DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA CHIMIOTHÉRAPIE anticancéreuse par les agents alkylants provoque une myélosuppression, une toxicité qui limite les doses et réduit potentiellement l’efficacité thérapeutique.
Cette toxicité médullaire des agents alkylants est associée à une faible expression du gène MGMT (méthylguanine méthyltransférase), un gène encodant une enzyme de réparation d’ADN.
Inversement, le gène MGMT est activé (du fait de la déméthylation de son promoteur) dans de nombreuses tumeurs cérébrales de grade IV, ce qui réduit l’effet cytotoxique antitumoral des agents alkylants car les lésions d’ADN induites par les agents alkylants sont réparées.
De 50 à 60 % des patients atteints de glioblastome, la plus fréquente et la plus agressive des tumeurs primitives du cerveau, ont une tumeur qui héberge le gène MGMT activé et qui résiste donc à la chimiothérapie (par TMZ ou temozolomide). Leur pronostic est encore plus sombre.
Une association beaucoup trop toxique.
Une approche développée pour surmonter cette chimiorésistance consiste à administrer un médicament appelé benzylguanine, qui inhibe le gène MGMT, en combinaison avec l’agent alkylant. Toutefois, les études de phases I et II ont montré que cette combinaison est beaucoup trop toxique pour les cellules de la moelle osseuse, aboutissant à une réduction des doses ou à l’arrêt de la chimiothérapie.
L’approche idéale serait donc de protéger simultanément les cellules de la moelle osseuse.
C’est ce qui a été évalué, par une équipe dirigée par le Dr Hans-Peter Kiem (Fred Hutchinson Cancer Research Center, Seattle), chez trois patients atteints d’un glioblastome à haut risque.
Adair, Kiem et coll. ont prélevé des cellules souches et progéniteurs hématopoïétiques dans le sang des patients ; ces cellules ont été génétiquement modifiées par un vecteur rétroviral exprimant le gène P140K - une version mutée protectrice du gène MGMT ; P140K peut réparer les dégâts causés par la chimiothérapie et il n’est pas affecté par le benzylguanine. Avant de recevoir la greffe autologue des cellules souches modifiées, les patients ont reçu un conditionnement non myéloablatif par BCNU bien toléré. Les patients ont ensuite reçu 9, 3 et 4 cycles de chimiothérapie combinant le benzylguanine et le TMZ.
« Ce traitement revient à cibler à la fois les cellules de la moelle osseuse (MO) et les cellules tumorales, mais en donnant aux cellules de la MO des boucliers protecteurs tandis que l’on retire le bouclier aux cellules tumorales », explique le Dr Jennifer Adair, premier signataire de l’étude.
Aucun effet néfaste n’a été observé.
« Les 3 patients ont eu une bonne prise de greffe des cellules souches sanguines chimioprotégées par thérapie génique, et ont pu recevoir jusqu’à 9 cycles de chimiothérapie sans effets néfastes importants. C’est le nombre de cycles le plus élevé qu’un patient avec glioblastome ait jamais pu recevoir. Un des patients est encore en vie presque trois ans après le traitement. Les deux autres sont décédés à la suite d’une progression du cancer, mais ils ont survécu plus longtemps que la durée moyenne de survie atteignant environ treize mois pour ces patients. De plus, le patient survivant n’a pas de progression du cancer et ne présente aucun signe d’effets néfastes significatifs de la thérapie génique », précise au « Quotidien » le Dr Hans-Peter Kiem.
Toutefois, « avec une survie plus longue des patients, il nous faudra surveiller de près la possibilité d’effets néfastes induits par la thérapie génique », ajoute-t-il. L’équipe recrute déjà d’autres patients atteints de glioblastome, mais ils utiliseront cette fois-ci un vecteur lentiviral plus sûr.
D’autres cancers pourraient bénéficier de cette approche, d’autres tumeurs cérébrales comme le neuroblastome mais aussi d’autres tumeurs solides qui sont chimiorésistantes par activation du gène MGMT.
Adair et coll. Science Translational Medicine, 9 mai 2012.
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