Comment le monde de la santé peut-il faire sa part dans la maîtrise des émissions de gaz à effet de serre ? Un comité de pilotage (Copil) inédit a été mis en place ce 22 mai, sous la présidence d'Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'Organisation territoriale et des professions de santé.
Son but : assurer la transformation écologique du secteur sanitaire sur le long terme, en structurant les actions et initiatives, parfois existantes, en fixant un cap et en déterminant des objectifs précis. Ceci dans la continuité des travaux lancés par Élisabeth Borne sous la marque « France nation verte » et dans le cadre de l'engagement national de rester sous la barre des + 1,5 °C supplémentaires, ce qui suppose de baisser les émissions de gaz à effet de serre de 5 % par an jusqu'en 2050.
Le système de soins en France représente en effet plus de 8 % des émissions de gaz à effet de serre nationales, soit près de 50 millions de tonnes équivalent CO2. Plus de la moitié (55 %) de ces 50 millions de tonnes est liée aux médicaments et dispositifs médicaux ; les 45 % restant viennent directement de l'offre de soins.
Sept domaines d'actions
Le Copil réunit plusieurs ministères (Santé, Autonomie, Transition écologique, Transition énergétique, Industrie, Outre-mer), les caisses nationales de l'Assurance-maladie (Cnam) et de solidarité pour l'autonomie (CNSA), l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), d'appui à la performance des établissements de santé (Anap), la Haute Autorité de santé (HAS), les fédérations de professionnels, les usagers, les Agences régionales de santé.
Cinq experts ont été sollicités : la Dr Alice Barras, autrice du guide du cabinet de santé écoresponsable, Laurie Marrauld, responsable de la décarbonation de la santé au sein du think tank « The Shift Project », Sarah Ouanhnon, engagée dans le programme « For a Greener National Health Service », le Pr Patrick Pessaux, président du comité de transition écologique de la Fédération hospitalière de France et Charlotte Sorin, responsable à la Croix-Rouge française et membre du consortium bilan carbone du Réseau Environnement Humanitaire.
La première réunion ce 22 mai a permis de structurer la feuille de route autour de sept domaines d'actions, auxquels correspondent sept objectifs : accélérer la transformation énergétique des bâtiments d'ici à 2040 ; promouvoir des achats durables d'ici à 2030 (en élaborant une plateforme d'achats fondée sur l'analyse de cycle de vie et de scores environnementaux, et en interdisant les contenants alimentaires en plastique, chez les enfants et femmes enceintes) ; développer les soins écoresponsables dès 2023 (via un référentiel de bonnes pratiques et la réduction d'ici à 2025 des gaz médicaux à forts effets de serre - par exemple remplacer le desflurane et l'isoflurane par du sévoflurane) ; réduire les déchets ; former et sensibiliser les professionnels de santé à l'urgence écologique ; favoriser les mobilités durables (avec un bonus écologique pour les véhicules électriques) ; et verdir le numérique d'ici à 2024 en élaborant des éco-scores pour les applications de santé et les systèmes d'information hospitaliers.
De manière plus transversale, le Copil vise à renforcer le pilotage de la transformation du secteur, grâce à la mise en place d'une task force interministérielle. La France devrait aussi rejoindre l'accord de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) « Alliance pour une action transformatrice sur le climat et la santé ». L'observatoire du développement durable devrait être refondé en septembre, pour en faire un outil de pilotage du secteur.
Un deuxième Copil à l'automne
Selon le cabinet d'Agnès Firmin Le Bodo, l'objectif est de donner à la transition écologique une impulsion cohérente avec des objectifs et indicateurs de suivi, alors que les initiatives lancées par des acteurs de terrain (hôpital, Ehpad, cabinets de ville…) restent méconnues, peu valorisées et hétérogènes.
La feuille de route devrait être affinée d'ici à l'automne, à la faveur de déplacements de la ministre sur le terrain. Parmi les sujets qui devraient être précisés, figurent la place des usagers de santé (faut-il les former ?), le rôle de l'industrie du médicament, ou encore l'éthique d'un soin responsable et durable, qui devrait être discutée avec la Conférence nationale de santé.
En décembre 2023, une convention de planification écologique listant les engagements des parties prenantes du Copil devrait être signée.
Des financements issus du Ségur qui restent à préciser
Quant aux financements, la feuille de route n'a pas d'enveloppe dédiée. Les collectivités territoriales peuvent se tourner vers le fond vert du ministère de la Transition écologique, précise-t-on au sein du cabinet d'Agnès Firmin Le Bodo, et déjà 6 projets ont été sélectionnés sur 60 proposés, pour verdir le parc immobilier notamment.
Par ailleurs, les établissements de santé peuvent compter sur une partie des 250 millions d'investissements du quotidien du Ségur, la circulaire de 2023 incluant pour la première fois un indicateur relatif à la transition écologique. Une autre piste pourrait s'ouvrir d'ici cet automne avec la banque des territoires, susceptible d'ouvrir des prêts dédiés pour la rénovation des bâtiments.
Afin de décrire un T0 du secteur, tous les bâtiments de plus de 250 salariés doivent par ailleurs réaliser leur bilan carbone et peuvent être aidés par les 150 conseillers techniques en transition énergétique et écologique financés dans le cadre du Ségur (10 millions d'euros par an). Reste néanmoins la question des bâtiments qui ne sont pas éligibles au Ségur et qui nécessitent une rénovation énergétique.
Colopathie fonctionnelle : la réponse au régime pauvre en fodmaps dépend du profil métabolique
Eat’s OK : une appli pour un accompagnement nutritionnel adapté à la prise de médicaments
Patients âgés insuffisants rénaux : repousser le plus possible la dialyse pourrait être la meilleure option
Vieillissement : l’analyse moléculaire révèle une accélération à 44 et 60 ans