« Cette semaine s’adresse aux patients, à leur entourage, mais aussi aux médecins généralistes et aux chirurgiens dentistes afin de les sensibiliser à l’importance de consulter un spécialiste si le patient présente une symptomatologie qui peut paraître inquiétante », indique le Pr Béatrice Barry, présidente de la Société française de carcinologie cervico-faciale (SFCCF) en charge de la semaine de sensibilisation.
Le Dr Stéphane Temam, responsable du comité ORL de Gustave Roussy le souligne : « Le retard diagnostic est le réel problème. D’un côté les patients tardent à consulter même avec des tumeurs symptomatiques et visibles, de l’autre devant une symptomatologie souvent banale, les médecins généralistes peuvent passer à côté du diagnostic ».
Le cancer de la tête et du cou constitue le 8e type de cancer par ordre de fréquence en Europe, « chaque année environ 15 000 nouveaux cas sont diagnostiqués dont les 3/4 sont des hommes, ces cancers tuent près de 3 000 personnes par an », souligne Pr Barry. Deux cancers ORL sur trois sont diagnostiqués à un stade avancé. Pourtant le diagnostic et le traitement précoces permettent de sauver 90 % des patients. Le tabac, l’alcool et le virus HPV oncogène (sérotype 16) sont les trois principaux facteurs de risque associés.
Ces cancers, méconnus du grand public, apparaissent en général chez des patients alcoolo-tabagiques : « dans 70 % des cas, ces patients présentent de nombreuses comorbidités (les pathologies cardio-vasculaires en tête) et ce type de cancers est un élément supplémentaire, peu surprenant. Il peut même être associé à d’autres cancers, on parle alors de champ de cancérisation », souligne Dr Temam. Les cancers ORL ne sont que rarement métastatiques, le problème est purement loco-régional avec un envahissement ganglionnaire souvent au premier plan.
L’évolution des facteurs de risque
Ces dernières années, les pays occidentaux ont observé une nette augmentation de l’incidence des cancers liés au virus HPV oncogène : cancers des amygdales et de la base de langue. « Une nouvelle catégorie de patients plus jeunes et d’un niveau socio-économique plus élevé a fait son apparition », souligne le Dr Temam.À l’inverse, les cancers liés au tabac sont en diminution mais le Pr Barry précise : « les cancers du larynx chez les hommes diminuent mais pas chez les femmes qui fument de plus en plus ». Chez les sujets très âgés, les cancers de la cavité buccale sont en augmentation.
L’amélioration de la prise en charge
Le traitement repose essentiellement sur la chirurgie et la radiothérapie. Les progrès des techniques chirurgicales, moins délabrantes et la radiothérapie de haute précision permettant d’épargner les tissus sains tout en maintenant une action destructrice suffisante sur la tumeur, ont permis d’améliorer la qualité de vie des patients. Les effets secondaires tels que la xérostomie ou la fibrose cutanée sont en nette diminution.
Concernant les stades plus avancés, jusqu’à récemment, les chimiothérapies palliatives se résumaient en tout et pour tout à des injections de méthotrexate. Aujourd’hui, grâce à l’apparition des thérapies moléculaires ciblées, la médiane de survie est passée de 4 à 16 mois. Les immunothérapies sont également en cours d’étude. « L’essai thérapeutique en est déjà à la phase 3 et d’excellents résultats sont obtenus, l’AMM ne devrait pas tarder. Il en est de même pour le développement des chimiothérapies orales », soutient Dr Temam.
Une hypothèse à explorer...
Selon le Dr Temam, « il serait intéressant d’explorer en France, l’hypothèse selon laquelle le vaccin anti-HPV oncogène en prévention du cancer du col de l’utérus pourrait avoir un effet protecteur sur les cancers ORL à HPV ». Mais « il faudrait déjà optimiser la vaccination anti-HPV chez les jeunes filles, largement insuffisante (30 % en 2 013 ndrl), avant de penser à l’étendre aux garçons ! », prévient-il. Une couverture vaccinale de 60 % serait nécessaire pour assurer une protection efficace de la population. Les pays anglophones et nordiques étant très touchés par les cancers ORL à virus HPV commencent déjà à plancher sur le sujet. Aux États-Unis, depuis février 2012, le vaccin anti-HPV chez tous les garçons âgés de 11 à 12 ans est rentré dans le calendrier vaccinal. C’est également le cas de l’Autriche et du Canada.
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