LE MOUVEMENT FRANCAIS pour le planning familial (MFPF) est inquiet pour son avenir immédiat. Qu’adviendra-t-il de sa misson d’utilité publique si, faute de crédits d’État suffisants, le conseil conjugal et familial et l’information sexuelle en milieux précarisés se déclinent, pour une part, sous forme de services payants ?En ces temps de crise, ses militants craignent le pire.
Le Planning compte 70 associations départementales: 24 sont des structures médico-sociales (orthogénie, vacations médicales), agréées et financées par les conseils généraux, chacune dirigées par un gynécologue, et 46 sont des établissements d’information, de conseil conjugal et familial (EICCF)*, fréquentés chaque année par 180 000 personnes, sans compter les 270 000 bénéficiaires d’actions en extérieur(école, foyers de travailleurs, missions locales, etc.) ou de communications par téléphone et sur Internet, conduites par les 1 000 bénévoles et les 420 salariés du MFPF.
Le conseil familial à 8 euros de l’heure
La Confédération du planning familial, « qui vit grâce à de fortes doses d’huile de coude », tient à faire remarquer au « Quotidien » Marie-Pierre Martinet, secrétaire générale, a droit, au nom de la loi Neuwirth (titre I), à des crédits publics. Basés sur une prestation des conseillers conjugaux et familiaux évaluée, depuis 2002, à 8 euros TTC de l’heure, « ce qui représente le tiers d’un coût horaire décent » juge le Planning, ils constituent les seules ressources d’une douzaine d’EICCF. Vingt-cinq autres disposent d’enveloppes, toujours en référence à la législation sur la régulation des naissances, entrant pour 10 % à 97 % dans leur budget de fonctionnement (350 000 heures financées en 2005). Il leur appartient de trouver des compléments financiers, avec les dons et les cotisations des 5 100 adhérents du Planning (3 % des subsides du MFPF) et , surtout, en sollicitant les Groupements régionaux de santé publique (GRSP), qui mettent la main sur présentation de projets d’actions spécifiques .
« Or, ces opérations, commente Marie-Pierre Martinet, obèreront à terme la vocation de conseil familial et conjugal et d’éducation à la sexualité conférée au mouvement associatif spécialisé », confirmée par la loi du 11 juillet 1973 créant le Conseil supérieur de l’information sexuelle. « Des dizaines de milliers de femmes et de jeunes risquent de se voir privés de communication/accompagnement anonyme et gratuit sur la contraception et l’IVG, la prévention, la vie de couple en difficulté et les situations de violence (détection). »
En fait, selon la secrétaire générale, « c’est l’ensemble des associations loi 1901, toutes activités confondues, qui connaissent une diminution drastique de leur budget depuis une dizaine d’années, les pouvoirs publics conditionnant leurs aides à des programmes spécifiques. Ils ne leur allouent plus de subventions pour ce qu’elles sont et ce qu’elles défendent. » « Au Planning, la donne, sans être dramatique, devient de plus en plus tendue, poursuit sa responsable. Nous nous employons à multiplier des actions ponctuelles comme la réduction des risques sexuels dans les populations les plus fragiles ou le développement de l’information contraception/IVG en zone rurale. Et le temps passé à la constitution des dossiers, que cela nécessite pour les GRSP, n’est pas sans contrarier notre mission d’intérêt général. »
Une épée de Damoclès.
Dans ce contexte, le MFPF voit dans la loi de Finances 2009 une épée de Damoclès pour 23 de ses 70 centres, dont 60 à 100 % du budget est alimenté par des crédits d’Etat. Comparativement à l’année écoulée, « les associations type Planning (CLER Amour et famille, Couples et familles, etc.) qui participent à "l’accompagnement des familles dans leur rôle de parents, au titre d’actions en faveur des familles vulnérables" ** enregistrent une chute de leurs subventions de 42 %. Elles passent de 2,5 millions d’euros à 1,5 ». Sur les 2,5 millions de 2008, le MFPF percevait 1,3 million. Brice Hortefeux, ministre du Travail et de la Solidarité, parle d’une baisse « de 2,5 millions d’euros à 2,2 », compensée par 430 000 euros et 380 000 euros en provenance respectivement de son ministère et de la Santé (questions orales à l’Assemblée du 4 février). « D’où proviennent ces 2,2 millions ?», s’exclame Marie-Pierre Martinet en rappelant que les « 1,5 million d’euros ont été votés en décembre dernier, et consignés noir sur blanc ». Quant aux 810 000 euros, « ils ne renvoient pas au budget de fonctionnement des associations, mais à des programmes ayant trait, par exemple, au SIDA ou aux violences faites aux femmes. Nous sommes perplexes, confesse la secrétaire générale. Le désengagement de l’Etat sera-t-il maintenu, voire aggravé en 2010-2011 ? Les conséquences qui se dessinent laissent présager une ouverture au secteur marchand de l’information sur la sexualité et du soutien à la conjugalité/parentalité en direction des familles vulnérables. Que deviendra la neutralité des interventions du Planning, l’anonymat des personnes qui en bénéficient, entre les mains de consultants honorés à l’acte ? Seront-ils formés pour assurer la mission généraliste du Planning qui permet à nos intervenants de répondre, entre autres, à une situation de violence sexiste ou de la détecter ? "La meilleure contraception, c’est celle que l’on choisit. Parlez-en", recommande l’INPES dans le 2e volet de sa campagne triennale lancé en 2008. Mais, vers qui vont aller les personnes fragiles, précarisées socialement ? Les médecins rempliraient le rôle, suggère-t-on, mais ils ne vivent pas d’amour et d’eau fraîche. Qui paiera, si une adolescente veut "en parler" à son généraliste sans prévenir ses parents ?» Reste à savoir si toutes ces appréhensions, teintées de méfiance, seront levées par Brice Heurtefeux qui reçoit le 19 février Françoise Laurant, présidente du Planning familial. Il la voit « pour la rassurer », dit Nadine Morano, secrétaire d’Etat à la Famille, qui sera du rendez-vous. Françoise Laurant se libèrera de ses craintes à une seule condition : « que la loi de Finances 2009 dise faux. Les 1,5 million vaudraient, en réalité, 2,2 millions d’euros ».
* Les EICCF sont chargés des entretiens préalables à l’IVG, de l’information et de l’orientation des publics jeunes sur les questions relatives à la sexualité. Ils accueillent et conseillent également les familles rencontrant des difficultés particulières.
** 350 000 heures financées en 2005
*** La « ligne » budgétaire est porteur au total de 15,5 millions d’euros de crédits, au lieu de 23,2 en 2008.
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