Dans une cohorte de l'armée américaine

Un traitement ultra précoce réduit de 30 à 600 fois les réservoirs du VIH

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Publié le 05/03/2020
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Des chercheurs nord-américains ont étudié la constitution des réservoirs du VIH à la phase précoce de l'infection.
Eliminer le virus de la plupart des tissus

Eliminer le virus de la plupart des tissus
Crédit photo : S. Toubon

Une équipe internationale coordonnée par le Dr Nicolas Chomont (université de Montréal) montre que la mise précoce sous traitement antirétroviral avant séroconversion vide les réservoirs viraux des patients infectés par le VIH.

Dans ce travail, les chercheurs ont établi l'historique de l'évolution de la charge virale et de la persistance du virus au niveau des ganglions lymphatiques et d'autres tissus à différents stades de l'infection dans une cohorte de 377 patients montée dans le cadre d'un programme de recherche sur le VIH de l'armée américaine.

L'originalité de cette cohorte est d'avoir fourni un accès à des prélèvements à la fois sanguins, mais aussi à des biopsies rectales et lymphatiques, réalisées précocement, ce qui est sans précédent. De nombreux compartiments cellulaires sont infectés à la phase aiguë de l'infection.

Les scientifiques ont concentré leur analyse sur les patients qui ont débuté un traitement après un délai médian de deux jours après le diagnostic, avant qu'ils entrent en séroconversion. La mise sous traitement précoce réduit les réservoirs de 30 à 600 fois, ont estimé les auteurs, et élimine le virus de la plupart des tissus. Les rares cellules qui persistent sont retrouvées préférentiellement au niveau des ganglions lymphatiques. Les auteurs supposent que les tissus lymphoïdes servent de « banques de graines » au virus.

Alors que la mise en place tardive d'un traitement antirétroviral entraîne seulement une diminution modeste de la fréquence des cellules infectées, ces résultats indiquent que la plupart des cellules cibles de la phase précoce peuvent être rapidement débarrassées du virus avec un traitement antirétroviral. À l'inverse, les cellules encore infectées après le pic de virémie ont une plus grande capacité à persister.

« Bien que les réservoirs viraux chez ces patients traités précocement soient extrêmement petits, le virus est toujours présent et on pourrait penser qu'il n'y a pas de bénéfice clinique immédiat, explique le Dr Nicolas Chomont. Néanmoins, alors que ces patients traités très tôt ont des réservoirs viraux 100 fois plus petits par rapport au groupe contrôle, on peut raisonnablement penser qu'il sera plus facile d'éradiquer ces mini-réservoirs que ceux plus grands que les sujets ayant commencé le traitement antirétroviral plus tard ». 

L Leyre et al, Science Translational Medicine, DOI : 12/533/eaav3491/DC1, 2020

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du médecin