À PARIS, devant la fontaine Saint-Michel, aura lieu samedi une curieuse manifestation. Modeste, car peu de personnes vont y participer, mais pour porter un message fort, celui des fibromyalgiques qui espèrent « échapper aux filets de la douleur ». « Nous voulons rendre visible l’invisible, explique Carole Robert, la présidente de Fibromyalgie France. Le syndrome est connu mais les malades ont tant de mal à dire qu’ils ne sont pas bien. »
La fibromyalgie est reconnue en tant que syndrome (depuis 1992 par l’OMS) mais pas comme une maladie. C’est l’une des revendications figurant dans une déclaration écrite du Parlement européen, adoptée le 17 décembre dernier. « Sur les 108 propositions déposées, seules huit ont été adoptées dont deux dans le domaine de la santé, précise Carole Robert. C’est une belle victoire. » Et le fruit d’un long travail de lobbying auprès de l’institution européenne.
Suspicion.
« Nous sommes un syndrome. Sur le terrain, dans le collectif sociétal, nous sommes encore trop considérés, à part dans certains services antidouleur, comme des personnes qui se plaignent tout le temps car elles s’écoutent un peu trop. D’autant que cette pathologie touche 80 à 90 % de femmes… Alors nous véhiculons une image très négative. » Pendant treize ans, confie-t-elle encore, « j’étais diagnostiquée sclérose en plaques. J’inspirais alors de la compassion. À partir du moment où l’on m’a découvert une fibromyalgie, j’ai éveillé la suspicion. »
Carole Robert a eu à subir une histoire douloureuse avec son affection, dont sa fille souffre également depuis sept ans . « Je suis allée consulter un pédiatre à l’hôpital car je m’inquiétais pour elle. Il m’a répondu que je voulais que ma fille soit malade… comme moi. On m’a même menacée de me la retirer… J’étais considérée comme une mère dangereuse. Deux ans plus tard, elle était diagnostiquée fibromyalgique. Elle n’a reçu aucun soutien scolaire. Heureusement que nous avions les moyens de lui offrir des cours privés. »
Quatorze millions d’Européens sont touchés par cette pathologie, dont deux millions de Français. L’année européenne de la fibromyalgie est célébrée depuis à octobre prochain. Et cependant, l'AMM du Cymbalta (duloxetine) pour la prise en charge de la fibromyalgie vient d’être refusée par l’EMEA (l’Agence européenne du médicament). « C’est incompréhensible, les États-Unis l’ont obtenue et en Europe, on nous dit que cette molécule est potentiellement dangereuse ! » L’association a sollicité un entretien auprès du Dr Éric Abadie, président du CHMP, la commission qui statue sur l’AMM au sein de l’EMEA. Elle sera reçue le 16 mars. « Nous savons bien que jamais nous ne disposerons d’un médicament qui n’agirait ne serait-ce qu’à 50 %. Il nous faut une combinaison de molécules, une agissant sur le sommeil, l’autre sur les troubles cognitifs, une autre sur la douleur… ».
En attendant la 16 e journée mondiale de la fibromyalgie du 12 mai, l’ENFA (European Network of fibromyalgia associations) organise donc samedi une action européenne dans plusieurs pays, la France, l’Espagne, l’Italie, l’Irlande… Seront présentes au « coup de filet » les personnes qui pourront ce jour-ci se déplacer, prendre le métro. Une vingtaine, estime Carole Robert, celles qui ne seront pas fatiguées.
http://fibromyalgieeurope.wordpress.com.
Sur la fibromyalgie, lire aussi notre article dans le supplément « Femmes », page 12.
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