LES GASTRO-ENTÉRITES motivent quelque 5 millions de consultations chaque année. Chez un patient dont la diarrhée persiste depuis 3 jours révolus malgré un traitement symptomatique et des mesures diététiques, les recommandations préconisent de réaliser une coproculture et un examen parasitologique des selles. Les bactéries les plus fréquemment en cause sont Campylobacter jejuni, les salmonelles, les shigelles et Yersinia. Mais la présence d’un germe ne signifie pas systématiquement une relation de causalité. Très souvent en effet l’examen rapporte la présence de staphylocoque doré, à l’origine d’une intoxination mais qui n’explique pas la persistance des symptômes. De même, la coproculture peut retrouver Candida albicans, normalement présent dans la flore colique et qui n’est pas responsable de diarrhée aiguë chez les sujets jeunes immunocompétents, ou de multiples colonies d’E. coli qui là encore ne sont pas en cause.
Trois autres vrais pathogènes doivent être connus :
- Hafnia alvei, d’identification récente, qui est difficile à distinguer de certains colibacilles pathogènes. Le traitement se fonde sur la prescription d’ofloxacine à la posologie de 200 mg matin et soir pendant 3 jours.
- Et deux protozoaires, Blastocystis hominis et Dientamoeba fragilis, qui sont présents à une fréquence comparable dans les selles de sujets sains et de patients souffrant de diarrhée. Cependant les études ont montré que le traitement antiparasitaire permet de réduire la durée de la diarrhée comparativement au placebo. « Un traitement minute par secnidazole est tout à fait justifié », estime le Pr Beaugerie, avant de rappeler que de façon globale, l’étude du caractère pathogène ou non d’un germe doit se faire selon une grille, qui tient compte de différents paramètres cohérents entre eux : notion d’épidémie, distribution gaussienne de la durée des symptômes, réponse mesurable (anticorps par exemple), lésion reproductible chez l’animal et candidat traitement (préventif ou curatif) qui accélère la guérison.
Deuxième situation clinique : une diarrhée après prise d’antibiotiques (ampicilline) avec une fièvre à 37,8 °C. D’une part la prolifération de Candida albicans dans les selles, fréquemment retrouvée, ne prouve pas qu’il est responsable de la diarrhée. D’autre part, la recherche de Clostridium difficile peut aboutir à des résultats divergents : culture positive mais recherche enzymatique (glutamate déshydrogénase, spécifique du germe) négative. « Il est possible de réaliser une étude du pouvoir toxinogène de la souche, mais en pratique, il est licite de considérer qu’il s’agit d’un faux négatif et de traiter par métronidazole à la posologie de 1 g/jour pendant 10 jours », expose le Pr Beaugerie.
La coproculture peut également mettre en évidence une prolifération de Klebsiella oxytoca, responsable d’une diarrhée aiguë hémorragique au quatrième jour du traitement antibiotique et qui cède en quelques heures après l’arrêt de l’antibiothérapie (sinon sous ofloxacine). Parfois, la diarrhée n’est pas hémorragique mais ce germe sera considéré comme l’agent causal s’il est retrouvé dans les selles.
Enfin, dernière situation pratique fréquente : la diarrhée au retour d’un voyage, avec le piège des « faux amis » d’Entamoeba histolitica, notamment Entamoeba dispar, espèce proche et non pathogène très fréquente. Idéalement, l’examen devrait se faire sur selles fraîches, ce qui permet de distinguer les formes pathogènes, qui sont mobiles et hématophages, des formes non pathogènes. Mais lors de la recherche de kystes dans les selles, il est très difficile de distinguer les deux espèces, ce qui conduit en général à proposer un traitement empirique d’épreuve. Le développement de nouvelles techniques de biologie cellulaire devrait permettre à terme de faire le diagnostic différentiel.
D’après un entretien avec le Pr Laurent Beaugerie, service de gastro-entérologie et nutrition, hôpital Saint-Antoine, Paris.
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