Cause « banale » de consultation aussi bien chez le généraliste que chez l'ORL, l'épistaxis fait rarement la une des congrès... Sans remonter à Attila qui en mourut pendant sa nuit de noces, son traitement par mèchage/compression est très ancien et connu de tous. L’épistaxis n'en nécessitait pas moins une mise au point. C’est chose faite avec le rapport présenté la semaine dernière par la SFORL à l’occasion de son congrès national (Paris, 10-12 octobre 2015).
Rien de très révolutionnaire dans ce travail qui a toutefois le mérite de faire le tri dans les différents dispositifs proposés pour la prise en charge en urgence, de préciser les indications chirurgicales des formes graves et d’inciter à une coopération plus large avec les autres spécialités pour faire face aux problèmes que pose de plus en plus l'interaction entre épistaxis et chiffres tensionnels ou la conduite à tenir en cas de traitements anticoagulants.
Tamponnement de l'épistaxis : rester simple
Le tamponnement est le geste incontournable de la prise en charge de l'épistaxis. Il agit de façon mécanique par la compression mais aussi pour certaines mèches par un effet hémostatique.
Les produits disponibles sont de plus en plus nombreux, de plus en plus sophistiqués, avec des prix qui varient de quelques euros à 500 euros ! Pour le tamponnement antérieur, le médecin peut maintenant utiliser des produits résorbables (Gelfoam®, Surgicel®, Nasoporex®, MeroGel ®, etc.). Les colles hémostatiques plus récentes sont surtout utilisées en peropératoire et leur coût est dissuasif !
Parmi les mèches non résorbables, les classiques mèches grasses restent la référence, mais on peut aussi recourir aux mousses de polymère (Merocel ®, Ultracel®), à celles imbibées d'hémostatiques (Algosteril®) ou aux ballonnets gonflables. « Globalement, tous les produits ont la même efficacité et, en pratique, on utilise surtout les moins onéreux, mèches grasses ou mousses extensibles. En cas de troubles de l'hémostase on peut préférer les mèches imprégnées d'hémostatiques ou résorbables; les mèches en mousse sont généralement moins douloureuses lors de la mise en place et du retrait », résume le Pr Laurent Castillo (Institut universitaire de la face et du cou, Nice).
En ce qui concerne le tamponnement postérieur, la vieille technique de la mise en place de mèches dans le cavum et dans les fosses nasales, complexe et douloureuse, a laissé la place à des dispositifs plus faciles à utiliser comme les sondes de Foley (sondes urinaires à ballonnet détournées de leur usage initial). Les sondes à double ballonnet, plus simples et moins douloureuses à poser, ont révolutionné la prise en charge des épistaxis postérieures sévères, avec une efficacité avérée dans 90 % des cas. Dans tous les cas, le tamponnement doit être précédé par des gouttes vasconstrictives et accompagnées par une antibiothérapie en cas de méchage bilatéral. « Si, malgré un tamponnement antéro-postérieur bien fait l'épistaxis persiste, il ne faut pas remècher ni remettre une sonde mais envisager d'autres alternatives », insiste le spécialiste. Celles-ci relèvent du radiologue interventionnel comme l'embolisation, un geste grevé d'un risque de complications emboliques, auquel on préfère l'hémostase de l'artère sphénopalatine, voire celle des artères ethmoïdales en periopératoire de la chirurgie nasosinusienne, soit en deuxième intention après échec de la technique précédente.
Épistaxis et anticoagulants, mélange à risque
La situation se complique nettement lorsqu'il existe ndes troubles de l'hémostase, d'origine iatrogène dans leur grande majorité. « La moitié des hospitalisations pour épistaxis spontanée sont liées aux traitements anticoa- gulants, et l'épistaxis est d'autant plus délicate à gérer qu'il s'agit souvent de sujets âgés, polypathologiques », constate le Dr Cyril Page (CHU d'Amiens). Avec deux points de vue a priori irréconciliables, celui de l'ORL aux prises avec le saignement et celui du cardiologue, centré sur le risque de complication thrombotique.
Après les gestes visant à contrôler l'épistaxis, la concertation s'impose pour vérifier l'hémostase et évaluer le risque thrombotique d'une fibrillation auriculaire, d'un stent, d'un syndrome coronarien, etc. Les AVK seront diminués si l'International Normalized Ratio (INR) est hors de la zone thérapeutique. Si le tamponnement est inefficace et l'épistaxis grave, il faut envisager leur arrêt avec, éventuellement, administration de CCP (concentré de complexes prothrombiniques) et relais par héparine si le risque thrombotique est élevé.
Vis-à- vis des anti-agrégants plaquettaires en mono- ou bithérapie, la décision est à discuter avec le médecin traitant ou le cardiologue.
HTA, coupable ou non coupable ?
Le lien entre pression artérielle élevée et épistaxis semble évident en clinique mais les données de la littérature ne sont guère concluantes. Les chiffres tensionnels sont souvent augmentés lors des épistaxis en partie du fait du stress occasionné par le saignement, mais cela ne signifie pas pour autant qu'il existe une hypertension artérielle avérée.
La survenue et la gravité de l'épistaxis ne semblent pas corrélées à la sévérité de l'hypertension, mais le contrôle des chiffres tensionnels diminue la durée du saignement et un bon équilibre tensionnel chez un hypertendu connu participe à la prévention des épistaxis. « Selon une étude française, on retrouve chez 43 % des patients qui saignent du nez une HTA sous-jacente, ce qui justifie de demander un avis cardiologique dans les suites devant une élévation de la pression artérielle », rappelle le Dr Justin Michel (CHU de Marseille).
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