LE QUOTIDIEN : Comment avez-vous accueilli l’initiative Choose France for Science, annoncée par Emmanuel Macron et dotée de 100 millions d’euros, en faveur de l’accueil de chercheurs étrangers dont la liberté académique est menacée ?
DAVID SIMARD : Dans le contexte international actuel, proposer des moyens pour accueillir des chercheurs étrangers, en particulier américains, apparaît comme une bonne chose. Mais, cette annonce intervient dans un contexte français où les budgets de l’enseignement supérieur et de la recherche ne cessent d’être rabotés de manière drastique. Je suis donc plutôt circonspect.
La France et l’Europe sont-elles en capacité d’être attractives pour les chercheurs américains ?
La question se pose pour la France en tout cas. Le programme Choose France for Science, comme tout projet de recherche et de formation, notamment dans le champ de la santé, ne bénéficiera que d’un financement partiel. L’État pourra abonder à hauteur de 50 % les budgets des projets retenus. Cela signifie qu’il faut trouver le reste ailleurs.
Les chercheurs américains risquent de ne pas considérer l’initiative comme attractive
C’est une mécanique qui a beaucoup grevé les budgets des universités. Ces dernières, répondant à des appels à projets qui ne sont que partiellement financés par l’État, ont dû nouer des partenariats. C’est un problème majeur du financement de l’université, de l’enseignement supérieur et de la recherche dans le pays. Si les chercheurs américains sont informés de cette situation, ils risquent de ne pas considérer l’initiative comme attractive.
Les sciences humaines et sociales (SHS) ne sont pas citées par cette initiative, alors qu’elles concentrent une grande partie des attaques de l’administration de Donald Trump contre la recherche. Comment analyser cette situation ?
Quand on regarde le détail de Choose France for Science, les SHS ne sont pas à proprement parler exclues. Il reste possible qu’elles soient intégrées aux thématiques retenues [santé, espace, technologies quantiques, intelligence artificielle, économie circulaire, vieillissement, énergie nucléaire, climat, électronique et lutte contre la désinformation, NDLR].
Mais, effectivement ce sont les recherches sur les discriminations et les inégalités de toutes sortes qui sont principalement ciblées aux États-Unis. Le gouvernement français et la Commission européenne affichent une démarche d’aide aux chercheurs sans prioriser ceux attaqués par le pouvoir politique de leur pays via des campagnes d’intimidation et privés de moyens pour leurs travaux. Cette situation ajoute une seconde couche de circonspection.
L’ensemble ressemble plus à un effet d’annonce qu’à une véritable stratégie politique de soutien à la recherche mondiale et à la liberté académique. On peut y voir l’intérêt bien compris de l’Europe et la France, confrontées depuis des années à une fuite des cerveaux vers les États-Unis.
Où en est-on en France du déploiement des SHS dans les enseignements des facultés de médecine ?
Selon moi – et c’est un avis partagé par un grand nombre de collègues du Collège des humanités médicales dont je suis élu au bureau –, la place relative faite aux SHS dans les formations en santé reste insuffisante, trop souvent réduite à l’éthique médicale et à la bioéthique. Or le champ des SHS en santé est bien plus large et devrait être abordé tout au long du cursus. Il reste du chemin à faire pour considérer ces disciplines (sociologie, économie, histoire, etc.) comme parties intégrantes de ce qui va orienter l’exercice des pratiques médicales.
La place accordée reste par ailleurs dépendante des contextes locaux et des moyens dont disposent les Doyens et des arbitrages qu’ils peuvent effectuer sur les différents postes d’enseignants-chercheurs à attribuer.
Plus généralement, les discours politiques répètent que les SHS ont leur place, mais les financements ne suivent pas et certains de ces discours ciblent les SHS présentées avant tout comme idéologiques, biaisées, voire « wokistes », surtout quand elles touchent aux discriminations et aux inégalités.
Les statines semblent améliorer la survie dans deux cancers du sang
Estro 2025 : du nouveau pour la désescalade en radiothérapie
Le taux de micro/nanoplastiques dans l’athérome carotidien est associé à la sévérité des symptômes
Dans la cholécystite, la chirurgie reste préférable chez les sujets âgés