Le goût est un sens qui se manifeste dès la vie fœtale. Les saveurs de la vie intra-utérine guident le nouveau-né dès ses premières heures, certaines laisseront leur empreinte jusqu’à la fin de l’enfance. Les préférences alimentaires continuent de se structurer ensuite autour des découvertes de l’enfant et de ses attirances innées. La diversification influence fortement le répertoire alimentaire ultérieur. La socialisation est aussi une étape importance du passage à l’alimentation adulte, et l’accompagnement vers l’autonomie alimentaire doit se faire autour des notions de plaisir et d’auto-régulation.
À travers leurs choix, leurs pratiques et leur culture, les parents exercent une certaine influence sur le comportement alimentaire de leur enfant. Explications du Dr Florence Solsona, nutritionniste et auteure de « Mon enfant mange mal » (éditions Larousse).
« Dans les familles où l’on aime manger, où l’on valorise la préparation des repas et où la transmission culinaire tient une place importante, les enfants sont particulièrement éveillés au goût », affirme le Dr Florence Solsona (Montpellier). Les facteurs socio-économiques tiennent également une place importante dans l’éducation au goût et à la nutrition : les ménages à bas revenus ne peuvent souvent pas proposer à l’enfant une variété importante d’aliments et organisent moins d’activités liées à l’alimentation. « Par exemple, les familles qui vont au marché avec les enfants, discutent avec les producteurs, profitent de vacances à la campagne pour faire une sortie à la ferme, sont souvent celles qui ont davantage de moyens. Par ailleurs, l’ambiance des repas est extrêmement importante. Des aliments consommés dans un contexte familial détendu -lorsque tout le monde prend plaisir à se mettre à table- facilite leur acceptation chez l’enfant. À l’inverse, lorsque les repas sont plombés par des soucis financiers ou familiaux, l’éducation alimentaire ne peut pas se faire convenablement. De même, des études ont montré que le rapport à la nourriture de la mère de famille a un impact sur le comportement alimentaire de l’enfant. Une mère anxieuse par rapport au développement de son enfant, ayant des troubles alimentaires (boulimie, anorexie) risque de donner de mauvaises habitudes alimentaires », résume le Dr Solsona.
Outre ces paramètres environnementaux, des facteurs propres à l’enfant peuvent expliquer son comportement alimentaire. Ainsi, au sein d’une même fratrie, certains enfants goûtent plus facilement que d’autres des aliments nouveaux et sont ouverts à différentes saveurs. « Au même titre que la vision, nous n’avons pas tous le même sens du goût. Lors des ateliers du goût, je propose aux personnes du groupe de goûter une eau légèrement enrichie en caféine. Certains ressentent fortement l’amertume de la caféine et ne peuvent boire l’eau alors que d’autres ne la ressentent pas du tout », indique le Dr Solsona.
Vers une alimentation adulte.
Quoi qu’il en soit, certaines étapes alimentaires ne doivent pas être négligées par les parents et les professionnels de santé. C’est notamment le cas de la transition entre l’alimentation nourrisson et adulte. La première est souvent alignée sur les recommandations pédiatriques des premiers mois, alors que, à partir de 2 ans, l’alimentation se rapproche de celle de ses parents. « Ils sont souvent inquiets au sujet de l’alimentation de leur enfant avant et lors de la diversification (poids de l’enfant, fréquence des biberons, choix des premiers fruits et légumes…) alors même qu’ils sont très soutenus par leur pédiatre et/ou médecin généraliste. Mais c’est lorsque l’enfant grandit (à partir de deux ans) que le rôle des parents devient plus important », assure le Dr Solsona. Ils doivent, en effet, accompagner l’enfant à varier son alimentation, à ne plus manger seulement des produits liquides ou semi-liquides, gras et sucrés tels que le lait maternel. « Il ne faut pas permettre à l’enfant de 18 mois à 2 ans de rester uniquement dans une nourriture confortable, prémâchée (viande hachée, compotes, glaces…) mais au contraire leur apprendre à apprécier la texture de l’alimentation adulte : viande, fruits et légumes en morceaux… », précise-t-elle. Les parents doivent aussi aider l’enfant à quitter l’immédiateté et la solitude qui caractérisent le mode d’alimentation du tout-petit. Car l’éducation alimentaire c’est aussi apprendre à l’enfant la sociabilisation autour du repas, les codes sociaux. Médecins de famille et pédiatres ont également un rôle important à jouer lors de cette transition. « Ils doivent rassurer les parents dans une période où l’enfant commence à moins manger, et parfois, à devenir néophobe (vers deux ans), notamment lorsqu’il se développe bien d’un point de vue staturo-pondéral », souligne le Dr Solsona.
Développer l’autorégulation.
Une grande variété d’aliments proposée à l’enfant est un facteur important d’élargissement de son répertoire alimentaire ultérieur. Pour atteindre cet objectif, les parents doivent les consommer devant les enfants (repas pris en famille) et leur montrer qu’ils apprécient ces aliments. Mais aussi, présenter l’assiette de façon agréable, l’aspect visuel de l’alimentation ayant son importance dans son acceptation. « Il faut aussi impliquer l’enfant dans la préparation des repas : l’emmener faire les courses, lui expliquer la provenance des produits, cuisiner avec lui, le faire décrire et dessiner des fruits et légumes… L’objectif : faire en sorte que l’enfant se familiarise avec les nouveaux aliments proposés. En revanche, les jeunes enfants sont très peu perméables aux informations sur les bienfaits nutritionnels des aliments. Les parents peuvent en discuter avec l’enfant vers l’âge de 7/8 ans lorsque celui-ci commence à s’intéresser au fonctionnement de son corps », note le Dr Solsona.
Autre piège à éviter : les parents ne doivent pas contrôler à tout prix la taille des portions consommées par leur enfant. Mais apprendre à l’enfant à reconnaître et respecter les signaux internes de satiété afin qu’il puisse développer une capacité d’autorégulation alimentaire, par exemple, en lui apprenant à manger lentement sans rien faire d’autre en même temps, en mâchant bien et en lui cuisinant davantage de produits simples moins caloriques que les produits transformés. « Lorsque l’enfant présente un problème de surpoids, il faut – entre autres – prévoir des assiettes plus petites. Car plus elle est grande, plus il a tendance à augmenter ses portions », affirme le Dr Solsona.
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