L’assurance évolue rapidement dans de nombreux domaines, permettant ainsi le développement de nouvelles offres à destination de patients ayant souffert d’un cancer. Il y a encore quelques années, un antécédent de cancer entraînait très souvent un refus de la part de l’assureur. Pour ces personnes exclues de l’assurance, l’accès au prêt bancaire, et donc à la propriété, devenait impossible, suscitant un sentiment de double peine. Le cancer est une pathologie complexe et très hétérogène. Auparavant, les taux de survie étaient relativement faibles selon les types de cancer. Face à une pathologie complexe et fortement létale, il n’est pas toujours évident pour les assureurs d’estimer la gravité de la maladie, ainsi que le risque de rechute. Dans ce contexte, l’assureur pouvait être amené à appliquer un principe de prudence et décider de refuser d’assurer ce type de risque afin de préserver sa solvabilité. De nos jours, et grâce aux progrès médicaux, le nombre de patients en rémission durable du cancer ne cesse de croître. Par conséquent, les personnes ayant survécu à un cancer sont de plus en plus assurables. Au-delà de la guérison, la réinsertion sociale et professionnelle constitue un élément important pour revenir à une vie normale.
Définir le risque individuel
Conscients que le pire dans ce contexte serait de refuser l’accès à l’assurance aux individus ayant des antécédents médicaux, nous avons développé chez SCOR, société de réassurance (voir figure), la notion de sélection inclusive (inclusive underwriting) dont le but est de repousser la frontière de l'assurabilité en évaluant le risque individuel de la manière la plus fine possible. Développer une souscription plus inclusive nécessite une très bonne connaissance des différentes formes de cancer. Pour cela, nous avons dû investir dans notre connaissance de la maladie en nous entourant de spécialistes. De la même façon que les médecins évaluent la situation spécifique d’un patient et déterminent le traitement le mieux adapté (thérapie individualisée), notre objectif est de définir pour chaque individu son risque propre pour offrir à tous une option d’assurance.
Aussi, nous actualisons en permanence notre estimation du risque individuel à partir de publications et/ou de l’analyse de larges bases de données (SEER, NHANES, etc.). Pour cela, nous avons investi dans d’importants moyens scientifiques et une expertise médicale pour acquérir de nouvelles connaissances, notamment dans le domaine du cancer où la prise en charge des patients s’est profondément améliorée au cours des 30 dernières années. La veille médicale et scientifique, ainsi que la diffusion des connaissances à l’ensemble de la communauté de l’assurance, fait partie des objectifs que nous nous sommes fixés.
Développer un « calculateur cancer »
Le cas du cancer du sein illustre parfaitement cette situation où le nombre de femmes ayant vaincu leur maladie ne cesse d’augmenter, et pour lesquelles il est important de pouvoir offrir des solutions d’assurance. Il s’agit d’une maladie hétérogène et complexe dans son évolution pour laquelle le risque de rechute et la mortalité dépendent de nombreux facteurs cliniques (TNM), histologiques (type histologique, grade, index mitotique), moléculaires (récepteurs hormonaux, HER2, Ki67) et génétiques. Afin de permettre aux assureurs de mieux apprécier le risque individuel sur la base d’éléments objectifs, nous avons développé, à partir de données issues de "SEER database" (1) et en utilisant des techniques de Machine Learning (développement d’algorithmes prédictifs), un « calculateur cancer » qui permet aux assureurs de proposer un tarif individualisé. Ce calculateur devrait permettre d’accepter sans surprime des femmes ayant eu un cancer du sein (T1aN0M0 Grade II) il y a plus de 5 ans et ne présentant aucun autre facteur de risque par ailleurs, y compris dans des pays où il n’existe pas de réglementation sur le droit à l’oubli.
Ainsi, depuis plusieurs années, nous proposons aux assureurs d’utiliser nos outils pour améliorer leurs propositions aux assurés souffrant de maladies devenues chroniques, comme certains types de cancer.
Head of Inclusive Underwriting and Medical Expertise, SCOR Global Life
(1) https://seer.cancer.gov/
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