Les pédiatres défendent le Meopa dans les soins douloureux

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Publié le 30/06/2025
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Un collectif de médecins, pédiatres en tête, s’inquiète de la confusion entre l’usage détourné du protoxyde d’azote comme gaz hilarant à visée récréative et l’utilisation médicale du mélange oxygène/protoxyde d’azote (Meopa) à visée antalgique pour des soins douloureux.

Crédit photo : BURGER/PHANIE

« Gaz hilarant : un autre son de cloche sur le protoxyde d’azote », c’est ainsi que commence le communiqué d’un collectif d’une douzaine de sociétés savantes et associations* emmené par les pédiatres qui s’inquiètent des dégâts collatéraux des alertes sur le mésusage du protoxyde d’azote.

La confusion avec l'usage du mélange oxygène/protoxyde d'azote (Meopa) en milieu médical « risque de limiter l’utilisation d’un médicament antalgique très largement utilisé en France », s’inquiètent-ils.

Certes, les cas d’intoxications à ce gaz sont à la hausse depuis plusieurs années, alertent les autorités sanitaires. Mais les professionnels de santé craignent que « l’avalanche médiatique actuelle qui présente le protoxyde d’azote “gaz hilarant” comme un produit extrêmement dangereux et nocif » ne disqualifie le Meopa, « pourtant essentiel au quotidien ». Ce d’autant qu’une proposition de loi est en cours d’élaboration pour interdire l’achat du protoxyde d’azote par les particuliers. Si « des mesures correctrices » du mésusage sont nécessaires, les signataires déplorent « des messages maladroits ».

Des bénéfices reconnus pour les soins douloureux

Le collectif rappelle les bénéfices majeurs du Meopa dans la prise en charge de la douleur provoquée par les soins. « Le protoxyde d’azote est classé parmi les médicaments essentiels par l’Organisation mondiale de la santé », met en avant le communiqué. Le Meopa a « révolutionné » la prise en charge des soins douloureux. « Le 15 décembre 1992 à l’Unesco lors de la seconde journée Pediadol consacrée à la douleur de l’enfant, furent projetées des vidéos montrant les effets bénéfiques du Meopa sur les enfants atteints de leucémie de l’hôpital Trousseau (Paris), lit-on. Pour la première fois, des ponctions lombaires, des prélèvements de moelle ont pu être effectués sur des enfants apaisés, en présence des parents, et surtout sans contention physique. Très rapidement, en moins de 5 ans, la majorité des services de pédiatrie adoptèrent cette méthode, en particulier les urgences pédiatriques ». Les adultes et les personnes âgées peuvent également en bénéficier.

Concernant l’impact environnemental, un « usage raisonné » passe aussi par la limitation au maximum des fuites de ce gaz à effet de serre et en évitant l'usage des prises murales délivrant ce produit.

Sécurité d’emploi dans le cadre médical

Pour le collectif, cette « sédation consciente » est particulièrement utile dans la réalisation de soins modérément douloureux et/ou anxiogènes. Les propriétés du Meopa (brièveté d’action, élimination rapide, absence d’accumulation dans l’organisme) « participent ainsi à sa grande sécurité ».

Si des inhalations de protoxyde d’azote pur, pluriquotidiennes sur plusieurs semaines, « peuvent entraîner un déficit en vitamine B12 provoquant des toxicités essentiellement neurologiques (paralysie…) très souvent réversibles après supplémentation, et des thromboses », l’inhalation de Meopa dans un cadre médical « n’est quasiment jamais concernée », rassurent-ils citant une récente mise au point sur le sujet publiée dans le Lancet Public Health.

Plutôt que d’aller vers « une prohibition du protoxyde d’azote » qui risque de créer de nouveaux problèmes (détournement, vol de bouteilles vers le marché illicite, approvisionnement dans des pays où le produit n'est pas contrôlé ou substitution par des substances plus nocives), les signataires estiment « essentiel de sensibiliser les professionnels, les usagers, les parents, les éducateurs à repérer les mésusages et leurs conséquences ainsi que la souffrance souvent associée ».

Signataires au 19/06/2025 : Société française de pédiatrie, groupe Pediadol, Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD), Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), association Sparadrap, association des anesthésistes pédiatriques francophones (Adarpef), Centre national de ressources douleur (CNRD), SOS Addictions, Conseil national professionnel de pédiatrie (CNPP), Société française de soins palliatifs pédiatriques (2SPP), Société de thérapeutique odonto-stomatologique (Stos), Société française de chirurgie orale (SFCO)



Source : lequotidiendumedecin.fr