LE QUOTIDIEN : Vous vous élevez contre l’idée que les génériques posent des problèmes. Quels sont vos arguments ?
PR DOMINIQUE MARANINCHI - La première chose qu’on peut dire, c’est que les génériques sont des médicaments, et en tant que tels, ils sont examinés et contrôlés avec la même rigueur que les princeps. Le générique est moins cher, et certains se disent que si c’est moins cher, c’est peut-être parce que c’est moins bien. En réalité, c’est moins cher parce qu’il y a une perte de brevet. La recherche sur la molécule et les études cliniques ont déjà été effectuées, il n’y a donc pas lieu d’investir de nouveau. C’est aussi moins cher parce qu’il y a concurrence, ce qui par nature, fait baisser les prix.
Comment expliquez-vous le fait que le marché des génériques ne progresse pas en France ?
Il est naturel que les fabricants de princeps défendent leur marque et fassent tout pour résister à l’arrivée des génériques. Mais ce n’est pas parce que les génériques sont 40 % moins chers que ce sont des médicaments au rabais, ni en qualité, ni en sécurité. Il y a régulièrement des campagnes en France sur le thème « on ne sait pas ce qu’il y a dans les génériques ». Or, les médecins peuvent être sensibles à l’influence de leurs patients, car les insinuations issues du monde du marketing peuvent avoir de l’effet. Il y a de plus le problème de la substitution, car les génériques peuvent devenir compliqués à utiliser quand la présentation change selon le générique délivré par le pharmacien. Un meilleur échange entre les médecins, les pharmaciens d’officine et les malades est donc important pour rétablir la confiance.
Le rapport de l’Académie de médecine souligne que la production délocalisée des génériques, avec une multiplication de sous-traitants, rend les contrôles sur place très difficiles...
C’est la même chose pour les princeps ! C’est la rançon de la mondialisation pharmaceutique, d’où la nécessité de ces contrôles multiples que nous effectuons en collaboration avec les autres agences européennes et internationales.
Comment l’AFSSAPS contrôle-t-elle une production de génériques extrêmement disséminée ?
De la même manière que pour les princeps qui ne sont pas tous, loin de là, produits en France. Nous avons contrôlé 1 065 génériques différents ces 4 dernières années, en analysant la qualité et la quantité de leur principe actif, et en recherchant les vices de fabrication. Nous contrôlons aussi les matières premières, parfois sur échantillons, parfois en allant sur les sites, partout dans le monde. Nous avons contrôlé 700 lots de matières premières sur la même période ainsi que 120 sites de fabrication. Nous procédons de la même manière pour les princeps. Nous faisons aussi de la surveillance pour nous assurer que les règles de pharmacovigilance, qui sont les mêmes pour les producteurs de princeps et de génériques, sont respectées. Il n’y a pas plus d’effets secondaires sur un princeps que sur un générique.
Combien de personnes s’occupent à l’AFSSAPS du contrôle qualité ?
Nous avons un corps d’inspection d’une centaine de personnes, et leur programme d’inspection des sites et des matières premières est public. Tous les sites de fabrication des usines françaises sont inspectés périodiquement, de façon programmée ou inopinée. Ces inspections peuvent déboucher sur un contrôle plus approfondi, c’est-à-dire qu’on prend des lots de matière première ou de médicaments conditionnés, que nous contrôlons dans nos laboratoires de Montpellier, Saint-Denis et Lyon. Nous réalisons aussi des inspections en Europe et dans le monde grâce à des collaborations. On peut faire confiance aux génériques comme on fait confiance aux princeps, pas plus, pas moins.
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