DE NOTRE CORRESPONDANTE
« C’EST UN JOUR historique pour les patients ayant un carcinome basocellulaire et tous ceux qui participent à leurs soins - le plus grand progrès observé jusqu’ici dans le traitement de cette maladie », note dans un éditorial le Dr John Lear (Université de Manchester).
Le carcinome basocellulaire (CBC) représente 80 % des cancers de la peau qui ne sont pas des mélanomes. Son principal facteur de risque est l’exposition aux UV. Bien que la majorité des cas sont facilement traités par la chirurgie, ces lésions progressent parfois vers un stade avancé (localement avancé ou plus rarement métastatique) pour lequel il n’existait aucun traitement efficace jusqu’à récemment.
La plupart contiennent des anomalies activatrices de la voie de signalisation hedgehog, qui aboutissent à une prolifération des cellules de la couche basale de l’épiderme. Ces anomalies provoquent le plus souvent une perte de fonction de la protéine PTCH1 (patched homologue 1) qui inhiber le signal de la protéine SMO (smoothened homologue).
Le vismodegib (Erivedge), développé par Genentech/Roche, est une petite molécule chef de file qui inhibe SMO, autrement dit la voie de signalisation hedgehog sonic. En janvier dernier, la FDA américaine a approuvé le vismodegib pour traiter les formes avancées du CBC, sur la base des résultats de l’étude Erivance BCC.
• Carcinome métastatique ou non opérable
Cette étude internationale de phase II conduite par Sekulic et coll. porte sur deux cohortes : 33 patients avec un CBC métastatique et 71 patients avec un CBC localement avancé, non opérable ou pour lequel la chirurgie n’était pas appropriée (multiples récurrences et faible chance de guérison chirurgicale ou risque d’importante défiguration). Tous les patients ont reçu 150 mg de vismodegib per os, une fois par jour.
Le vismodegib réduit la taille des tumeurs (taux de réponse objective) chez 30 % des patients avec CBC métastatique (10/33) et chez 43 % des patients avec CBC localement avancé (27/63). De plus, le taux de réponse complète est de 21 % parmi les patients ayant un CBC localement avancé (13/63). La durée médiane de la réponse est de 7,6 mois dans les deux cohortes.
Les effets secondaires sont fréquents (30 %) - crampes musculaires, chute de cheveux, modifications ou perte du goût, perte de poids et fatigue ; des effets secondaires sévères sont observés chez 25 % des patients (26/101), avec décès de 7 patients ; ils conduisent à l’arrêt du traitement chez la moitié des patients, après une durée moyenne de traitement de dix mois.
• Nævomatose basocellulaire
L’étude de Tang et coll. est la première qui évalue l’efficacité du vismodegib dans la nævomatose basocellulaire (syndrome de Gorlin). Les patients ont hérité d’une copie défectueuse de PTCH1 et peuvent développer des centaines de carcinomes basocellulaires défigurants, nécessitant de nombreuses interventions chirurgicales et non chirurgicales.
Dans cette étude de phase II en double insu, 41 patients ont reçu soit le vismodegib (n = 26) soit le placebo (n = 15) pour une durée prévue de dix-huit mois. Les résultats remarquables en faveur du vismodegib constatés à l’analyse intérimaire ont conduit à arrêter le bras placebo et à traiter tous les patients.
En effet, parmi les 41 patients suivis pendant huit mois en moyenne, le vismodegib a considérablement réduit le taux moyen annuel de nouveaux CBC éligibles pour la chirurgie (2 tumeurs contre 29 avec le placebo), et réduit la taille des CBC existants (- 65 % contre - 11 %).
Certains patients ont présenté une régression de tous leurs CBC et aucune tumeur n’a progressé durant le traitement par vismodegib.
Toutefois les effets secondaires sont considérables et fréquents, conduisant à l’arrêt du traitement chez 54 % des patients (14/26). Les chercheurs ne recommandent donc pas ce traitement pour tous les patients ayant un syndrome de Gorlin.
« Le vismodegib offre une nouvelle option thérapeutique pour ceux qui ont une maladie étendue, en particulier pour ceux dont la vie est dévastée par cette maladie et nécessitent un traitement répété », estime l’un des chercheurs, le Dr David Bickers (Columbia University Medical Center, New York). « Le défi est de voir si nous pouvons atténuer les effets indésirables en obtenant le même bénéfice thérapeutique - en modifiant le schéma posologique ou en alternant ce traitement avec d’autres approches comme la thérapie photodynamique qui peut être efficace pour des lésions plus petites. »
Pour l’éditorialiste John Lear, une formulation topique efficace du vismodegib (crème ou injectable) pourrait peut-être constituer dans le futur une thérapie ciblée pour le grand nombre de patients avec CBC qui ne présentent pas la forme sévère ou avancée.
Tang et coll., Sekulic et coll. New England Journal of Medicine du 7 juin 2012, pp 2171 et 2180.
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