Le remodelage osseux est permanent avec un couplage des activités ostéoclastiques et ostéoblastiques. Il est régulé, entre autres, par la mise en charge, le système nerveux central et sympathique, par des signaux autocrines/paracrines (RANK/RANKL, TNFalpha, IL1, IL6…) et par des hormones (PTH, calcitonine, œstrogènes…).
Le remodelage osseux est en partie dépendant de la prise alimentaire (1,2) et donc des hormones intestinales, dont font partie les incrétines. Les incrétines, sécrétées en réponse à l’ingestion du bol alimentaire par les cellules K et L de l’intestin, ont pour rôle principal de potentialiser la sécrétion d’insuline (3). Le Glucose Insulinotropic Polypeptide (GIP) et le Glucagon Like Peptide 1 (GLP1) sont les seules incrétines identifiées à ce jour (4). Ces hormones agissent via leurs récepteurs et sont rapidement dégradées par la dipeptidylpeptidase 4 (DPP4) dans la circulation sanguine. Comme toutes les hormones, les incrétines agissent sur les cellules via leur récepteur. Le récepteur du GIP (GIPR) est présent à la surface des ostéoclastes, ostéoblastes et ostéocytes. L’administration de GIP dans des cultures d’ostéoblastes entraîne une augmentation de la prolifération de ces cellules, de leur production de TGF-beta, de phosphatase alcaline, de collagène de type 1 et une augmentation de l’activité de la lysyl oxydase, enzyme favorisant la maturité du collagène (5).
Un effet bénéfique dans des modèles de fragilité osseuse
Les souris avec une invalidation du récepteur du GIP (GIPR KO) présentent des altérations de la masse osseuse et du volume trabéculaire associées à des modifications de l’épaisseur corticale, des constituants matriciels et de la résistance mécanique osseuse (6). L’utilisation d’analogues stables dans des modèles de fragilité osseuse s’est montrée bénéfique pour les constituants de la matrice osseuse ainsi que pour la microarchitecture trabéculaire et corticale et a contribué à améliorer la résistance osseuse (7).
Chez l’Homme, un polymorphisme du gène du récepteur du GIP est associé à une diminution de l’activité du récepteur GIPR. Il se traduit, chez la femme ménopausée, par une diminution de la densité minérale osseuse au col fémoral et à la hanche et par une augmentation de l’incidence des fractures périphériques (8).
La présence du récepteur du GLP1 (GLP1R) sur les cellules osseuses est controversée. En culture cellulaire, le GLP1 n’a pas d’action directe sur les ostéoblastes et les ostéoclastes (9). Chez les rongeurs, le GLP1 entraînerait un effet osseux via son récepteur sur les cellules C thyroïdiennes responsable de la sécrétion de calcitonine (10). Les souris avec une invalidation du récepteur au GLP1 (GLP1R KO) ont des altérations de la masse osseuse et de la microarchitecture trabéculaire et corticale ainsi qu’une diminution de la résistance osseuse avec des altérations de la maturité du collagène (11). L’administration d’un agoniste du GLP1 dans des modèles précliniques de fragilité osseuse entraîne une amélioration de la microarchitecture trabéculaire, des constituants matriciels et de la résistance osseuse (12)
Chez l’Homme l’administration de GLP1 exogène n’entraîne pas de diminution du marqueur de résorption CTX (1). L’utilisation en diabétologie d’agonistes du GLP1 ne semble pas modifier le risque fracturaire (13).
L’implication des incrétines, GIP et GLP1, dans le remodelage osseux est démontrée dans des modèles murins. Ces hormones participent au maintien de la masse osseuse et à l'obtention d'un os résistant de bonne qualité. Leur rôle dans le remodelage osseux chez l'Homme reste en revanche à démontrer, de même que leur mode d'action, direct sur les cellules osseuses, ou indirect via le système nerveux.
* Service de rhumatologie, CHU Angers
** GEROM UPRES EA 4658, université d’Angers
(1) Henriksen DB et al. J Bone Miner Res 2003;18:2180-9
(2) Li F et al. J Bone Miner Res 1999;14:1457-65
(3) Creutzfeld W. Diabetologia 1979;16:75-85
(4) Drucker DJ. Cell Metab 2006;3:153-65
(5) Mieczkowska A et al. Bone 2015;76:31-9
(6) Mieczkowska A et al. Bone 2013;56:337-42
(7) Mansur SA et al. Bone 2016;87:102-13
(8) Torekov SS et al. J Clin Endocrinol Metab 2014;99:E729-33
(9) Yamada C et al. Endocrinology 2008;149: 574-9
(10) Madsen LW et al. Endocrinology 2012;153:1538-47
(11) Mabilleau G at al. J Endocrinol 2013;219:59-68
(12) Mansur SA et al. J Cell Physiol 2015;230:3009-18
(13) Mabilleau G et al. J Diabetes 2014;6:260-6
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