De nombreux cas d’anosmie sans obstruction nasale et de sensation d’agueusie ont été observés ces dernières semaines chez des patients atteints par le Covid-19. Le Conseil national professionnel d'ORL, qui a constaté la recrudescence d'anosmie brutale parfois isolée, qui pourrait être en relation avec le coronavirus, en a alerté les pouvoirs publics.
La direction générale de la Santé (DGS) relaie l'information en précisant qu'une étude est lancée par les spécialistes « afin de préciser les éléments de cette constatation ». Mais d'ores et déjà, l'autorité sanitaire recommande de « toujours chercher ce symptôme devant un patient suspect de Covid-19 ».
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Absence d'obstruction nasale
Le diagnostic aurait pu passer inaperçu si les malades concernés avaient eu le nez bouché. « Déjà, quand une personne déclare qu’elle perd son odorat alors qu’elle n’a pas le nez bouché, cela interpelle, pose le Dr Alain Corré, ORL à la Fondation Rothschild (Paris). Alors, quand le nombre de patients concernés est important, on se doit de chercher ce qu’il se passe ».
Et comme le fait remarquer la Pr Dominique Salmon-Ceron, coresponsable du service infectiologie à l’Hôtel-Dieu (AP-HP) : « Quand un patient se présente avec une anosmie ou une sensation d’agueusie (dans les cas vus jusqu’ici, le malade conserve le goût du sucre et de l'amer, N.D.L.R.) comme symptôme en première place, on ne pense pas immédiatement au Covid ».
L’anosmie post-rhinite n’est pas rare. On en dénombre 1/400 « au décours d’une rhinite aiguë très bruyante », expliquent les deux médecins. Or, dans les cas présents, c’est l’absence de congestion nasale malgré une perte de l’odorat qui interpelle.
Isoler de facto les patients
Une trentaine de cas sont en cours de documentation à l’Hôtel-Dieu, où le Pr Salmon-Ceron centralise les observations. « Le but est notamment de confirmer que l’anosmie brutale peut être un signe de Covid-19, même en l'absence d'autres symptômes. Cet élément serait utile aux soignants dans la filière de dépistage et de protection. Dès lors, si un patient se présentait avec une anosmie nous saurions qu'il est infecté », explique la médecin spécialiste.
La DSG estime qu'en présence d'une anosmie sans obstruction nasale et avec une agueusie, « le diagnostic de Covid-19 est à considérer comme vraisemblable et ces patients doivent de facto être isolés ».
Contre-indication formelle aux corticoïdes, oraux et inhalés
Quid de la prescription médicale ? « Pour l’instant en matière de thérapeutique, personne ne sait ce que nous devons faire. Le seul point important est de contre-indiquer formellement la cortisone par voie orale et également par voie locale jusqu’à preuve du contraire », avance le Dr Alain Corré qui ajoute, troublé, que « la littérature internationale, notamment en Iran et en Chine, ne fait pas cas de l’anosmie comme symptôme d'alerte ».
La DGS ajoute que les lavages de nez sont « décommandés, ils pourraient favoriser la dissémination ». De plus, il est précisé que « ce tableau clinique semble plutôt caractéristique des formes bénignes. Toutefois, il semble aussi assez fréquent dans les formes graves si on recherche le symptôme ».
Le travail du Pr Salmon-Ceron doit notamment permettre de savoir, s’il y a lieu, quels sont le sexe et les tranches d'âge les plus concernés. Concernant la récupération de l’odorat et de la sensation de goût, les deux médecins avancent avec prudence que « des récupérations spontanées ont déjà été observées ».
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