Comme chaque année en début d’été, le Haut conseil de la santé publique met à jour les recommandations destinées aux professionnels de santé (médecins, infirmiers, sages-femmes et pharmaciens) afin qu’ils puissent conseiller les voyageurs, que ce soit en consultation, dans les centres de vaccinations internationales, en pharmacie ou encore en médecine du travail.
Parmi les nouveautés, le HCSP fait le point sur les deux vaccins contre le chikungunya disponibles chez les personnes de 12 ans et plus, Ixchiq, vivant atténué, et Vimkunya, vaccin recombinant basé sur la technologie VLP, encore non remboursé, tous les deux administrables par voie intra-musculaire au moins 14 jours avant le départ, et indépendamment des antécédents de chikungunya.
Ixchiq, est contre-indiqué chez les personnes de plus de 65 ans, chez les personnes immunodéprimées et en cas d’hypersensibilité au principe actif ou à un excipient. Il n’est pas recommandé chez la femme enceinte et allaitante. Vimkunya est une alternative pour les immunodéprimés et immunocompétents ; il est contre-indiqué en cas d’hypersensibilité au principe actif ou à un excipient. Il n’est pas non plus recommandé chez la femme enceinte et allaitante faute de données.
Une stratégie vaccinale individualisée sur l’âge et les comorbidités pour la dengue
Dès mai, le HCSP avait dévoilé ses recommandations pour la dengue, dont la vaccination est à considérer en fonction de la durée du séjour en zone endémique ou épidémique, des antécédents personnels de dengue et des comorbidités du voyageur. Qdenga (laboratoires Takeda), le seul vaccin disponible contre cette arbovirose en France à partir de l’âge de 4 ans, est recommandé uniquement : en cas de séjour de plus de quatre semaines ou de séjours répétés dans une zone où le taux d’incidence est supérieur à 100 pour 100 000 personnes ; ou de séjour, quelle qu’en soit la durée, dans une zone où une épidémie est avérée.
Le HCSP encourage, s’il n’est pas possible de différer le voyage, une stratégie vaccinale individualisée selon l’âge et la présence de comorbidités connues pour accroître le risque de dengue grave. Chez les personnes âgées de 6 à 60 ans présentant des comorbidités, il est recommandé de vacciner indépendamment des antécédents personnels de dengue. Chez les plus de 60 ans avec comorbidités, le HCSP est moins incitatif en indiquant que la vaccination peut être « envisagée, dans le cadre d’une décision médicale partagée », indépendamment des antécédents personnels de dengue. Quant aux personnes de 6 ans et plus sans comorbidités, là aussi, la vaccination peut être « envisagée, dans le cadre d’une décision médicale partagée », mais uniquement chez les sujets ayant des antécédents personnels de dengue (PCR DENV et/ou Ag NS1, antécédent clinique évocateur lors d’une épidémie, sérologie DENV positive).
Vaccination des soignants à risque d’exposition du mpox de clade I
Pour le mpox, la vaccination doit être proposée aux voyageurs ayant des pratiques sexuelles à risque, conformément aux recommandations nationales (HSH, trans avec partenaires sexuels multiples, prostitution, etc.) mais aussi (nouveauté) aux voyageurs qui se rendent en zone de circulation active du mpox de clade I, quand ils sont soignants et travailleurs humanitaires à risque d’exposition ; ou à risque d’exposition en fonction des conditions de vie sur place (promiscuité, partage de la literie, respect des mesures-barrière).
Deux vaccins sont actuellement disponibles et interchangeables, Imvanex et Jynneos, avec un schéma vaccinal à deux doses, voire trois pour les immunodéprimées. En cas de départ imminent ne rendant pas possible la réalisation complète du schéma vaccinal, l’administration d’une dose offre un niveau de protection satisfaisant, est-il précisé.
Comme l’an passé, pour la rougeole, il est recommandé de vérifier et mettre à jour la vaccination des voyageurs ; et une troisième dose est recommandée aux personnes ayant commencé leur vaccination avant leur premier anniversaire, comme en France où déjà près de 700 cas ont été déclarés.
Pour les infections invasives à méningocoques (IIM), en France, la stratégie de vaccination a été revue, est-il rappelé : la vaccination tétravalente ACWY est obligatoire pour les nourrissons de moins de deux ans avec un schéma à deux injections (6 et 12 mois de vie). Elle est recommandée chez les enfants de 2 ans à 4 ans révolus (mesure transitoire de rattrapage vaccinal) et les adolescents de 11 à 14 ans indépendamment de leur statut vaccinal, puis chez les 15 à 24 ans révolus. La vaccination contre les IIM de sérogroupe B par le vaccin Bexsero est obligatoire pour les nourrissons de moins de deux ans ; un rattrapage est recommandé chez les enfants âgés de 2 à 5 ans et les 15-24 ans (chez qui il est désormais remboursé).
Pour les voyageurs, la vaccination tétravalente contre les IIM est recommandée aux personnes se rendant dans une zone d’endémie d’IIM A, C, W, Y, notamment la « ceinture de la méningite » située en Afrique subsaharienne, en particulier pour y exercer une activité dans le secteur de la santé. Par ailleurs, certains pays ont une politique vaccinale différente pour les IIM de celle de la France en population générale, ce qui peut motiver une vaccination lors de séjours prolongés, en particulier d’adolescents. Le HCSP rappelle aussi les règles pour les pèlerinages à La Mecque.
Un chapitre a été ajouté à la suite de l’extension géographique des infections à virus Oropouche en Amérique latine et dans les Caraïbes, et à l’identification de cas de transmissions materno-fœtales. Il rappelle les mesures de protection personnelle antivectorielle, et déconseille le voyage des femmes enceintes, ou avec un projet de grossesse.
Enfin, les cartes concernant le paludisme, les arboviroses, la poliomyélite, la tuberculose ou l’encéphalite à tiques sont actualisées.
Les effets indésirables de Ixchiq sous l’œil de l’ANSM
Selon l’enquête de pharmacovigilance de l’Agence nationale de sécurité du médicament, entre le 7 mars et le 2 juin 2025, 47 cas d’effets indésirables du vaccin Ixchiq ont été déclarés en France (en majorité, chez des patients de La Réunion, en moyenne âgés de 74 ans), dont 18 cas graves comprenant 3 décès de patients polypathologiques. Les symptômes rapportés étaient similaires à ceux d’une forme grave d’infection au virus chikungunya. Il existerait un lien entre le vaccin et les effets indésirables graves pour 9 de ces patients. Pour l’un des trois décès, le lien avec Ixchiq « semble très vraisemblable, compte tenu de la chronologie, des symptômes du patient et des résultats des examens biologiques recueillis. À ce jour, il n'est pas possible d'établir de lien entre le vaccin et les deux autres décès ».
Des investigations sont en cours au niveau européen sur des signaux potentiels concernant le risque d’encéphalopathie ou d’encéphalite chez des personnes âgées avec comorbidités, le risque de chute à distance de la vaccination et le risque de microangiopathie thrombotique.
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