Au procès en appel du Mediator, la représentante des laboratoires Servier et l'ex-numéro deux de l'entreprise pharmaceutique ont admis mardi avoir « commis des erreurs » dans « l'évaluation du risque » lié aux effets secondaires de ce médicament, mais nié toute « volonté » de dissimuler ces effets.
« Nous nous sommes trompés dans l’évaluation du risque. Nous avons fait une erreur sévère, sérieuse (...) dont les conséquences ont été gravissimes pour les victimes », a reconnu devant la cour d'appel de Paris Jean-Philippe Seta, bras droit du PDG de Servier jusqu'en 2013.
Mis sur le marché comme antidiabétique en 1976 mais indûment prescrit comme coupe-faim jusqu'en 2009, le Mediator a entraîné de graves effets secondaires sur des milliers de patients souffrant de pathologies cardiaques ou pulmonaires et parfois entraîné leur mort.
Mauvaise appréciation du risque, selon Servier
Mais « cette erreur d'appréciation, aussi grave fut-elle, mérite-t-elle une qualification pénale ? La certitude que j'ai, c'est qu'il n'y a pas eu de volonté délibérée » de tromper les autorités sanitaires et les patients, a ajouté Jean-Philippe Seta, pour ses premiers mots à la barre. L'ex-dirigeant, aujourd'hui âgé de 69 ans, est rejugé depuis le 9 janvier aux côtés de six sociétés du groupe Servier, notamment pour tromperie aggravée et homicides et blessures involontaires.
« Nous avons très mal apprécié le risque, nous l’avons constaté beaucoup trop tard », a aussi reconnu la représentante de Servier, Isabelle Tupinon-Mathieu. Pour le laboratoire, il est « acquis » que « le Mediator a entraîné des valvulopathies et de l'hypertension artérielle pulmonaire, qui ont entraîné des décès », ce que « nous regrettons profondément », a-t-elle expliqué.
En revanche « nous contestons avoir obtenu de façon indue l'autorisation de mise sur le marché » du médicament et « avoir dissimulé les effets secondaires du produit », a ajouté la dirigeante.
Réaction tardive ?
« Quand le groupe Servier et sa direction ont raté le coche ? Quand est-ce que vous auriez dû faire autrement ? », les a interrogés le président de la cour, Olivier Héron. « En 2007 il aurait fallu peut-être » réagir différemment, a avancé Jean-Philppe Seta, précisant que « cette déclaration n'engage(ait) que (lui) ».
Pour Isabelle Tupinon-Mathieu, en revanche, ce n'est qu'« en 2009 », date du retrait du Mediator du marché, qu'« on a eu les éléments probants qui pointaient l’ampleur du risque ».
En première instance, en mars 2021, le tribunal correctionnel de Paris a estimé que les laboratoires Servier « disposaient à partir de 1995, de suffisamment d'éléments pour prendre conscience des risques mortels » liés au Mediator. Servier a été condamné à une amende de 2,7 millions d'euros, Jean-Philippe Seta à quatre ans de prison avec sursis et une amende de 90 600 euros.
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