La santé en librairie
ALORS JEUNE interne en médecine, Daniel Widlöcher entreprend, en 1951, une analyse avec Jacques Lacan ; analyse qu’il poursuivra plusieurs années. Les séances ont lieu tous les soirs à 19 heures après une journée bien remplie : stage d’interne en médecine le matin, travail un peu plus lucratif l’après-midi comme médecin du travail pour gagner de quoi être écouté par celui avec qui le futur psychiatre et psychanalyste nouera une alliance qui connaîtra des « moments féconds et douloureux » et qui se terminera par une rupture sur laquelle on l’interroge encore aujourd’hui, dit-il. Rencontre dont le récit amusera les lecteurs critiques du « maître » Lacan. Et les autres.
Car le récit de cette relation essentielle, dont il affirme qu’elle lui a changé la vie et ouvert une voie unique, est le point de départ de son exploration de la théorie et de la pratique psychanalytique. Moments clefs de sa vie, cheminement personnel et intellectuel avec la psychanalyse et les textes de Freud, rencontres avec Lagache, Smirnoff, Anzieu, Fedida, Lebovici et bien d’autres, récits des querelles et scissions dramatiques et parfois dramatisées au sein de la communauté psychanalytique, dessinent l’évolution de ce mouvement, fait de « courants théoriques et cliniques variés réunis par un fond commun », en France. Mais également hors de nos frontières puisque Daniel Widlöcher a présidé, quelques années, l’Association internationale de psychanalyse fondée en 1910 et a donc vécu de près les profonds bouleversements de la discipline dans les pays de l’ex-Union soviétique et de ses satellites.
Dialogue.
Le retour sur son analyse puis sa rupture avec Jacques Lacan, ses relations plus récentes avec les « Lacaniens », les débats possibles ou impossibles avec les fidèles au « maître » ou avec les « Freudolacaniens », sont autant de fils pour exposer ses réflexions sur la pratique de la psychanalyse, sa place dans le champ de la psychiatrie et du soin. « Que dire de l’avenir ? Je ne le vois ni dans la banalisation des concepts et des méthodes, effet d’un certain pluralisme dont je me suis toujours méfié, ni dans une doctrine hypothétiquement reconnue comme une nouvelle orthodoxie », écrit-il.
Dans les dernières pages de l‘ouvrage, le Pr Widlöcher évoque bien sûr les questions qui agitent aujourd’hui le monde de la psychiatrie, des psychothérapeutes et des psychanalystes, de la question de la « labellisation » et du statut à celle de la question épistémique de la psychanalyse.
Le credo de Lagache en faveur de l’unité de la psychologie a habité toute ma trajectoire, explique l’ancien chef de service universitaire, « avec cette idée que l’expérimental et le clinique ont tout intérêt à se nourrir mutuellement », idée présente aujourd’hui dans la notion de dialogue entre la neurologie, le cognitivisme et la psychanalyse.
› Dr CAROLINE MARTINEAU
Daniel Widlöcher, « Comment on devient psychanalyste et comment on le reste », Odile Jacob, 271 pages, 23,90 euros .
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024