Une pandémie mentale

Publié le 03/12/2021
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Alors que nous traversons une pandémie mondiale qui a bouleversé la vie de milliers de familles, force est de constater que ce nouveau virus présente un effet-âge particulièrement marqué. En effet, l’infection a épargné la santé des plus jeunes en matière de mortalité, une dizaine de décès d’enfants étant à déplorer depuis 2020 (1). Pour autant, des formes graves ont été observées dès le printemps 2020, en lien avec une réponse inadaptée du système immunitaire donnant lieu à des tableaux cliniques maintenant bien caractérisés : les Pims (syndromes inflammatoires multisystémiques). Ces cas graves ont pu être analysés en temps réel grâce à la mise en place d’un registre dès les premières semaines de la crise sanitaire par les pédiatres français. Il comptabilise à ce jour environ 700 cas en lien avec le Covid. Leur traitement a été rapidement optimisé et l’évolution est maintenant favorable dans la quasi-totalité des cas (2).

Dès l’automne 2020 en revanche, en France comme dans le reste du monde, les médecins libéraux et les services d’urgences ont été massivement sollicités pour prendre en charge des milliers d’enfants et d’adolescents qui présentaient une altération de leur santé mentale avec des signes d’anxiété, des idées noires et pour certains des gestes suicidaires (3). Les besoins de soins psychiatriques réactionnels à la crise Covid ont conduit très rapidement à la saturation des filières de soin de pédopsychiatrie — même s’ils n’ont fait qu’accentuer l’insuffisance de l’offre dans ce domaine, qui était déjà bien connue en France. Ainsi, il est apparu que le principal danger du Covid-19 chez les enfants n’était pas celui de développer une forme grave de la maladie mais bien celui d’affecter leur santé mentale, par un environnement anxiogène mais aussi des mesures répétées de fermeture de classe et de confinement, rendues aujourd’hui évitables par le respect des gestes barrières mais surtout la vaccination.

Aujourd’hui, alors que le vaccin protège efficacement des formes graves de la maladie, il semble primordial de poursuivre les efforts de vaccination des adolescents et de la population adulte, en particulier adultes jeunes, parents, professionnels de l’enfance. L’urgence est bien sûr à réduire la circulation du virus mais avant tout à protéger par le vaccin en priorité tous les sujets à risque des complications graves de la maladie (4) : enfants porteurs de maladies chroniques et tous les adultes !

Présidente de la Société française de pédiatrie, CHU de Nantes

(1) Santé publique France, Covid tracker

(2) Ouldali N et al. N Engl J Med. 2021;385(13):e42

(3) Cousien A et al. JAMA Netw Open. 2021;4(10):e2128611

(4) Naleway AL et al. Morb Mortal Wkly Rep. 2021;70(46):1608-12

Pr Christèle Gras-Le Guen

Source : lequotidiendumedecin.fr