Exploration
Le diagnostic du neurinome de l’acoustique a bénéficié de l’amélioration des méthodes d’exploration cochléovestibulaire et surtout des techniques d’imageries permettant un diagnostic précoce au stade de petite tumeur. Leur pronostic s’est également considérablement modifié avec une baisse de la mortalité (à moins de 1 %) ainsi qu’une amélioration du pronostic fonctionnel (meilleure conservation de la fonction faciale et parfois possibilité de préservation de l’audition) grâce aux progrès de l’anesthésie, à l’amélioration des techniques d’exérèse microchirurgicale et au développement de techniques d’irradiation adaptées.
Généralités
Les SV représentent 6 à 8 % de l’ensemble des tumeurs intracrâniennes et 80 à 90 % des tumeurs développées dans l’APC. C’est une tumeur bénigne, de croissance habituellement lente (en moyenne 1 mm par an, mais il existe des formes à croissance plus rapide), développée aux dépens du nerf auditif (VIIIe paire crânienne) et plus précisément à partir de la gaine de Schwann du nerf vestibulaire.
Il existe une très légère prédominance féminine et l’âge moyen de découverte se situe aux alentours de 50 ans. Le diagnostic de SV chez un sujet jeune doit faire évoquer la possibilité d’une neurofibromatose de type 2 (NF2) et doit mener à une enquête génétique ainsi qu’à une prise en charge multidisciplinaire.
Le SV est habituellement unilatéral, solitaire et non héréditaire, sauf lorsqu’il s’intègre dans le cadre d’une NF2.
Les tumeurs sont classées en fonction de leur taille à l’IRM, allant des lésions purement intracanalaires (stade I) aux lésions volumineuses de plus de 3-4 cm dans l’APC (stade IV).
Diagnostic
La surdité unilatérale est le signe d’appel le plus fréquent (90 %). Elle est habituellement d’aggravation progressive, mais peut se présenter comme une surdité brusque (1 à 4 %). Toute surdité de perception unilatérale, ou bilatérale et asymétrique, doit faire pratiquer un bilan complémentaire à la recherche d’un SV.
Des acouphènes peuvent accompagner la surdité ou être révélateurs. Comme pour la surdité tout acouphène unilatéral persistant, même isolé, doit conduire à poursuivre les investigations.
La symptomatologie vestibulaire clinique est plus rare (en raison de la lenteur de croissance), mais des troubles de l’équilibre (particulièrement dans l’obscurité) voire des vertiges rotatoires peuvent être observés.
Les symptômes extra-otologiques sont rarement des circonstances de découverte, car ils témoignent de l’importance du développement du SV : paralysie faciale, atteinte du trijumeau ou des nerfs mixtes, syndrome cérébelleux, hypertension intracrânienne.
La découverte fortuite d’un SV, à l’occasion d’une IRM cérébrale pratiquée pour une tout autre raison, est une situation de plus en plus fréquente.
L’examen clinique otoneurologique est souvent peu contributif. Il sera néanmoins complet, avec examen otoscopique et acoumétrique, recherche d’un syndrome vestibulaire et d’une atteinte des paires crâniennes.
Les explorations fonctionnelles cochléovestibulaires (audiométrie, potentiels évoqués auditifs, vidéonystagmographie) permettront d’objectiver et de quantifier les retentissements auditif et vestibulaire du SV.
L’examen de choix pour le diagnostic d’un SV est représenté par l’IRM, qui permet la détection de lésions millimétriques. Le SV se présente habituellement comme une masse bien limitée du CAI et/ou de l’APC, en isosignal T1 et T2, se rehaussant fortement après injection de gadolinium (Figure 1).
Le diagnostic différentiel d’imagerie se pose parfois avec les autres tumeurs de l’APC. Ces lésions constituent 20 % des tumeurs de l’APC et sont représentées par les méningiomes de l’APC, les autres neurinomes (VII, V, nerfs mixtes), les kystes épidermiques, les hémangiomes et métastases.
Traitement : les moyens
La prise en charge d’un SV peut relever de 3 attitudes : abstention et surveillance, chirurgie d’exérèse, irradiation.
La surveillance est justifiée par la nature bénigne de la lésion, sa faible croissance et son caractère souvent peu symptomatique, en particulier pour les petites tumeurs. La surveillance est basée sur la clinique et surtout sur la réalisation d’IRM successives (« wait and scan policy »). Après la découverte du SV, il est classique de proposer une IRM à 6 mois, puis à 1 an puis régulièrement (tous les 1 à 2 ans).
La chirurgie d’exérèse est historiquement le traitement de choix. Elle est réalisée par des équipes multidisciplinaires habituées (ORL, neurochirurgiens, anesthésistes, réanimateurs). Schématiquement, on distingue les interventions sacrifiant l’audition (voie translabyrinthique) et les interventions tentant de préserver l’audition (voie rétrosigmoïde, voie rétrolabyrinthique, voie sus-pétreuse). Le principal intérêt de la chirurgie est de permettre une exérèse, le plus souvent totale et définitive. Une surveillance postopératoire sera néanmoins nécessaire pendant quelques années. Le patient sera clairement informé des risques de la chirurgie : paralysie faciale (moins de 10 % pour les petites tumeurs, 15-20 % pour les tumeurs volumineuses), surdité (surdité totale inéluctable en cas de voie translabyrinthique, préservation d’une audition utile au mieux dans 30-50 % de cas sélectionnés), troubles de l’équilibre, fuite de liquide cérébrospinal et méningite. Le taux de mortalité périopératoire est quasi nul, grâce aux progrès des techniques chirurgicales, de l’anesthésie et de la réanimation postopératoire.
La radiothérapie a pour but de stopper la croissance tumorale. Plusieurs modalités d’irradiation peuvent être envisagées (gammaknife, cyberknife, LINAC, radiothérapie fractionnée conformationnelle). Le principal intérêt de l’irradiation est le caractère moins invasif de cette modalité de prise en charge, puisque le traitement peut souvent être effectué en ambulatoire en une seule séance, avec des taux de complications moindres que ceux observés avec la chirurgie. Les deux principaux inconvénients sont la nécessité d’une surveillance prolongée en raison du risque de reprise évolutive, et du risque de dégénérescence maligne. En dehors de cas particuliers (tumeurs évolutives et symptomatiques chez des patients inopérables), l’irradiation est réservée à des tumeurs de moins de 2 cm.
Indications
La stratégie de prise en charge dépend de nombreux facteurs liés au patient (âge, antécédents, état général), à la tumeur (taille, évolutivité) et à son retentissement clinique (audition, équilibre,…). Lorsque la taille et le retentissement clinique de la tumeur permettent d’envisager plusieurs solutions, le choix du patient devra être pris en considération, après qu’il ait été clairement informé des principes, bénéfices attendus et risques de chaque option.
Pour les tumeurs de plus de 2 cm dans l’APC, la chirurgie est habituellement proposée en première intention, d’autant plus que le patient est jeune et en bon état général.
Pour les tumeurs de moins de 2 cm dans l’APC, les trois options peuvent être envisagées et la discussion prendra en compte les facteurs cités plus haut. Dans la plupart des cas, on commence par une surveillance, avec contrôle IRM à 6 mois voire un an. Si la lésion est stable cliniquement et radiologiquement, on pourra poursuivre une surveillance régulière. En cas d’évolutivité, on s’orientera vers un traitement actif (schématiquement, on proposera une intervention chirurgicale chez le sujet jeune surtout si l’audition est altérée, et une irradiation chez le sujet âgé).
Conclusion
Le SV a profité ces dernières années d’avancées technologiques majeures que ce soit en imagerie grâce à l’IRM ou dans le domaine thérapeutique grâce à l’amélioration des techniques d’exérèse microchirurgicales, les progrès de l’anesthésie-réanimation et l’introduction de techniques d’irradiation adaptées. Ne pas négliger des symptômes audio-vestibulaires unilatéraux, même discrets, permet d’effectuer un diagnostic précoce et de proposer plusieurs alternatives de prise en charge (surveillance, chirurgie ou radiothérapie).
Bibliographie
1. Ayache D. Surdités de perception. In Ayache D, Bonfils P. ORL. Med-Line Editions. Paris 2009. p 41-56.
2. Sterkers O, Bouccara D, Bozorg Grayeli A, Kalamarides M. Schwannome vestibulaire. In Brasnu D, Ayache D, Hans S, Hartl D, Papon JF. Traité d’ORL. Flammarion Médecine Sciences. Paris 2008. p. 123-133
3. El Bakkouri W, Kania RE, Guichard JP, Lot G, Herman P, Tran Ba Huy P. Conservative management of 386 cases of unilateral vestibular schwannoma: tumor growth and consequences for treatment. J Neurosurg. 2009; 110:662-9
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