Survivants de cancer pédiatrique : un risque de dépression accru de plus de 50 % à la trentaine, un suivi renforcé nécessaire

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Publié le 22/06/2023
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Crédit photo : S.Toubon

Les survivants d’un cancer pédiatrique ont un risque accru sur le long terme de symptômes graves ou de troubles de la dépression et de l’anxiété, de troubles psychotiques et de mortalité par suicide, rapporte une méta-analyse publiée dans « Jama Pediatrics ».

À partir des données de 52 études portant sur 27 613 survivants, les auteurs mettent en évidence que ceux qui reçoivent un diagnostic de cancer alors qu'ils sont enfants, adolescents ou jeunes adultes (0 à 25 ans) ne sont pas seulement à risque de problèmes de santé mentale lors de l’annonce et pendant le traitement, mais aussi sur le long terme.

Un pic de symptômes dépressifs chez les trentenaires

Dans le détail, par rapport aux témoins sans cancer appariés et à leurs frères et sœurs, ces patients avaient un risque accru de 57 % pour la dépression, avec un pic après 30 ans. Pour ce qui est de l'anxiété, le risque était accu de 29 % et plus marqué après 25 ans. « L’âge lors du diagnostic ne s’est pas révélé prédictif d’une sévérité accrue de l’anxiété développée plus tard, tout comme le type de traitement », est-il précisé. Cette population ne présente pas de risque supplémentaire de mortalité par suicide, mais un risque accru est observé dans deux sous-groupes : ceux atteints de tumeurs du système nerveux central (RR = 1,49) et ceux diagnostiqués entre 15 et 19 ans (RR = 1,6).

Seules cinq études se sont penchées sur le risque de troubles psychotiques (dont la schizophrénie). Le risque se révèle accru de 56 %. Des travaux ont déjà montré que les traumatismes, comme des antécédents de cancer, augmentent la vulnérabilité, expliquent les auteurs. Alors que la schizophrénie et les troubles psychotiques sont corrélés avec les antécédents familiaux, une étude comparant les survivants de cancer pédiatrique à leurs frères et sœurs, montre un risque 1,4 fois plus élevé de développer ce type de troubles, soulignent-ils.

Dans l’ensemble des études, des associations sont observées entre une meilleure santé mentale des survivants et l’environnement social, le soutien reçu et des niveaux d'éducation et de revenus plus élevés, « ce qui était cohérent avec la littérature sur les patients âgés atteints de cancer », est-il rappelé.

L’urgence d’interventions ciblées

Dans la méta-analyse, « les risques pour la santé mentale apparaissent plus élevés à la fin de la vingtaine et au début de la trentaine. Ce sont les années où les survivants de cancer pédiatrique cherchent une vocation, fondent une famille et gèrent leurs propres besoins en matière de santé, est-il rappelé dans un édito associé. Comme cette population est moins susceptible que ses pairs d’être employée, plus à risque d’infertilité et plus susceptible d’avoir des comorbidités, les troubles de l’humeur concomitants semblent compréhensibles ».

L’urgence pour les autrices est de « répondre aux besoins de chaque patient en temps réel, en ciblant les plus à risque ». Des approches sont déjà développées, insistent-elles : les thérapies axées sur le cancer, le soutien psychosocial, la formation à la gestion du stress, le soutien aux parents, l’accompagnement du passage de la pédiatrie à la médecine adulte, etc.

« Nous ne comprendrons peut-être jamais complètement si les risques sont plus importants pendant le traitement ou par la suite. Les cliniciens et les chercheurs tentent depuis des années d'identifier (et d'atténuer) les facteurs de risque immédiats et à long terme », écrivent-elles. Avant de tacler : « Plutôt que de continuer à décrire le problème, il est peut-être temps d'investir dans des études rigoureuses sur la façon de résoudre ce problème. »


Source : lequotidiendumedecin.fr