C’EST UNE cause pour le moins surprenante d’obésité infantile que rapportent des médecins nord-coréens. Les enfants atteints d’otite séreuse chronique, en raison d’une altération du goût due à l’affection, augmentent leurs rations alimentaires, notamment sucrée et salée. Leur travail prospectif, non randomisé, mené chez 42 enfants leur permet ainsi de confirmer, plus que de découvrir, le rôle de cette forme d’otite dans la prise pondérale. Ils en fournissent une explication physiopathologique, impliquant une atteinte de la corde du tympan.
Quatre saveurs standards.
Il Ho Shin et coll. ont recruté 24 garçons et 18 fillettes, âgés de 3 à 7 ans. Tous, atteints d’une otite séreuse chronique, allaient subir la pose d’un drain transtympanique. Ces 42 enfants ont été comparés à autant de témoins. L’étude a été menée de septembre 2007 à août 2009. Son objectif était d’évaluer les seuils gustatifs, soit par électrogustométrie, soit en faisant goûter des dilutions des quatre saveurs standards : sucré, salé, acide et amer.
Premier constat, en totale harmonie avec les travaux antérieurs des chercheurs, l’indice de masse corporelle (IMC) est significativement plus élevé chez les enfants atteints d’otite que chez les témoins. En ce qui concerne l’électrogustométrie, elle a été réalisée en 4 secteurs de la langue (base, pointe, les deux côtés) avec des niveaux de stimulations progressifs. Les enfants devaient déclarer à quelle intensité électrique ils ressentaient un goût soit métallique soit aigre. En pratique, il apparaît des différences selon les aires linguales testées. Le seuil de stimulation est beaucoup plus élevé chez les enfants atteints d’otite que chez les témoins.
Quant aux tests de saveurs, ils ont été réalisés sur la cavité buccale en totalité. De fait les enfants testaient des liquides à diverses concentrations. La dilution minimale à laquelle la saveur était ressentie était considérée comme seuil de détection. Ici encore quelques différences ont été relevées. La sensibilité aux liquides sucrés et salés est significativement abaissée chez les jeunes patients. Si un phénomène similaire est relevé pour les goûts acide et amer, la différence avec les témoins n’est pas significative.
Des aliments plus sucrés et plus salés.
Le corollaire de ces altérations gustatives est que les enfants porteurs d’une otite séreuse chronique doivent ingérer des aliments plus sucrés et plus salés pour parvenir à une sensation équivalente à celle des autres enfants. Ce besoin se traduit par une consommation plus importante de calories et de liquides favorisant la surcharge pondérale. Cette situation rejoint une fonction vitale. Les auteurs expliquent qu’en situation de disette, il existe une modification de la chaîne du goût contribuant à une augmentation des seuils de sensibilité à certaines saveurs vitales, le sucré et le salé. Il n’existe, à l’inverse, que peu de changement, dans la sensibilité à des goûts de toxiques potentiels : l’acide et l’amer.
Comment l’otite séreuse dégrade-t-elle la gustation ? Par une inflammation d’une branche du nerf facial, la corde du tympan. Il faut se souvenir que ce rameau nerveux passe dans la cavité de l’oreille moyenne. Contrairement à d’autres branches du facial, il n’y est pas protégé par un environnement osseux. La corde du tympan se trouve donc directement au contact d’un milieu inflammatoire celui de l’otite séreuse. Des études histologiques chez des patients atteints d’otite chronique ont montré une dégénérescence de ce rameau nerveux, notamment par une fibrose s’étendant avec l’otite.
Pour troublante qu’elle soit cette étude n’en comporte pas moins deux faiblesses. La première est l’absence de prise en compte de l’environnement, du style de vie et des habitudes alimentaires des enfants. La seconde est due aux facultés d’attention limitées des enfants. De ce fait, le nombre de participants ayant pu subir la totalité des tests gustatifs apparaît faible. Ce point demeure donc à contrôler par de nouvelles études.
Arch Otolaryngol Head Neck Surg, vol 137, n°3, mars 2011, pp.242-246.
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