Il aurait préféré croire à un mauvais poisson. Mais le courrier reçu ce mois de janvier par le Dr Jean-Louis Zylberberg, médecin du travail de 56 ans, l’informant de son interdiction « d’exercer la profession de médecin durant un an, dont six mois avec sursis », prendra effet (pour la partie non assortie de sursis) le 1er avril 2024. Ainsi en a décidé la chambre disciplinaire de première instance d’Île-de-France de l’Ordre des médecins dans son délibéré après l’audience du 28 novembre que Le Quotidien avait relatée.
À l’issue des auditions, la partie adverse demandait une sanction disciplinaire contre ce praticien accusé par un employeur d’avoir rédigé des certificats médicaux de complaisance, suite à des inaptitudes médicalement constatées rendant impossible le maintien au poste. Deux condamnations aux dépens, de respectivement de 2 000 euros et 1 000 euros, étaient également réclamées (par l’Ordre et l’employeur). En définitive, seule la pénalité de 1 000 euros a été retenue. « C’est rude, je ne m’attendais pas à ça », avoue le Dr Zylberberg (affilié CGT).
Bien que secoué, le praticien n’entend pas se laisser faire et compte faire appel du jugement. Toujours avec le renfort de ses collègues médecins mais aussi de membres de l’inspection du travail. « La sanction est lourde. Quand j’ai ouvert la lettre ça a été un coup de massue. Pour moi c’est l’incompréhension. Je suis sanctionné pour n’avoir fait que mon métier », confie-t-il.
Situation révélatrice
L’affaire qui oppose le médecin du travail à un employeur du Val-de-Marne débute en 2022. Ce dernier lui reprochait d’avoir rendu 12 avis d’inaptitudes médicales entre 2020 et 2022, s'appuyant sur des « certificats médicaux de complaisance », concernant les salariés d'une entreprise francilienne de fabrication et livraison de portes blindées dont il est le médecin du travail.
La situation, très révélatrice de la difficulté des médecins du travail d’assurer leur rôle, avait alors ému jusqu’au député de La France Insoumise François Ruffin. Ce dernier avait alerté le ministre du Travail Olivier Dussopt au sujet de la protection des médecins du travail dans l’exercice de leur métier, en prenant appui, entre autres, sur l’exemple de Jean-Louis Zylberberg… « Ces décisions d’inaptitude, le Dr Zylberberg ne les a pas prises de gaieté de cœur. Pour le médecin du travail, la déclaration d’inaptitude est le dernier recours. Quand il n’y a pas d’autres solutions pour protéger la santé du travailleur que de demander qu’il quitte son poste », avait lancé l’élu LFI, également membre de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale début décembre.
« J’avais apprécié le soutien, mais je ne l’ai appris que par la bande. Ce sont des collègues qui m’ont chambré en me disant que j’étais devenu une Very important Personne », sourit le Dr Zylberberg, qui aurait toutefois apprécié que le député le contacte directement avant de mentionner son nom… En attendant la nouvelle audience, devant la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre, le médecin a décidé de partir en vacances « pendant qu’il bénéficie encore de congés payés », ironise-t-il.
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