Comment mobiliser davantage la profession autour de la prise en charge des patients en ALD sans médecin traitant ? Face à la croissance inexorable de ces assurés (+2,6 % par an sur la période 2014-2022) sous l’effet de la baisse des effectifs de généralistes libéraux conjuguée à la forte hausse des maladies chroniques, le plan d’action d’« aller vers » lancé l’an passé par la Cnam auprès des libéraux commence à porter ses fruits. Fin 2023, si rien n’avait été fait, « nous serions à 700 000 patients en ALD sans médecin traitant. Là, nous sommes à moins de 510--000, soit 190 000 patients en moins », précise la Cnam au Quotidien.
Mais l’Assurance-maladie veut accélérer la cadence et mise sur les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP). « Pour un médecin isolé, l'idée de prendre de nouveaux patients peut effrayer les confrères déjà surchargés, justifie le Dr Patrick Vuattoux, coprésident d’AvecSanté (Avenir des équipes coordonnées). La maison de santé propose une approche en équipe plus favorable pour accueillir davantage de patients ALD ». Face à l’urgence, « on doit jouer le jeu », poursuit le généraliste de Besançon. Soins médicaux et paramédicaux, prévention, suivi, éducation thérapeutique : l’équipe pluripro structurée au sein de la MSP semble particulièrement adaptée pour assurer l’accompagnement holistique des pathologies chroniques.
C’est pourquoi la fédération a lancé un appel aux quelque 2 400 équipes libérales pour libérer du temps médical. Dans sa maison de santé, par exemple, c’est un infirmier qui s’occupe des soins non programmés, de l’hospitalisation éventuelle, de l’accueil et du dossier du patient. « C’est autant de temps gagné pour le médecin », témoigne le Dr Vuattoux, qui suggère de créer des postes d’« infirmiers d’équipe ». Cela exige une « approche beaucoup plus collective » en lien avec « les nouvelles pratiques » mais aussi une rémunération forfaitaire adaptée. « Le modèle économique actuel de la MSP est encore trop centré sur l’acte », admet le Vuattoux.
Pour un médecin isolé, l'idée de prendre de nouveaux patients peut effrayer les confrères déjà surchargés
Dr Patrick Vuattoux, président d’AvecSanté
Les maisons de santé sont donc invitées à relever ce « challenge supplémentaire », même si toutes les structures ne pourront pas assumer aisément cette charge. C’est le cas de la maison de santé des Mureaux, ouverte en 2017, où exerce la Dr Marie-Hélène Certain. Dans ce territoire des Yvelines, « le nombre de patients en ALD explose alors qu’il y a de moins en moins de généralistes, témoigne-t-elle. On essaie d’en prendre davantage en recrutant un assistant médical mais les médecins ont déjà entre 1 500 et 2 000 patients ».
Anticiper les départs
Conscientes de ces difficultés, les caisses primaires ont la consigne de faciliter le travail des MSP. Des rendez-vous sont organisés pour remettre à chaque structure son « profil patientèle » actualisé avec la file active de patients sans médecin traitant ainsi que les listes nominatives des assurés vus au moins une fois par un médecin de la MSP mais non enregistrés dans la patientèle MT. L’Assurance-maladie renseigne aussi sur le nombre de patients « résidant dans la commune ou les communes limitrophes » sans médecin traitant désigné et ne figurant pas dans la file active. Pour alléger la charge administrative, la caisse primaire peut enregistrer elle-même la déclaration MT, après accord du généraliste et du patient. Des référents des organisations coordonnées (ROC) sont chargés d’étudier les éléments transmis par la MSP.
La Cnam veut, enfin, anticiper les cessations d'activité en organisant le maintien des patients au sein des MSP. Les référents ROC vont transmettre, à cet effet, la cartographie des patients qui se retrouveront potentiellement sans MT à court ou moyen terme, avec une ventilation par profil type (enfant/adulte/ALD/non ALD). La campagne fera l’objet d’un bilan à mi 2024.
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