LE PSORIASIS concerne environ 3 % de la population française et de 20 à 30 % des patients présentent une forme modérée à sévère. Le retentissement de la maladie sur la qualité de vie est très variable et la stratégie thérapeutique doit être individualisée, en se fondant sur la sévérité de la maladie et le désir du patient.
L’avènement des biothérapies en 2005 a permis d’élargir l’arsenal thérapeutique et d’offrir un recours aux patients intolérants ou ne répondant pas à au moins deux traitements systémiques classiques parmi la photothérapie, le méthotrexate ou la ciclosporine. Trois anti-TNF alpha (une protéine de fusion dimérique recombinante, l’étanercept, et deux anticorps monoclonaux, l’infliximab et l’adalimumab) et un inhibiteur des interleukines 12 et 23 ont aujourd’hui une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication.
La tolérance de ces médicaments, également largement utilisés en rhumatologie notamment dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde, a fait l’objet de nombreuses publications, qui ont permis de bien caractériser le risque infectieux. En particulier, le risque de réactivation d’une tuberculose latente, plus important avec les anticorps monoclonaux, implique la réalisation d’un bilan rigoureux avant d’instaurer le traitement. Le recours au test QuantiFERON*, bien plus sensible et spécifique que l’intradermoréaction chez les sujets vaccinés, permet d’éviter un certain nombre de prophylaxies antituberculeuses prescrites en excès. D’autres infections sont très rarement rencontrées : à mycobactéries atypiques, notamment chez les patients ayant un aquarium, ou à germes opportunistes (listériose, herpès disséminé, pneumocystoses…), le plus souvent chez des patients traités conjointement par anti-TNF et corticoïdes oraux.
Une métaanalyse récente (1) confirme une élévation modérée (risque relatif de 1,5) du risque de cancer cutané, en particulier de carcinome épidermoïde, chez des patients ayant une polyarthrite rhumatoïde traitée par anti-TNF. « Cette augmentation du risque est à comparer à celle associée à la puvathérapie : après 200 à 250 séances, le risque relatif de cancer cutané est multiplié par cinq. Les données de cette métaanalyse doivent donc nous inciter à être particulièrement vigilants chez les patients sous traitement biologique ayant été auparavant lourdement traités par puvathérapie », note le Pr Carle Paul. Cette métaanalyse ne met pas en évidence d’augmentation du risque de mélanome, mais le recul est sans doute insuffisant pour conclure sur le risque de ce type de tumeur qui est plus rare et se développe avec un temps de latence long.
Concernant les autres types de tumeurs malignes, quelques rares cas de lymphomes sont associés aux biothérapies, mais il n’y a pas d’augmentation du risque global au niveau d’une population.
Les patients souffrant de psoriasis ont en revanche un risque accru de cancers liés non pas au traitement mais aux comorbidités, particulièrement les cancers associés au tabac et à l’alcool (poumons, ORL…).
Comorbidités et risques associés.
Une des grande question actuelle porte sur l’impact des traitements systémiques sur les comorbidités et les risques qui leur sont associés. Il est établi que le risque d’événement cardio-vasculaire – infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral- est augmenté chez les patients ayant une forme sévère de la maladie. Et certains traitements pourraient accentuer ce risque. L’augmentation de l’incidence des accidents cardio-vasculaires majeurs observée dans certaines études de phase III chez les patients traités par briakinumab (anticorps monoclonal dirigé contre l’IL-12 et l’IL-23), inexpliquée sur le plan physiopathologique, a suscité de nombreuses discussions.
« En pratique, un patient ayant un psoriasis modéré à sévère va recevoir au cours de sa vie plusieurs types de traitements, ce qui impose une surveillance clinique, voire biologique, étroite car quelques accidents rares, mais graves peuvent survenir, précise le Pr Paul. Il semble, par ailleurs, important de ne pas « gaspiller » nos cartouches trop rapidement. Une étude récente souligne la rapidité du passage d’un médicament à un autre dans la vraie vie, en moyenne après 18 à 24 mois de traitement. Et après seulement une année de biothérapie, de 25 à 30 % des patients ont changé de traitement, notamment en raison d’une perte d’efficacité ou de la survenue d’un effet indésirable. Un des objectifs est de maintenir sous traitement plus de patients plus longtemps, afin de ne pas épuiser prématurément le recours thérapeutique ». Dans ce contexte, des stratégies sont développées pour réduire le risque d’apparition d’anticorps anti-TNF, comme l’association au méthotrexate qui mérite d’être mieux évaluée en dermatologie. La recherche de nouvelles molécules est également très active, et plusieurs agents anti IL-17, qui interfèrent au niveau des mécanismes précoces de déclenchement des lésions, sont évalués dans des études de phase II et III.
D’après un entretien avec le Pr Carle Paul, hôpital Purpan, CHU de Toulouse.
(1) Mariette X, et coll. Ann Rheum Dis 2011;70(11):1895-904.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024