Le laboratoire Servier, qui a commercialisé pendant 33 ans le Mediator, a concédé jeudi au procès de ce scandale sanitaire avoir eu « une mauvaise appréciation du risque » et avoir fait « une erreur d'analyse ».
« Le laboratoire n'a pas perçu le niveau de risque comme il l'aurait dû », a déclaré à la barre Emmanuel Canet, représentant de la société au procès. Le laboratoire comparaît notamment pour tromperie, homicides et blessures involontaires.
Emmanuel Canet parle à de multiples reprises d'« erreur d'analyse ». Il reconnaît aussi « une mauvaise appréciation du risque ». « Les mesures qui auraient dû être prises ne l'ont pas été à temps », a-t-il dit au tribunal.
Il parle de la « responsabilité » du laboratoire mais charge systématiquement l'Agence du médicament, qui compte également parmi les prévenus pour sa passivité jusqu'en 2009. « L'analyse nous la faisons de façon conjointe avec l'Agence. Nous ne sommes pas les seuls », dit-il.
Pas de volonté de dissimulation, dit Servier
Emmanuel Canet dément que le laboratoire ait eu « la volonté de tromper ou de dissimuler » afin de maintenir le médicament sur le marché. « On n'a pas pris conscience qu'on se trouvait dans une situation semblable à celle des fenfluramines », affirme-t-il, loin de convaincre les parties civiles.
En 1997, Servier a retiré de la vente deux médicaments coupe-faim, l'Isomeride et le Ponderal, de la famille des fenfluramines, après le recensement de nombreux cas d'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Ils contenaient de la norfenfluramine, une substance toxique également présente dans le Mediator.
« Les patients et les médecins ont-ils été suffisamment informés des effets secondaires du Mediator ? », interroge la présidente Sylvie Daunis. « L'information n'a pas été à la mesure du risque », reconnaît Emmanuel Canet. Mais « ce qui paraît être aujourd'hui une évidence ne l'était pas à l'époque », se défend-il.
« À tort, nous n'avons pas fait d'études cas témoins », affirme le représentant de Servier. Les cas connus d'HTAP et de valvulopathie étaient trop peu nombreux, selon lui.
Il a fallu attendre 2009 et la pneumologue Irène Frachon pour que le scandale éclate. Dans un premier temps, le laboratoire a demandé une restriction de prescription au lieu d'un retrait du médicament. Mais au procès, dix ans plus tard, Emmanuel Canet répète : la décision du retrait « était la bonne. Il fallait la prendre ».
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
Dès 60 ans, la perte de l’odorat est associée à une hausse de la mortalité
Troubles du neurodéveloppement : les outils diagnostiques à intégrer en pratique
Santé mentale des jeunes : du mieux pour le repérage mais de nouveaux facteurs de risque