À partir d’échantillons sanguins donnés par un homme mordu par 200 serpents et qui s’est injecté plus de 600 doses de venins, l’entreprise californienne Centivax a développé le tout premier antivenin à large spectre, protégeant contre au moins 19 espèces de serpents de la famille des élapidés qui inclut près de la moitié des 600 espèces de serpents venimeux.
Le donneur s’est exposé à des doses croissantes de venins létaux de 16 espèces durant près de 18 ans et s’avère hyperimmunisé aux neurotoxines qu’ils contiennent. « D’ordinaire, de telles doses tueraient un cheval », commente Jacob Glanville, premier auteur de l’étude et directeur général de Centivax. « Ce qui était captivant chez le donneur était son histoire immunitaire, unique, qui n’arrive qu’une fois dans une vie », se réjouit-il.
Les chercheurs ont isolé des anticorps issus du sérum du donneur et les ont testés sur des souris pour chaque venin de 19 espèces d’élapidés appartenant aux catégories 1 et 2 définies par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Leurs résultats sont publiés dans la revue Cell.
Synergie de deux anticorps et d’un inhibiteur de toxine
Les venins des élapidés contiennent des neurotoxines à chaîne courte (SNX) et des neurotoxines à chaînes longues (LNX), toutes se liant aux mêmes récepteurs des cellules nerveuses, potentiellement à l’origine des paralysies musculaires et des insuffisances respiratoires.
L’antivenin définitif à l’issue des travaux est un cocktail constitué de trois agents : deux anticorps (LNX-D09 et SNX-B03) et un inhibiteur de toxines PLA2, le varespladib. Le premier anticorps à lui seul, LNX-D09, a totalement protégé les souris d’une dose létale du venin de six élapidés (quatre espèces de cobras, mamba noir et cobra royal), même après un délai de 10 minutes. L’ajout du varespladib a étendu la protection au venin de serpent-tigre, de taïpan côtier et de taïpan du désert. Finalement, l’incorporation du dernier anticorps permet de contrer totalement le venin du bongare indien, du bongare fascié, du serpent de la Mulga et du serpent arlequin.
Outre cette protection totale contre les venins de 13 serpents, le cocktail fournit une protection partielle contre le cobra Naja oxiana, le cobra cracheur du sud de l'Indonésie, le cobra Naja arabica, le mamba vert de l’Ouest et la vipère de la mort, avec une survie totale pour certaines des souris et une mort significativement retardée pour les autres.
Vers une extension à d’autres espèces
Ces résultats suggèrent que LNX, PLA2 et SNX sont les toxines dominantes dans la plupart des venins des élapidés. Ainsi, même si les chercheurs se posent la question d’identifier un quatrième agent à intégrer au cocktail, ils supposent que celui développé pourrait protéger de bien d’autres serpents que ceux testés.
Aujourd’hui, les antivenins sont produits en injectant des venins à des chevaux ou à d’autres animaux puis en collectant les anticorps générés. Non seulement ces antidotes se retreignent au mieux à quelques espèces de serpents mais les anticorps issus d’animaux sont aussi plus à même de provoquer des effets indésirables. Il y a donc un double intérêt au sérum développé et ceux qui pourront suivre.
En 2017, l’université de Copenhague avait lancé des recherches dans le cadre d’une situation similaire où un homme s’injectait régulièrement divers venins de serpents mais aucune étude issue de ce cas n’a encore été publiée. Les expérimentations de Centivax ouvrent, elles, la porte à des résultats concrets. Les scientifiques cherchent actuellement à tester leur antivenin en vie réelle, auprès de chiens amenés en clinique vétérinaire pour morsure de serpent en Australie. Ils souhaitent aussi développer un antivenin ciblant la deuxième grande famille de serpents, les vipères.
Les statines semblent améliorer la survie dans deux cancers du sang
Estro 2025 : du nouveau pour la désescalade en radiothérapie
Le taux de micro/nanoplastiques dans l’athérome carotidien est associé à la sévérité des symptômes
Dans la cholécystite, la chirurgie reste préférable chez les sujets âgés