était la progression de la maladie. Ainsi, 32 % de l'ensemble des femmes et 30 % de celles présentant une tumeur pMMR sont répondeuses dans le bras pembrolizumab-lenvatinib (versus environ 15 % sous chimiothérapie, dans la population totale et parmi les tumeurs pMMR).
Les médianes de survie sans progression (SSP) et de survie globale (SG) sont donc significativement majorées dans le bras pembrolizumab-lenvatinib. La SSP atteint 7,2 mois avec l’association versus 3,8 mois sous chimiothérapie (RR = 0,56 ; 0,5-0,7 ; p < 0,001). La SG est elle aussi significativement prolongée : 18,3 versus 11,4 mois respectivement (RR = 0,62 ; 0,5-0,7, p < 0,001). Cet allongement en survie est retrouvé dans le sous-groupe de tumeurs pMMR correspondant à 85 % de l'échantillon de l'essai. La SSP des femmes porteuses de tumeurs pMMR est en effet respectivement de 6,6 versus 3,8 mois (RR = 0,60 ; 0,5-0,7 ; p < 0,001). Quant à la SG, elle est de 17,4 mois versus 12 mois (RR = 0,68 ; 0,5-0,8 ; p < 0,0001).
Ainsi, ses données confirment l'intérêt de cette stratégie en seconde ligne, après échec au platine, dans une population rassemblant majoritairement des tumeurs pMMR a priori peu sensibles à l'immunothérapie isolée. Les améliorations de la SSP sont le fruit de l'existence de réponses longues observées chez les répondeurs, comme on le voit classiquement sous immunothérapie. Par contre, les effets secondaires de grade ≥ 3 sont plus nombreux : 89 % versus 73 %.
(1) Makker V et al. Lenvatinib plus pembrolizumab in patients with advanced endometrial cancer: An interim analysis of a multicentre, open-label, single-arm, phase 2 trial. Lancet Oncol 2019; 20:711–18.
(2) Makker V et al. Lenvatinib plus Pembrolizumab for Advanced Endometrial Cancer. NEJM 2022; 386:437-48.
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