L’INCIDENCE DU CANCER de l’endomètre est stable mais l’évolution en légère baisse de la mortalité est plus marquée et, ce, sûrement en raison d’une possibilité de diagnostique précoce et d’une progression longtemps locale. Il s’agit d’un cancer glandulaire, fréquent dans les pays développés, un adénocarcinome de l’endomètre, mais il faudra, même s’il survient rarement, savoir éliminer, en fonction du contexte, la présence d’un sarcome utérin.
C’est un cancer fréquent en période post-ménopausique.
Entre 60 et 70 ans, 13,6 femmes sur 100 000 en seraient atteintes en Europe ; cette fréquence augmente avec l’âge puisque elle serait de 53 cas/100 000 après 65 ans.
Il faut savoir y penser très vite ; dès l’interrogatoire, il est aisé de suspecter une pathologie utérine intracavitaire.
Hyperestrogénie.
Le cancer survient souvent dans un contexte témoignant de l’existence d’un terrain d’hyperestrogénie. C’est effectivement un cancer de terrain, hormonodépendant.
L’interrogatoire va faire préciser la concomitance de facteurs de risque, une hyperestrogénie exogène ou endogène non contrebalancée par un traitement progestatif à doses efficaces, une obésité responsable de l’augmentation de la synthèse des estrogènes endogènes par aromatisation des androgènes en estrogènes dans la graisse périphérique et avec une diminution de la concentration de la SHBG ; un diabète et/ou une HTA souvent en relation avec cette obésité.
Il faut se méfier des antécédents familiaux de cancer de l’endomètre ou des antécédents personnels de cancers de l’ovaire ou du colon (syndrome de Lynch)
Il s’agit souvent de nullipares ayant eu des premières règles précoces, une ménopause tardive, ou ayant présenté un syndrome des ovaires polykystiques.
Parfois, on retrouve la prise d’un traitement hormonal substitutif mal équilibré en progestérone (la séquence de progestérone ou de progestatif doit être au minimum de 10 jours mensuels), de pilules estroprogestatives séquentielles. Par contre, les estroprogestatifs combinés auraient un rôle protecteur s’ils ont été pris pendant au moins un an. La prise de Tamoxifène utilisé comme antiestrogène en traitement d’un cancer du sein peut être responsable de ce déséquilibre hyperestrogénique. On a également incriminé l’abus de stimulations lors des procréations médicalement assistées.
Parfois quelques taches rosées.
Le maître symptôme est la survenue de métrorragies (90% des cas). Elles seront d’autant plus inquiétantes qu’elles surviennent dans un contexte de post ménopause. Ce ne sont pas toujours des saignements abondants, parfois quelques tâches rosées, parfois des pertes de sang irrégulières, parfois des stries sanguinolentes au cours d’hydrorrhées, pertes visqueuses teintées, spontanées au moment où les règles ont déjà disparu.
Il est plus difficile d’y penser dans un contexte de périménopause quand les règles deviennent irrégulières ou si la patiente prend un THM avec règles.
Tout saignement utérin survenant en périménopause doit être exploré afin de faire la preuve de sa bénignité.
On pourra aussi retrouver uniquement des hydrorrhées voire une pyométrie.
Douleurs pelviennes et syndromes de compression sont beaucoup plus rares, témoins d’une lésion déjà évoluée.
L’examen est peu évocateur, il pourra retrouver des signes de trophicité vulvovaginale trop importants en relation avec l’âge. La taille de l’utérus est variable. On pourra s’alarmer devant l’augmentation de volume d’un fibrome déjà connu, voire découvrir la présence d’un polype dit sentinelle.
Cette tumeur reste longtemps confinée à un stade utérin, endométrial. Le myomètre est ensuite envahi par contiguïté ou par voie lymphatique. Le col utérin peut également être envahi de la même manière.
Plus tard, les paramètres seront atteints ainsi que les organes de voisinage (vessie, rectum) etc.
L’échographie, examen le plus important.
En fait, dans la majorité des cas, on se trouve devant une patiente qui saigne et qui nécessite la pratique d’examens complémentaires.
L’échographie est, selon tous les auteurs, le plus important de ceux-ci.
Classiquement, toute femme ménopausée sans traitement substitutif ayant un endomètre ≥ 5 mm est suspecte, ≥ 8 mm en cas de THS.
Plus l’endomètre est épais, plus le risque de cancer est grand. La valeur seuil serait de 4 mm (Smith et Bindmans). Mais le diagnostique n’est pas toujours aisé surtout s’il existe des fibromes concomitants, une adénomyose.
Certains préconisent la pratique d’une hystérosonographie. L’association d’un Doppler couleur peut parfois se révéler utile.
Les caractéristiques du cancer de l’endomètre en hystérosalpingographie sont connues de longue date mais cet examen est délaissé actuellement au profit des autres méthodes d’explorations.
Tomodensitométrie et IRM ne doivent théoriquement trouver leur place qu’après le diagnostic dans le cadre du bilan d’extension pré-opératoire. La pratique de la cytologie est difficile souvent impossible en raison de sténose du col ou de l’atrophie liée à l’âge.
Biopsie.
Seule l’histologie va conforter le diagnostique, par le biais d’une biopsie. Cet examen pourra se faire soit grâce à grâce à l’introduction d’une pipelle de Cornier, soit au décours de l’hystéroscopie diagnostique.
L’utilisation de la pipelle se heurte parfois aux mêmes problèmes que pour la cytologie. Néanmoins, quelques artifices permettent parfois de passer la barrière endocervicale (traitement local ou général par estriol ou estradiol quelques jours avant l’examen). Un diagnostic positif est corrélé avec un cancer dans 82 % des cas . En cas de biopsie négative, on pourrait manquer le diagnostic dans 0,9 % des cas.
Ces artifices seront d’ailleurs également nécessaires avant la pratique d’une hystéroscopie diagnostique.
Celle-ci sera finalement l’examen clef qui visualisera la lésion et permettra d’en faire le diagnostique histologique grâce aux biopsies qui seront pratiquées.
La pratique du curetage biopsique à l’aveugle ne se justifie plus de nos jours.
Pour Boublil, une hystéroscopie évoquant le diagnostique d’un cancer de l’endomètre voit son résultat confirmé dans 71,8 % des cas.
Outre le diagnostique d’un adénocarcinome, l’examen biopsique pourra retrouver la présence d’hyperplasies typiques ou atypiques. Les premières ne sont pas inquiétantes, il ne s’agit pas d’un état pré cancéreux mais d’un facteur de risque. En revanche, en cas d’hyperplasies atypiques, l’évolution vers le cancer se fera dans 30 % des cas. Il faudra se méfier surtout des atypies récidivantes.
Au total donc, le cancer de l’endomètre doit être évoqué chez une femme en période de péri ou post-ménopause présentant un saignement suspect aussi minime qu’il soit et, ce, d’autant plus qu’il apparaît dans un contexte de risques connus (obésité, hyperestrogénie, prise de Tamoxifène etc.)
Pour le moment, aucun examen n’a fait ses preuves dans la mise en place d’un dépistage précoce. Il y a peu de moyens de diagnostique fiable et facilement renouvelable.
Néanmoins, les progrès en hystéroscopie ambulatoire pourront peut être le permettre un jour.
Bibliographie
- Evolution de l’incidence et de la mortalité par cancer en France de 1980 à 2005. Institut de Veille Sanitaire. 29 janvier 2008.
- Evaluation et traitement des cancers de l’endomètre. P.L. Giacalone, N.El Gareh, O. Hadad, P. Bonnier, F.Laffargue. « La revue du praticien », 2001, 51 :1444.
- Diagnostic des cancers de l’endomètre . Ph. Deruelle, J.-L. Leroy. « La Revue du Praticien », 2001, 51 : 1439.
- Smith-Bindman et coll. « JAMA », novembre 1998 ; 280 ; 1510-1517.
- Pathologie utérine, exploration diagnostic et conduite à tenir. Léon Boublil, CNGOF, Paris décembre 2010.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024