Dans la maladie de Parkinson, le recours à la stimulation cérébrale profonde du noyau subthalamique (SCPNS) achoppe encore sur deux défis : la sélection des patients chez qui elle aura un bénéfice et la définition de la zone du noyau subthalamique à opérer. À l'occasion de la journée mondiale Parkinson ce 11 avril, le réseau national de recherche clinique sur la maladie de Parkinson et les mouvements anormaux, NS-Park, labellisé F-Crin, présente les avancées en cours sur ces deux enjeux d’une intervention qui reste invasive et complexe.
Depuis 2013, les équipes du réseau collaborent sous la houlette du Pr David Devos (CHU de Lille) et du Pr Jean-Christophe Corvol (CHU Pitié-Salpêtrière) au sein de l’étude Predi-Stim qui cherche à prédire la balance risque/bénéfice individuelle de la stimulation cérébrale profonde un an après l’intervention et au-delà.
Au total, 617 patients ont été inclus dans 17 centres experts français du réseau NS-Park/F-CRIN. Les premiers éléments des études ancillaires apportent un éclairage sur plusieurs critères cliniques avant et après l’opération de ces patients. « Ces premiers résultats, ainsi que ceux qui arrivent, seront intégrés dans un ensemble plus complet visant à guider l’indication de la stimulation pour assurer une grande qualité des résultats et éviter les loupés », explique le Pr David Devos.
Profil des patients curieux et à l’écoute
Concernant le profil des patients éligibles à cette chirurgie contre-indiquée chez les plus de 70 ans ou les personnes à risque de développer des troubles intellectuels et/ou de la marche, les observations permettent d’affiner les critères de sélection.
La présence de troubles du comportement en sommeil paradoxal (TCSP) est généralement associée à une forme plus sévère de maladie de Parkinson. Mais l’étude a permis de montrer que « la présence de ces troubles avant l’opération n’avait pas d’impact sur les résultats de la chirurgie que ce soit sur le plan moteur, non moteur, la qualité de vie ou sur l’évolution un an après la chirurgie. Il ne s’agirait donc pas d’une contre-indication », relève la Dr Ana Marques, neurologue au CHU Clermont-Ferrand. Et de souligner que ces résultats sont à « affiner avec des études complémentaires à trois ans et cinq ans d’évolution ».
Sur les traits de personnalité, dont certains pourraient affecter l’efficacité de la chirurgie et l’amélioration de la qualité de vie après SCPNS, l’étude a pu établir que « ce sont les patients curieux, motivés, et à l’écoute des autres, qui seraient les plus susceptibles de réagir positivement à la chirurgie et de voir leur vie améliorée. L’évaluation de la personnalité pourrait s’avérer utile pour mieux orienter les patients vers un type de traitement ou un autre », commente la Dr Christine Brefel, neurologue au centre expert du CHU de Toulouse.
S’agissant des troubles intellectuels et cognitifs, si les formes sévères sont une contre-indication à la chirurgie, l’impact sur les résultats de l’intervention des formes légères (problèmes d'attention, difficultés d'organisation, oublis) reste « méconnu », rappelle Kathy Dujardin, professeure de neurosciences cliniques au Centre d’excellence Parkinson de l’université de Lille. « Nos résultats révèlent que parmi les 48 % de candidats à la SCPNS souffrant d’un trouble cognitif léger, 20 % ont un profil cognitif particulier pouvant évoluer vers des troubles sévères plus rapidement. Le suivi de ces patients nous permettra de déterminer si nous devons écarter ces profils de la chirurgie », indique-t-elle.
Ajuster la position des électrodes
Un autre aspect étudié par Predi-Stim porte sur la sélection de la zone du noyau subthalamique à opérer. Alors que certains patients parkinsoniens développent une manie (excitation psychique, besoin irrésistible de parler, sentiment de toute-puissance…) après la chirurgie, l’étude montre que « 16,2 % des patients opérés ont développé une manie lorsque la stimulation touchait la partie du noyau sous-thalamique qui gère les émotions, mais ce trouble disparaît lorsque la stimulation est déplacée vers les parties " motrices " du noyau », rapporte le Pr Stéphane Thobois, neurologue au centre expert de l’hôpital Pierre-Wertheimer (Lyon).
Les travaux explorent également les facteurs prédictifs de l'évolution de la parole après la chirurgie, alors qu’une détérioration « légère mais significative » de l'élocution est observée chez certains patients sans troubles préexistants. Deux profils seraient particulièrement associés à cette détérioration : les patients « qui avaient des symptômes moteurs préopératoires sévères ou ceux dont l'électrode gauche a été stimulée avec une forte intensité », explique la Pr Caroline Moreau, neurologue au centre du CHU Lille.
Par ailleurs, l’étude a permis de relever trois profils distincts de patients éligibles à la SCPNP : « ceux ayant des troubles presque exclusivement moteurs (groupe le plus nombreux), ceux ayant des troubles moteurs et non moteurs modérés mais présentant des troubles du sommeil marqués et ceux présentant des troubles cognitifs et psychiatriques (plus petit groupe) », liste la Dr Lucie Hopes, neurologue au centre expert du CHU de Nancy.
Guider le geste avec l'imagerie
Enfin, l’étude s’est penchée sur les pistes d’amélioration de l’efficacité du geste chirurgical. « L’introduction d’électrodes directionnelles pour améliorer l’efficacité et la spécificité de la stimulation est complexe à régler et prend du temps, rappelle Anne-Sophie Rolland, chercheuse en neurosciences au CHU Lille. Notre étude qui analyse l’apport d’un logiciel d’imagerie permettant la visualisation 3D a permis de montrer que l’imagerie aidait les neurologues à optimiser les réglages plus rapidement, permettant ainsi une meilleure efficacité de la chirurgie ».
De nouveaux résultats sont attendus d’ici à un an et les résultats définitifs d’ici à 5 ans. D’autres résultats sur des traitements à visée de neuroprotection et sur des innovations de traitements symptomatiques sont également attendus en 2023, « une année charnière pour la maladie Parkinson », selon un communiqué du réseau NS-Park.
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