Après les cas signalés en France, cinq autres pays européens ont déclaré des infections associées à l'entérovirus E-11 (Echovirus-11) chez des nouveau-nés : la Croatie, l'Italie, l'Espagne, la Suède et le Royaume-Uni. Dans son dernier bulletin d'information sur les flambées épidémiques (Disease Outbreak News) daté du 7 juillet, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime le risque « faible » en population générale « sur la base des informations limitées disponibles » et invite à la vigilance.
En France, neuf cas de septicémie néonatale sévère, avec insuffisance hépatique et défaillance multiviscérale, ont été signalés entre juillet 2022 et avril 2023. Détaillés dans un précédent bulletin de l’OMS, ces cas graves (sept décès) ont surtout concerné des nouveau-nés prématurés (huit sur neuf) et des naissances gémellaires (quatre paires de jumeaux). Tous présentaient un ou plusieurs signes cliniques moins de sept jours après la naissance, suggérant une voie de transmission mère-enfant. L'alerte a été donnée en février par le Centre national de référence des entérovirus (CNR) auprès du réseau de surveillance des entérovirus et de Santé publique France.
Un total de 26 cas en Europe
Les données épidémiologiques collectées en France de 2016 à 2022 montrent une hausse de l'incidence et de la mortalité pour toutes les infections néonatales sévères associées à l'E-11. En 2022, sept décès ont été enregistrés sur les 443 infections néonatales à entérovirus signalées (taux de létalité = 1,6 %), contre sept décès sur 1 774 infections néonatales de 2016 à 2021 (taux de létalité = 0,4 %), dont aucune n’était associée à E-11.
Sur les 443 infections néonatales de 2022, 72 % avaient un type d’entérovirus connu, E-11 dans 30,3 %. Parmi les cas sévères d’infection néonatale (4,5 % du total), 20 avaient des types d'entérovirus connus. Et l’E-11 représentait 55 % (11 sur 20) des cas en 2022, contre 6,2 % (3 sur 48) entre 2016 et 2021.
Dans son bulletin du 31 mai, l’OMS indiquait qu’« aucune augmentation comparable des cas d'E-11 associés à la septicémie néonatale n'a été observée » en Europe en 2022 et 2023. Mais la mise à jour du 7 juillet rapporte 17 cas en Europe (au 23 juin). En Croatie, un cas d'infection à E-11 a été détecté en juin 2023 parmi des clusters de maladies à entérovirus chez des nouveau-nés dans deux maternités distinctes. Des enquêtes sont en cours, indique l’OMS.
En Italie, sept cas d'infection néonatale à E-11 ont été confirmés entre avril et juin 2023. Trois ont été admis en unité néonatale de soins intensifs, dont un est toujours hospitalisé. Deux de ces cas sont détaillés dans une étude publiée dans « Eurosurveillance ». Deux autres cas, positifs au dépistage, ne présentaient aucun symptôme significatif. Pour les deux autres cas, les données sont en attente.
En Espagne, les deux cas signalés, après une « probable transmission verticale », étaient des jumeaux prématurés nés en janvier 2023. Les deux ont été admis en soins intensifs, un est décédé. Selon les données disponibles au Centre national espagnol de microbiologie, l'E-11 a circulé en Espagne en 2022 et 2023, mais les données disponibles n'indiquent pas d'augmentation de l'incidence ou de la gravité chez les nouveau-nés, rapporte l’OMS.
En Suède, quatre cas de nourrissons atteints de méningo-encéphalite due à l'E-11 ont été recensés entre début 2022 et le 15 juin 2023, dans le cadre de la déclaration obligatoire de méningo-encéphalite virale. Un autre cas infantile d'E-11 a été détecté en 2022 grâce à une surveillance renforcée des entérovirus. « Aucun des cas rapportés n'est gémellaire », souligne l’OMS.
Au Royaume-Uni, deux cas d'infection à l'E-11 ont en revanche été signalés chez une paire de jumeaux en mars 2023. « Les deux cas présentaient plusieurs états cliniques, notamment une hépatite et une défaillance multiviscérale avec une détérioration rapide du quatrième jour de naissance au dixième jour, celui de leur décès », précise l’OMS.
Vigilance et partage d’informations
Pour l’heure, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas et la Norvège rapportent n’avoir observé aucune augmentation de l'E-11 associée aux cas de septicémie néonatale en 2022 et 2023. Mais, en raison du portage asymptomatique et de l’absence de surveillance systématique des entérovirus à l'échelle européenne, seuls les cas graves émergent, rappelle l’OMS. L’organisation juge « difficile d'estimer l'étendue des infections néonatales graves actuelles à E-11 ou le niveau de circulation des virus E-11 dans la population ».
L’OMS renouvelle ainsi ses recommandations d’hygiène dans les services, de sécurité lors des transferts d’échantillons et de sensibilisation des soignants aux signes et symptômes de l'infection à échovirus, ainsi qu’à la collecte des échantillons. En présence d’un choc circulatoire chez un nouveau-né ou un jeune nourrisson, il est nécessaire d’« envisager un diagnostic sous-jacent de septicémie et d'effectuer des investigations diagnostiques appropriées, y compris des tests de dépistage des entérovirus », insiste l’OMS. Les cas suspects et confirmés doivent amener à considérer l’isolement, est-il ajouté.
Aussi, le partage des données est fortement encouragé. Un échange d'informations est en cours, via le Réseau européen des entérovirus non poliomyélitiques (Enpen) entre la France, les autres États membres, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) et l'OMS. Ces deux derniers ont également organisé un appel collaboratif pour « discuter de l'événement et encourager les États membres, qu’ils soient touchés et non, à collaborer ».
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