L'organisation Cochrane dresse un bilan contrasté de l'efficacité des probiotiques. Telle est la conclusion de leur impressionnante série de revues publiées depuis 2018 portant sur l'utilisation des probiotiques (traitement à base de micro-organismes vivants), prébiotiques (à base de fibres censées promouvoir la croissance des « bonnes » bactéries) et symbiotiques (un mélange des deux approches) dans différentes indications.
Premier constat : bien qu'ils soient souvent mis en avant dans cette indication, les probiotiques n'ont, selon les auteurs, aucun effet à court terme pour traiter les diarrhées infectieuses aiguës, par rapport au placebo. Aucune étude bien construite ne démontrait que la prise de probiotiques faisait une différence chez les patients ayant une diarrhée qui durait 48 heures ou plus.
Utile dans la prise en charge de la prématurité
Chez les bébés prématurés, la Cochrane estime en revanche que les probiotiques pourraient réduire le risque d'entérocolite nécrosante (ECUN) par rapport au placebo (- 46 % selon les données de 57 études sur plus de 10 000 enfants). Cette amélioration s'observait quel que soit le mode d'administration : à la mère avant l'accouchement, pendant l'allaitement ou directement au bébé. Ils réduisaient aussi la mortalité de 23 % (54 études, plus de 10 000 enfants).
Un bémol : le bénéfice n'est pas retrouvé chez les très grands prématurés (moins de 29 semaines d'aménorrhée) ou les nourrissons de très petits poids (moins d'un kilo à la naissance). Et plus largement pour les gastro-entérites du prématuré, l'effet des probiotiques serait limité voire nul pour prévenir les formes sévères.
Les conclusions sont similaires pour les symbiotiques, mais avec un niveau de preuve plus faible. Les prébiotiques n'auraient, quant à eux, aucun intérêt chez les prématurés, selon les données de sept études, totalisant 705 enfants.
Les probiotiques réduisent « probablement » le risque de diarrhées et d'infections à Clostridium difficile induites par les antibiotiques (55 % de risque en moins, 33 études, 6 300 patients), mais pas pour prévenir les coliques infantiles. Les études rassemblées indiquent toutefois que les probiotiques sont associés à une diminution du temps passé à pleurer chaque jour par les petits malades.
De manière générale, les probiotiques et les symbiotiques parviendraient à soulager sur le long terme les enfants en proie aux douleurs intestinales chroniques, mais les auteurs de la Cochrane estiment manquer de données en ce qui concerne les potentiels effets indésirables.
Des résultats probants dans les infections respiratoires
Une des revues Cochrane était consacrée aux infections respiratoires (grippe, coronavirus du rhume…), avec des résultats assez encourageants. Les probiotiques pourraient agir favorablement sur plusieurs paramètres : prévention de l'infection des voies aériennes supérieures, réduction de 1,2 jour de la durée des symptômes, réduction de la consommation d'antibiotiques (uniquement chez l'enfant) sans augmentation significative des effets indésirables par rapport au placebo.
Une autre revue Cochrane attribue aussi des « effets bénéfiques limités » aux probiotiques dans la prise en charge de la mucoviscidose : plusieurs études associent la prise à une diminution des exacerbations pulmonaires même si « cela reste incertain ». Il y a en revanche plus de preuves en faveur d'une réduction notable des marqueurs de l'inflammation intestinale (la calprotectine notamment), mais il s'agit là d'observation populationnelle, sans certitude quant à un éventuel bénéfice individuel.
Mycoses vaginales et encéphalopathie hépatique
Spécifiquement pour les adultes, les auteurs de la Cochrane concluent que les probiotiques améliorent l'efficacité des antifongiques prescrits aux femmes non enceintes atteintes de mycose vaginale, avec une disparition plus rapide de plusieurs jours.
Dans les encéphalopathies hépatiques, les probiotiques améliorent également la récupération. Mais ce n'est pas le cas pour d'autres pathologies explorées comme le diabète gestationnel et l'eczéma.
« Dans l'ensemble, les preuves concernant l'efficacité des probiotiques, des prébiotiques et des symbiotiques sont très variables, concluent les auteurs. Il serait sage de questionner les allégations de santé qui leur sont attachées. Dans certains cas, elles sont surévaluées, et dans d'autres ce sont les risques qui peuvent avoir été sous-estimés. Quelle qu'en soit la raison, il faut parler à un professionnel de santé avant d'acheter ou de consommer un probiotique. »
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