Face aux effets secondaires cutanés non allergiques des bio- et xénothérapies, les dermatologues ont un rôle important à jouer dans la réussite de la chimiothérapie. Il leur faut être disponibles et ouvrir des consultations d’urgence pour réagir rapidement aux urgences et inconforts du patient (crèmes, émollients, antikératosiques…), informer (patients et cancérologues), prévenir les effets secondaires et systématiquement rassurer les patients (les lésions régressent à la fin de la chimiothérapie).
Ces effets secondaires cutanés sont très fréquents et à connaître (en cas de doute il ne faut pas hésiter à demander un avis spécialisé). Ils varient par classe de médicaments et molécule par molécule :
• anti-EGFR : réactions papulopustuleuses du visage pouvant ressembler à l’acné, anomalies de croissance des cheveux, sécheresse de la peau, lésions proches de l’eczéma… Prévenir les patients, utiliser des crèmes adaptées (voire antibiothérapie préventive des pustules) et rassurer : plus les effets secondaires sur le visage sont importants, meilleure est la réponse néoplasique ;
• anti-VEGF : réactions main-pied (rougeurs, fissures, hyperkératoses importantes gênant la marche). Élaborer des fiches de prévention (chaussures larges, hydrater la peau, soins pédicures) et traiter les lésions évoluées ;
• chimiothérapies des mélanomes : éruption généralisée, photosensibilité, lésions précancéreuses de prise en charge connue ;
• xénobiotiques : œdèmes du visage, éruptions, très fréquents avec les inhibiteurs de tyrosine kinases. Évaluer la gravité : banal exanthème ou toxidermie grave (rare) à traiter en urgence. Les réactions anaphylactoïdes avec les taxanes et les allergies immédiates avec les sels de platine ne sont pas exceptionnelles.
Nouvelle technique d’induction de tolérance
La survenue d’une manifestation allergique (grande urticaire, baisse tensionnelle importante, œdèmes) ou pseudo-allergique lors de l’administration d’une chimiothérapie par taxanes ou sels de platine conduisait jusqu’à récemment, à interrompre la chimiothérapie et proposer une autre ligne de traitement. En résultait une possible perte de chance pour le patient. La prise charge a récemment changé.
En cas de manifestations allergiques aux sels de platines, les tests cutanés (pricks-tests) vérifient s’il y a une allergie et précisent le responsable : sels de platine ou traitement associé (anti-émétiques, corticoïdes… à modifier).
En cas d’allergie prouvée aux sels de platines ou d’hypersensibilité aux taxanes (les tests sont ici inutiles), une induction de tolérance est tentée : la chimiothérapie est administrée lentement, à doses très progressivement croissantes en 5-8 heures (au lieu des 2 à 3 heures habituelles) : faibles doses au début, augmentées par étapes, sous antihistaminiques et surveillance étroite de la tolérance. Le plus souvent, la chimiothérapie peut être ainsi poursuivie !
En cas de pseudo-allergies aiguës aux biothérapies, le cancérologue doit avoir un interlocuteur dermatologue pour évaluer la gravité, et préciser les mécanismes sous-jacents, les investigations et la conduite à tenir comme par exemple des inductions de tolérance au cétuximab.
D’après un entretien avec le Pr Annick Barbaud, département de dermatologie et d’allergologie, hôpitaux Brabois, CHU de Nancy.
Le Pr Annick Barbaud déclare ne pas avoir de lien d’intérêt avec le contenu de cet article.
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