Pr Dominique Fabre : « Trois jours après, le plus jeune greffé pulmonaire de France marchait déjà dans le couloir de l’hôpital »

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Publié le 13/09/2021

C’est à l’hôpital Marie Lannelongue (Le Plessis-Robinson) qu’a été réussie la première double greffe pulmonaire chez un enfant de 3 ans. Un programme est mené en collaboration avec l’hôpital Trousseau pour le développement de cette technique chez les moins de 5 ans.

Crédit photo : DR

À la mi-juin, une double greffe pulmonaire a été réalisée chez un enfant de 3 ans. La transplantation a été effectuée au sein du service de chirurgie vasculaire et thoracique de l’hôpital Marie Lannelongue (Le Plessis-Robinson) par l’équipe du Pr Dominique Fabre assisté de la Dr Régine Roussin, en étroite collaboration avec les pneumologues de l’hôpital Trousseau (Paris), en particulier la Dr Nadia Nathan, en charge de l’enfant.

Une intervention exceptionnelle chez un enfant de 3 ans

L’intervention menée mi-juin est une première. « C’est le plus jeune greffé pulmonaire Français ayant survécu à la greffe, explique le Pr Dominique Fabre (hôpital Marie Lannelongue, Le Plessis-Robinson). L’enfant était en attente de greffe en super-urgence. Sans cette transplantation, il serait décédé en réanimation. » Il souffrait en effet d’une pathologie pulmonaire dégénérative bulleuse occasionnant des pneumothorax itératifs. Sous double drain en réanimation à l’hôpital Trousseau, il avait déjà fait deux arrêts cardiorespiratoires.

« Dans l’attente d’un greffon, nous avons préparé en amont, avec les pneumologues, la famille de l’enfant à la greffe, au risque d’échec associé et in fine réussi à lever leurs réticences », raconte le Pr Fabre. Côté donneur, c’est l’agence de biomédecine qui a travaillé à recueillir l’accord des parents du petit donneur décédé. Derrière une greffe, même réussie, il y a toujours un drame, en l’occurrence le décès brutal d’un enfant de 2 ans. Au total, il s’agit d’un vaste travail collaboratif allant du recueil de l’organe à sa transplantation. « Chez ces jeunes enfants, nous travaillons en très étroite collaboration avec les pneumologues pour poser l’indication. Quant au geste opératoire, rendu délicat par la petite taille des bronches, il a duré au total 9 heures, précise le Pr Fabre. Mais, trois jours après, le petit greffé marchait déjà dans le couloir de l’hôpital. » Les enfants bénéficient en effet de capacités de récupérations exceptionnelles permettant une récupération rapide. Aujourd’hui, à deux mois de recul, les résultats sont satisfaisants.

Greffes pulmonaires infantiles : précédemment pas avant 5 à 10 ans

Les greffes pulmonaires infantiles concernent essentiellement les sujets atteints de mucoviscidose. On ne les greffe en général pas avant l’âge de 10 ans. Mais, avec l’arrivée des nouveaux traitements, les greffes pour mucoviscidose deviennent plus exceptionnelles. Leur nombre a reculé.

En dehors de cette indication, les greffes pulmonaires chez les moins de 18 ans sont très rares. On ne dépasse pas la vingtaine par an. Et, jusqu’à présent, on ne greffait de toute façon pas avant l’âge de 5 à10 ans. Chez les tout-petits, la greffe pulmonaire n’était pas considérée comme une bonne indication. On manquait d’expérience et notamment de recul sur l’évolution des greffons avec les années. Sans compter qu’il faut un greffon de taille adaptée.

Lancement d’un programme dédié aux moins de 5 ans

Les greffes avant l’âge de 5 ans ne sont réalisées que depuis peu. Il y a une série de quelques cas publiés (trois à quatre cas) avec un recul limité, puisqu’on est à moins de 5 ans. Les résultats sont très préliminaires.

Mais, pour rappel, sans cette intervention, les enfants n’ont d’autre issue que le décès. « Nous avons lancé, en collaboration avec l’hôpital Trousseau, en particulier avec la Dr Séverine Feuillet, un programme national dédié aux greffes cardiopulmonaires des enfants moins de 5 ans. Cette double greffe, réussie, en est le fruit. C’est très encourageant », se réjouit le Pr Fabre.

Entretien avec le Pr Dominique Fabre (hôpital Marie Lannelongue, Le Plessis-Robinson)

Pascale Solère

Source : lequotidiendumedecin.fr