Les plateformes pluridisciplinaires Prevenir (Prévention, environnement, reproduction), de plus en plus nombreuses, complètent la prise en charge médicale des couples suivis pour troubles de la fertilité par une prise en charge environnementale, en combinant diagnostic à large spectre des expositions et préconisations ciblées.
Dans un avis de 2013 (1), le comité du Collège américain des obstétriciens et gynécologues établit un lien entre des agents environnementaux toxiques et des effets néfastes sur la santé reproductive et le développement de l’enfant. Deux ans plus tard, la Fédération internationale de gynécologie et d’obstétrique recommande la mise en place de politiques pour la prévention des expositions à des produits chimiques.
Dans ce contexte, la première plateforme Prevenir voit le jour en 2016 au CHU de Bordeaux, financée par l’agence régionale de santé (ARS) et en partenariat avec l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et Santé publique France. Nommée Artemis et rattachée au centre régional de pathologies professionnelles et environnementales (CRPPE), elle est constituée d’une équipe (médecin du travail, médecin de santé publique, sage-femme, ingénieur santé environnement, infirmière en santé travail) qui a construit un circuit intégré à la prise en charge clinique.
Puis quatre autres plateformes se sont mises en place, presque toujours rattachées au CRPPE, localisées dans un CHU ou un CH : Creer à Marseille ; PRE2B à Rennes ; Materexpo-Reprotoxif à Créteil ; Reprotoxif à Paris.
L’auto-questionnaire, socle de la démarche de prévention
Un réseau s’est constitué, avec la mise au point d’outils communs (3). « Nous avons relevé les facteurs de risques avérés ou présumés sur la reproduction et les circonstances potentiellement exposantes, et mis au point l’auto-questionnaire pour les patientes et patients, socle de la démarche de prévention », illustre la Dr Fleur Delva, médecin de santé publique au centre Artemis.
L’auto-questionnaire balaie plusieurs champs : professionnel (secteur d’activité, contraintes organisationnelles et biomécaniques, risques chimiques et physiques) ; loisirs ; domicile (riverain de zones agricoles, industrielles, de réseaux routiers, plomb des anciennes peintures, ventilation, aération, solvants organiques, etc.) ; habitudes de vie dont l’alimentation (poisson, produits transformés, isoflavones de soja, contenants avec bisphénol) et produits utilisés (cosmétiques, produits ménagers, biocides, pesticides).
Sous l’impulsion du quatrième plan national santé environnement (PNSE4), le réseau s’étend en déployant des antennes dans une même région (Angoulême, Libourne et Marmande reliées au centre de référence de Bordeaux) ou en renforçant le maillage national avec, prochainement, des centres à Lyon, Toulouse, Nantes, Rouen et Amiens. « Dans notre centre d’assistance médicale à la procréation, nous questionnons déjà tous les patients vis-à-vis des perturbateurs endocriniens. Les outils partagés, tels que l’auto-questionnaire, permettront l’homogénéité dans tout le réseau et la réalisation de recherches multicentriques », observe la Pr Rosalie Cabry (CHU d’Amiens, unité de recherche Péritox, université de Picardie/Ineris).
Troubles de la fertilité ou pathologies de la grossesse
La prise en charge concerne les couples présentant des troubles de la fertilité inexpliqués ou liés à une anomalie (oligo-asthéno-térato-zoospermie, insuffisance ovarienne, endométriose, syndrome des ovaires polykystiques) ou ceux confrontés à des pathologies de la grossesse (fausses couches spontanées à répétition, diabète gestationnel, prématurité, retard de croissance in utero, pré-éclampsie, mort fœtale in utero).
Lors d’une hospitalisation pour pathologie gravidique, nous allons à la rencontre des patients
Dr Fleur Delva, médecin de santé publique au centre Artemis
« Lorsque le couple est suivi pour troubles de la fertilité, les biologistes de la reproduction nous l’adressent. Lors d’une hospitalisation pour pathologie gravidique, nous allons à la rencontre des patients », explique la Dr Fleur Delva.
L’analyse de l’auto-questionnaire nécessite un expert en environnement pour préparer l’entretien avec le couple « dans un climat de confiance, sans message anxiogène ni jugement, propice aux messages de prévention », relate la Dr Delva. Les conseils de prévention relèvent en général des « bons gestes au quotidien pour une bonne santé » : alimentation, cosmétiques, travaux domestiques, mobilier, matériel de puériculture. Si une exposition professionnelle est suspectée, le patient est informé et, après son accord, le médecin du travail est contacté.
Dans certains cas, une prise en charge spécifique par un tabacologue, un spécialiste de l’addiction (alcool, stupéfiants) ou de l’obésité est proposée. « Dans les Hauts-de-France, les patients socialement fragiles sont nombreux et les addictions en hausse. Leurs comportements sont difficiles à corriger. Nous visons à donner moins de messages, mais plus efficaces », précisent les Drs Sylvain Chamot et Léa Leroy, médecins du travail (CHU Amiens, Péritox).
(1) ACOG Committee Opinion, Fertility and Sterility, 2013 ; 100(4):931-4
(2) GC Di Renzo et al., International Journal of Gynecology and Obstetrics, 2015 ; 131(3):219-25
(3) F. Delva et al., Médecine de la reproduction, 2020 ; 22(4):312-317
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