Si le taux de personnes atteintes d’un cancer chez les personnes handicapées mentales est la même que dans la population générale, la répartition de ces cancers n’est pas la même dans ces deux groupes de populations. « C’est une donnée que nous n’avons que depuis vingt ans. Avant les années 1990, on pensait qu’il y avait moins de cancers chez les déficients mentaux car cette maladie était mal dépistée chez cette population qui par ailleurs vieillit », précise Daniel Satge, anatomopathologiste à Montpellier.
Cette question du cancer chez les personnes déficientes mentales est l’objet d’un premier congrès international se tenant à Montpellier du 5 au 7 février à l’initiative de l’association Oncodéfi en partenariat avec le Cancéropôle Grand Sud-Ouest. Il en ressort un constat internationalement partagé : « Nous manquons de données scientifiques en la matière car les études sont peu nombreuses », reconnaît Daniel Satgé, qui a collecté l’ensemble des données internationales disponibles sur le sujet. Toutefois, en croisant ces chiffres, on peut estimer que les cancers digestifs sont environ deux fois plus nombreux, que les cancers testiculaires sont également quatre fois plus importants au sein d’une population handicapée mentale. »
Effet antiangiognéique des gèbes du chromosome 21
Une donnée générale en contradiction avec d’autres concernant certaines populations de personnes handicapées. Ainsi, le syndrome de Down semble protéger davantage du cancer du sein, mais pas de la leucémie ou du cancer des testicules. « Nos résultats suggèrent que la fréquence diminuée de tumeurs solides au sein de cette population est en partie due aux effets anti-angiogéniques des gènes du chromosome 21, explique le professeur en cancéro-biologie Sandra Ryeom de l’Université de médecine de Pennsylvanie (États-Unis). En revanche, dans le cas de la leucémie, de nombreuses études épidémiologiques suggèrent que les enfants porteurs de ce syndrome montrent une fréquence augmentée de plus de 500 fois de leucémie aiguë mégacaryocytaire, probablement car la trisomie 21 empêche la mort des cellules sanguines, ce qui accroît le risque de cancer. »
Moins de mammographies
Pour d’autres cancers, comme celui du cancer du col de l’utérus, « la moindre fréquence peut être expliquée par une activité sexuelle réduite au sein de cette population. Dans notre pays, les spécialistes de la déficience mentale ont en tout cas mis au point des recommandations particulières à l’attention des médecins pour que les dépistages soient le plus efficace possible », avance Henny Van Schrojenstein Lantman-de Valk, de Radboud university medical center au Pays-Bas.
« Les dépistages sont souvent lourds pour les déficients mentaux. Il faut souvent pratiquer une anesthésie, et leur faire boire trois litres d’eau avant une coloscopie, c’est déjà un défi en soi », insiste pour sa part le Pr Marie-Odile Réthoré de l’Institut Jérôme-Lejeune.
La question du dépistage précoce semble en tout cas cruciale auprès d’une population dont l’espérance de vie augmente. Ainsi, Joanne Wilkinson, du département de médecine familiale à l’Université de médecine de Boston indique que, sur son champ d’études, la part des femmes bénéficiant d’une mammographie chez les déficientes intellectuelles est deux fois moindre qu’au sein de la population générale. Résultat : « Le taux de mortalité est deux fois plus important au sein de cette population. Certains de ces décès peuvent être liés à un diagnostic tardif. »
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