Au sein des biothérapies, plusieurs axes pertinents sont en cours d’évaluation. La thérapie cellulaire, mais aussi le recours à des biomatériaux comme les alginates, qui ont un intérêt certain pour limiter le remodelage du ventricule gauche après un infarctus du myocarde étendu. Après injection, les alginates vont en effet se fixer au niveau du calcium libéré après la mort des cellules myocardiques, et vont se transformer en un hydrogel qui vient renforcer la matrice extracellulaire. Une vaste étude internationale de phase 2-3 a débuté, à laquelle la France participe. Deux patients ont déjà été inclus, l’un à Brive, le second à Toulouse.
« La thérapie cellulaire peut faire appel à trois grands types de cellules, rappelle le Pr Jérôme Roncalli. Les cellules souches embryonnaires, très séduisantes car elles peuvent se différencier en tout type cellulaire de l’organisme. Mais leur utilisation en clinique est aujourd’hui limitée par l’absence de maîtrise complète de leur différenciation et de leur sécurité d’emploi et par des questions éthiques. Ces limites ont conduit à développer des cellules pluripotentes induites (iPS cells), fabriquées en laboratoire à partir de cellules humaines adultes selon un processus relativement complexe. Ces cellules « embryonnaires-like » sont intéressantes pour les évaluations pharmacologiques et potentiellement pour la thérapie cellulaire, mais les techniques de fabrication ne sont pas encore complètement maîtrisées ».
Le second grand type de cellules est représenté par les cellules souches de l’adulte, qui sont aujourd’hui les plus utilisées dans les phases d’évaluation clinique. Ces cellules, issues essentiellement du sang périphérique, de la moelle osseuse et du tissu adipeux, peuvent agir soit en induisant une néovascularisation, soit par un effet local cardiomyogénique par le biais de la fixation de différents facteurs bioactifs. « Les cellules les plus utilisées aujourd’hui sont les cellules mésenchymateuses de la moelle osseuse », précise le Pr Roncalli. Enfin, troisième type de cellules : les cellules progénitrices cardiaques.
Amélioration de la FEVG
Dans le post-infarctus (5 à 10 jours après l’infarctus), de nombreuses études de phases 1 et 2 ont été réalisées depuis une dizaine d’années, dont les résultats ont montré que la thérapie cellulaire (cellules mononucléées de la moelle osseuse) est faisable et bien tolérée. Les données des études randomisées de phase 2 ont souligné pour certaines l’efficacité de cette approche, qui permet notamment une amélioration de la fraction d’éjection ou de la perfusion myocardique, ou encore une réduction de la taille de l’infarctus. L’étude BONAMI, dont les résultats ont été publiés fin 2010 dans le European heart journal, a ainsi mis en évidence, sur une centaine de patients, les bénéfices de l’injection de cellules souches autologues. Mais dans d’autres études la thérapie cellulaire est restée sans effet, ce qui a conduit à émettre des doutes sur l’efficacité de ces cellules dont le rôle est controversé. « Les résultats de plusieurs méta-analyses, qui ont permis de pooler de 800 à 1 000 patients, vont toutefois toutes dans le même sens en montrant une amélioration de la fraction d’éjection ventriculaire gauche de l’ordre de 3 à 5 % à 6 mois. Bien sûr, il faut désormais évaluer l’impact de cette thérapie cellulaire sur la morbimortalité, ce qui est l’objectif de l’étude européenne de phase 3 BAMI, qui doit inclure 3 000 patients avec comme critère principal d’évaluation la mortalité totale. Ses résultats devraient permettre de répondre à la question de l’indication ou non des injections intracoronaires de cellules souches », estime le Pr Roncalli. Une autre voie de recherche prometteuse se fonde sur l’utilisation de cellules souches progénitrices endothéliales CD34, dotées d’un fort potentiel angiogénique. Une étude d’origine française (société CellProthera) est en cours pour évaluer l’impact de l’injection intramyocardique de ces cellules chez des patients en post-infarctus avec fraction d’éjection altérée.
Dans l’insuffisance cardiaque ou ischémie myocardique chronique avec altération de la FEVG (<35%), le programme de recherche MESAMI porte sur l’administration intramyocardique de cellules mésenchymateuses autologues. « La phase 1, étude de faisabilité qui a inclus 10 patients à Toulouse et à Nantes est achevée et fera l’objet d’une publication d’ici la fin de l’année, rapporte le Pr Roncalli qui coordonne ce programme. La phase 2, étude multicentrique randomisée versus placebo, financée par un PHRC national est en cours. Elle doit inclure 90 patients. La phase 3 a déjà été anticipée : les cellules utilisées dans le cadre du programme MESAMI ont en effet été retenues parmi cinq produits développés par un consortium (CellforCure), avec l’objectif d’obtenir une AMM en tant que médicament de thérapie innovante. Cette phase 3 est prévue en 2016, donc dans un très proche avenir ».
Les recherches dans l’angor réfractaire restent plus confidentielles, sans doute parce que le nombre de patients concernés est moindre. Une étude de phase 3 avec des cellules CD34 vient de débuter aux États-Unis.
D’après un entretien avec le Pr Jérôme Roncalli, pôle cardiovasculaire et métabolique, hôpital Rangueil, Toulouse.
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