Connaissez-vous le Tongxinluo ? Des chercheurs chinois viennent de publier les résultats de la première étude randomisée de grande ampleur démontrant l'efficacité de ce remède traditionnel pour réduire la morbimortalité après un infarctus du myocarde.
Le Tongxinluo (mot que l'on peut traduire par « ouvrir le réseau du cœur ») est un mélange de la pharmacopée chinoise constitué à partir d'extraits de plantes et d'insectes. Depuis 1996, sa prescription est autorisée en Chine dans l'angor et l'accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique. L'étude menée à Pékin par des cardiologues de l'hôpital Fuwai et de l'Académie chinoise des sciences médicales a été publiée dans le Jama.
Les travaux solides avec ce traitement n'étaient pas légion. Quelques études in vitro ont montré que le Tongxinluo réduit l'apoptose des cellules endothéliales cardiaques et vasculaires en stimulant l'autophagie. Des travaux menés chez des porcs ont montré que la prise de Tongxinluo entre une heure et trois jours avant l'infarctus facilite la revascularisation microvasculaire et réduit la taille de la zone infarcie.
Mais toutes ces études précliniques n'avaient encore jamais été confirmées chez l'homme et les scientifiques se perdent encore en conjecture sur le mode d'action de ce médicament. Tout juste peut-on suggérer que la paeoniflorine (tirée de la pivoine) et les ginsénosides (principe actif du ginseng) pourraient avoir un rôle important.
Réduction du risque cardiovasculaire
L'étude chinoise veut donc valider, avec 27 ans de retard, l'autorisation de mise sur le marché chinois du Tongxinluo. En tout, ce sont 3 777 patients qui ont été recrutés moins de 24 heures après les premiers symptômes d'un infarctus du myocarde (IDM) avec élévation du segment ST (Stemi), dans 124 hôpitaux du pays. Tous ont été pris en charge selon les recommandations en vigueur pour les Stemi. En complément, la moitié d'entre eux ont reçu une première dose orale de plus de deux grammes de Tongxinluo, suivie d'une dose d'entretien de 1,04 g trois fois par jour ; l'autre moitié un placebo.
Au cours des 30 jours qui suivent l'infarctus, un événement cardiovasculaire sévère (décès d'origine cardiaque, IDM, revascularisation coronaire, AVC) est survenu chez 3,4 % des patients du groupe Tongxinluo et chez 5,2 % des patients du groupe placebo, soit un risque significativement réduit de 36 %. Au bout d'un an de suivi, le taux d'événements cardiovasculaires sévères était réduit dans les mêmes proportions : 5,3 % dans le groupe Tongxinluo contre 8,3 % dans le groupe placebo, soit également 36 % de risque en moins.
Un modèle pour la médecine traditionnelle
Le taux de décès à la suite d'un événement cardiovasculaire était significativement réduit : 3,0 % versus 4,2 % (risque réduit de 30 %) à 30 jours et 4,5 % versus 6,1 % (-27 %) à un an. En revanche, il n'y avait pas de différence significative pour les autres critères d'évaluation : risque d'AVC ou d'hémorragie majeure, mortalité toutes causes et thrombose de stent. Il y avait par ailleurs davantage d'effets indésirables dans le groupe Tongxinluo (2,1 % contre 1,1 %), principalement des symptômes gastro-intestinaux.
« Contrairement à la plupart des travaux menés sur les remèdes issus de la médecine traditionnelle, notre étude a intégré tous les éléments et la rigueur des essais cliniques randomisés, se félicitent les auteurs dans leur discussion. De plus, la base de données et l'analyse ont été faites par une équipe indépendante. Nous pensons que notre travail peut servir de modèle à de futures études visant à évaluer la sécurité et l'efficacité des traitements issus de la médecine traditionnelle chinoise. »
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?