« Ceux qui abuseront de la pénicilline seront moralement responsables de la mort de patients qui succomberont aux germes résistants, j’espère que ce fléau pourra être évité… ». Ces propos, tenus en 1945 au « New York Times » par Alexander Fleming, découvreur de la pénicilline, ont une résonance bien particulière à l’heure où l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé la résistance aux antimicrobiens parmi les 10 principales menaces pour la santé humaine.
Chaque année, en effet, cette résistance aux antibiotiques provoque près de 700 000 décès dans le monde, dont 33 000 en Europe et environ 5 500 en France. Un phénomène qui s’est accéléré ces dix dernières années, au point qu’un récent rapport a évalué à 10 millions le nombre de décès attribuables à la résistance aux antimicrobiens dans le monde à l’horizon 2050.
La France, mauvais élève en matière de prescriptions
Si de nombreux pays ont déjà mis en place des initiatives à l’échelon local pour tenter d’enrayer la progression de l’antibiorésistance, les résultats sont souvent mitigés. En France, notamment, alors que le premier plan éco-antibio, piloté par le ministère de l’Agriculture, a permis une réduction de 39 % de la consommation d’antibiotiques dans le secteur animal en 6 ans, les différents plans antibiotiques en médecine humaine n’ont pas rencontré le succès escompté. Notre pays était même, en 2018, un des plus mauvais élève de l’Europe en la matière avec une consommation d’antibiotiques supérieure de 41 % à la moyenne européenne, juste derrière la Grèce et Chypre. Et c’est en médecine de ville que la situation était la plus préoccupante : 90 % du volume des prescriptions provenait de ce secteur (70,6 % de la médecine générale), contre 10 % pour le secteur hospitalier ; une consommation qui a, de plus, augmenté de 8,6 % en ville entre 2006 et 2016.
Du local au global
En 2015, l’OMS a donc proposé un Plan d’action mondial pour combattre la résistance aux antimicrobiens organisé autour du concept « One health » (« une seule santé, une seule planète »), l’objectif étant de lutter de façon globale et coordonnée contre ce fléau. En 2017, ce plan a été décliné en un programme commun de lutte contre la résistance aux antimicrobiens au niveau européen (« One health action plan against antimicrobial resistance »). Ce dernier a lui-même débouché, en France, sur une feuille de route interministérielle (santé, agriculture, environnement, recherche) de maîtrise de l’antibiorésistance en 2018. Cette feuille de route est organisée autour de 5 axes transversaux comportant 13 mesures réparties en 40 actions : sensibilisation et communication auprès du grand public et des professionnels de santé ; formation des prescripteurs et bon usage des antibiotiques ; recherche et innovation pour la maîtrise de l’antibiorésistance ; mesure et surveillance de cette résistance ; gouvernance et politique intersectorielles de maîtrise de cette menace.
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