Mécanismes de l’inflammation nasale chronique dans la PNS
La physiopathologie de la PNS reste largement méconnue. L’examen histologique des polypes montre une inflammation chronique avec deux caractéristiques particulières :
(1) L’infiltrat cellulaire riche en polynucléaires éosinophiles
(2) La présence de zones de remodelage de l’épithélium. De nombreux travaux montrent l’importance des polynucléaires éosinophiles dans le développement et l’entretien de la réaction inflammatoire locale. Cependant l’élément clef de cette inflammation est la production par l’épithélium nasal de médiateurs de l’inflammation (cytokines) qui activent le recrutement des cellules inflammatoires et sont à l’origine des remodelages matriciels, vasculaires et épithéliaux. L’ensemble de ces mécanismes aboutit à un auto entretien local de l’inflammation.
Facteurs étiopathogéniques
L’allergie IgE dépendante n’est plus considérée comme un facteur étiopathogénique des PNS primitives. L’association fréquente d’une intolérance à l’aspirine avec la PNS a suggéré qu’un dysfonctionnement enzymatique dans la chaîne de dégradation des phospholipides membranaires (où l’aspirine inhibe la cyclooxygénase) pourrait conduire à une hyperproduction de leucotriènes, activateurs des éosinophiles. Les recherches se sont orientées vers la responsabilité potentielle de la production locale d’entérotoxines par staphylococcus aureus (présent chez 70 % des patients atteints de PNS). D’autre part, la PNS étant classée dans les pathologies liées à l’activation de la voie Th2 (T helper 2 : immunité humorale et allergique) les chercheurs étudient actuellement le rôle de l’interleukine 5 qui favoriserait la survie des éosinophiles. Enfin, le rôle de facteurs d’environnement et génétiques est actuellement exploré.
Présentation clinique
Le patient atteint de PNS vient en général consulter pour un cortège de symptômes peu spécifiques associant : obstruction nasale, rhinorrhée antérieure et postérieure, prurit et éternuements, algies faciales et éventuellement toux. Par contre, les troubles de l’odorat (hyposmie ou anosmie), très fréquents dans la PNS, doivent faire évoquer le diagnostic. Les pathologies associées doivent être recherchées, qu’elles soient ORL (otite séromuqueuse), bronchiques ou générales (allergie, intolérances médicamenteuses et alimentaires, syndrome d’apnées du sommeil, reflux gastro-œsophagien), du fait de leur impact sur le diagnostic, le pronostic et/ou le traitement.
L’association à un asthme, particulièrement dans le cadre d’une maladie de Widal (triade asthme intolérance à l’aspirine et aux AINS- polypose nasale) confère un pronostic plus sévère à la PNS avec de moins bons résultats du traitement médical et chirurgical. L’interrogatoire doit rechercher un tabagisme éventuel, une exposition professionnelle à des toxiques ou polluants, et doit évaluer le retentissement de la PNS sur la qualité de vie du patient. Enfin, il convient d’apprécier les traitements déjà effectués et leurs effets.
L’examen clinique doit être complet mais est dominé par la rhinoscopie et l’endoscopie nasale qui retrouvent des polypes bilatéraux issus variablement des méats moyen et supérieur et de la gouttière olfactive. Il existe une classification quantitative du développement des polypes :
- Stade HI : polypes n’atteignant pas le bord inférieur du cornet moyen
- Stade II : polypes atteignant mais ne dépassant pas le bord inférieur du cornet moyen
- Stade III : polypes dépassant le bord inférieur du cornet moyen
- Et pour certains stades IV : polypes atteignant le plancher de la fosse nasale. L’observation de polypes unilatéraux doit faire douter du diagnostic de PNS et pratiquer un bilan d’imagerie à la recherche d’un processus tumoral.
Examens complémentaires
La radiographie de sinus n’a aucune indication dans la PNS. Le scanner des sinus sans injection en coupes axiales et coronales est l’examen de choix. Son indication n’est pas systématique car le diagnostic est guidé par la clinique. Il est par contre obligatoire en cas de doute diagnostique et dans le bilan préopératoire. Il permet de préciser l’extension des lésions (à distance d’une cure courte de corticoïdes per os ou d’une surinfection) et l’anatomie nasosinusienne.
Un bilan allergologique respiratoire est demandé en cas de suspicion clinique, bien que la PNS n’ait pas une étiologie allergique.
Un bilan pneumologique doit être réalisé en cas de suspicion d’hyperréactivité bronchique ou d’asthme.
Principes du traitement
La PNS étant une maladie de la muqueuse, son traitement est avant tout médical reposant sur la corticothérapie locale. La chirurgie est réservée aux formes sévères de PNS où le traitement médical au long cours bien conduit a échoué.
Corticothérapie locale
La corticothérapie locale continue est le traitement de référence de la PNS et est indiquée dans tous les cas. Elle doit être expliquée au patient afin de lui apprendre les règles de pulvérisation (orientation de l’embout dans l’axe de la fosse nasale, amorce préalable du dispositif, proscription de l’inspiration simultanée à la pulvérisation, intérêt pour certains du lavage au sérum salé précédant la corticothérapie). La dose et le rythme des pulvérisations dépendent du produit administré. Les effets secondaires locaux potentiels doivent également être connus du patient (mouchages sanglants, irritation nasale, sécheresse nasale, candidose pharyngée). Leur prévention repose sur une délivrance correcte des produits. Les effets secondaires liés à la diffusion systémique sont exceptionnels (déminéralisation osseuse, insuffisance surrénale, cataracte, glaucome) mais il faut cependant savoir trouver la dose minimale efficace et tenir compte du cumul avec les doses éventuellement inhalées au niveau bronchique. Certaines contre-indications sont temporaires (herpès oculaire ou orobucconasal), d’autres permanentes mais relatives (troubles de l’hémostase, tuberculose). Lorsque la PNS est très développée et/ou les symptômes très importants, la corticothérapie peut être initiée par voie générale en cure courte (1 mg/kg de prednisolone ou équivalent sur 10 jours maximum) qui peut être répétée au maximum trois fois par an. Les antibiotiques ne sont utiles qu’en cas de surinfection évidente. Les antihistaminiques n’ont pas d’indication dans la PNS mais peuvent être intéressants en cas d’allergie associée ou si les symptômes d’hyperréactivité nasale sont mal contrôlés par la corticothérapie locale.
Traitement chirurgical
Le traitement chirurgical est indiqué dans les PNS invalidantes et résistantes à un traitement médical bien conduit, bien observé et suffisamment prolongé (au moins quatre mois). La chirurgie, désormais exclusivement endonasale, peut consister en une polypectomie (exérèse uniquement des polypes des fosses nasales et des méats), ou une ethmoïdectomie radicale (l’ethmoïdectomie est complète avec exérèse de toute la muqueuse et squelettisation des parois orbitaires et des toits ethmoïdaux). Les indications respectives de ces interventions reposent sur l’importance de l’atteinte sinusienne, la sévérité des symptômes, les associations pathologiques à valeur pronostique, l’expérience et habitude des équipes chirurgicales, l’état général du patient et enfin et surtout sur le choix du patient après information complète sur les principes, résultats, contraintes et risques de chacune. Le patient doit être clairement informé que la chirurgie n’est pas, sauf dans de rares cas, un traitement curatif et qu’elle nécessite une corticothérapie locale postopératoire prolongée.
Les complications potentielles de la chirurgie sont principalement de cinq ordres : hémorragiques, orbitaires, méningoencéphaliques, infections nosocomiales et troubles de cicatrisation. L’hémorragie peropératoire cataclysmique par rupture carotidienne est absolument exceptionnelle, comme le sont les atteintes orbitaires sévères et les complications méningoencéphaliques. L’épistaxis postopératoire est plus fréquente (1 % environ). La prévention de ces complications passe par une parfaite connaissance de la gestuelle et de l’anatomie chirurgicale, et par une analyse exhaustive du scanner préopératoire.
Résultats du traitement
Le traitement médical est efficace au début de la maladie dans la majorité des cas, quel que soit le stade de la PNS. L’évolution de la PNS est souvent marquée par l’apparition d’une « résistance » à la corticothérapie qui conduira à l’indication chirurgicale. La chirurgie donne d’excellents résultats symptomatiques à long terme sur l’obstruction et les algies, et dans une moindre mesure sur les troubles de l’odorat et la rhinorrhée. La récidive des polypes reste la règle malgré la corticothérapie locale postopératoire, mais cette récidive reste contrôlée et confinée à la région ethmoïdale antérieure dans la majorité des cas.
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