Une balance glucides/lipides à préserver

Le rôle délétère du gras

Publié le 17/09/2015
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Guess et al ont étudié en vraie vie l’impact des acides gras saturés alimentaires sur l’insulinosensibilité (technique du clamp) et les glycémies de sujets témoins, obèses et prédiabétiques (1).

Ils montrent une relation significative positive entre la portion d’acides gras saturés (% SFA) et les glycémies à jeun (GAJ) ainsi que la post-prandiale à 2 heures, et inversement proportionnelle avec l’insulinosensibilité.

Au contraire, les acides gras polyinsaturés (% PUFA), étaient corrélés avec l’insulinosensibilité et une baisse des glycémies à 2h. La part d’acides gras mono-insaturés (% MUFA) n’est pas associée à la GAJ mais influence à la baisse la glycémie à 2h.

Cette étude a le mérite de confirmer ce qui était bien démontré en recherche fondamentale : le rôle délétère des acides saturés sur la sensibilité à l’insuline et donc l’équilibre glycémique chez l’humain sain ou prédiabétique, mais également, en miroir, le rôle bénéfique des acides gras polyinsaturés.

La stéatose hépatique ajoute du risque

Si la structure des acides gras joue un rôle métabolique, leur lieu de stockage semble aussi important. Ainsi, Fukuda et al ont étudié la part relative de l’obésité viscérale et de la stéatose hépatique sur le risque d’apparition d’un diabète de type 2 (2). 4 629 personnes réparties en trois groupes – stéatose mince, obèse sans stéatose, obèse avec – ont été suivies en moyenne 12 ans. La présence d’une stéatose hépatique était définie par échographie avec un critère binaire (oui/non).

Au cours du suivi, 7 % des participants ont développé un DT2 (351/4 629). À noter : l’analyse de l’incidence du DT2 est réalisée après appariement sur l’âge, le sexe, les antécédents familiaux de DT2, et la consommation d’alcool.

Le risque ajusté de développer un DT2, comparé au groupe témoin, chez les sujets minces avec stéatose hépatique est de 4,13 ; IC95 [2,45 – 6,64]. Il est de 2,0 ; IC95 [1,4 – 2,71] chez les obèses sans stéatose et de 8,22 ; IC95 [6,27 – 10,86] chez les obèses avec stéatose. La présence d’une stéatose hépatique confère dans cette étude un risque de diabète supérieur à la présence d’une obésité (sans stéatose), avec un effet cumulatif des deux facteurs de risque.

Le GLP2 aiguilleur de lipides

Selon Taher et al. le GLP2 pourrait jouer un rôle dans l’orientation des lipides ingérés vers leur lieu de stockage (3). Cette hormone est reconnue comme un facteur trophique intestinal, des protocoles sont en cours dans les syndromes de grêle court afin d’étudier son rôle réel sur la dédifférenciation intestinale (en vue d’augmenter l’absorption digestive des nutriments).

Plus récemment, l’équipe canadienne qui présente ce travail avait déjà démontré que le GLP2 favorisait la captation et l’exportation des lipides par les cellules intestinales. Elle questionne ici son rôle dans le stockage des lipides par le foie. Pour cela, ils ont injecté 2 fois/j du GLP2 à des hamsters sous régime standard ou riche en graisse (HFD), pendant 10 jours en comparaison à l’injection d’un placebo.

Le groupe GLP2 présente une accumulation rapide de lipides intra-hépatique, accompagnée d’une augmentation secondaire des ARNm d’IL6 et de TNFα.

Ainsi, si le GLP1 est connu pour favoriser le stockage des glucides (promotion de l’insulinosécrétion et inhibition de la production hépatique de glucose), le GLP2 favorise quant à lui le stockage des lipides en augmentant leur absorption intestinale et leur stockage hépatique.

CHU de Tours

(1) ADA 2015. OR-87

(2) ibid. OR-156

(3) ibid. OR-25

Pr Pierre-Henri Ducluzeau

Source : Congrès spécialiste