C’était l’une des promesses électorales, restées vaines, du candidat Macron en 2017 : permettre la dispensation de certains médicaments à l’unité en officine. Enterrée depuis une expérimentation lancée par Marisol Touraine en 2014, la dispensation à l’unité avait fait son retour par la fenêtre début 2020, à la faveur de la loi antigaspillage. Objectif : éviter l’accumulation de pilules non utilisées dans les armoires des Français, réduire les déchets médicamenteux mais aussi lutter contre l’antibiorésistance en neutralisant l’automédication.
Deux ans plus tard, un décret publié le 2 février au « Journal officiel » vient entériner la délivrance gélule par gélule pour certains produits. Le texte fixe les modalités de recours à la délivrance à l'unité par le pharmacien d'officine. En pratique, il définit les modalités particulières de conditionnement, d'étiquetage, d'information du patient et de traçabilité des médicaments ainsi délivrés à l'unité.
Sont concernés les médicaments conditionnés initialement sous forme de blister ou de sachet-dose. Un arrêté viendra encadrer la liste des produits concernés, a priori les antibiothérapies à usage systémique. La dispensation à l’unité se fera sur la base du volontariat du pharmacien.
Boîte solide, étiquette lisible
« Le pharmacien prélève dans le conditionnement extérieur initial les unités de prise prescrites, par tout moyen permettant de garantir leur intégrité », détaille le décret. Puis l'officinal les place dans un nouveau conditionnement adapté « permettant d’en assurer le transport et la conservation », à la gélule près. La nouvelle boîte devra être « suffisamment solide pour empêcher toute déperdition de son contenu ».
Pour assurer traçage et pharmacovigilance, le décret encadre les inscriptions qui devront figurer sur ce conditionnement à l’unité. Une étiquette avec des mentions « lisibles », « compréhensibles » et « indélébiles » sera remise au patient et devra porter le nom de la spécialité pharmaceutique, son dosage, le numéro de lot, la posologie ou encore la date de délivrance.
La notice pourra – avec accord du patient – être transmise numériquement. Sauf exception, les patients aveugles ou malvoyants ne sont pas concernés par la dispensation à l’unité. Par ailleurs, le décret précise que « le nouveau conditionnement extérieur ne doit pas contenir des spécialités de lots différents ».
Chronophage
Très réticents à cette dispensation à l’unité, jugée trop chronophage, les pharmaciens craignent un calvaire. « C’est une mauvaise réponse à une bonne question : la lutte contre l’antibiorésistance », déclare ce mercredi au « Quotidien » Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats des pharmaciens d’officine (Uspo).
« Dans plus de 90 % des cas, s’il reste des antibiotiques chez les patients, c’est simplement parce qu’ils ne vont pas au bout de leur traitement, ils l’arrêtent dès qu’ils se sentent mieux », justifie le patron de l’Uspo. Il revient aussi sur la critique d'usine à gaz, souvent avancée. Achat de conditionnement neutre, traçabilité des lots, stockage des boîtes entamées, partage des blisters ouverts entre plusieurs patients… « Comment allons-nous faire au quotidien ? C’est juste impossible », s'inquiète le pharmacien.
Pour le président de l'Uspo, « c’est aux industriels de faire le job », en mettant à disposition des boitages exactement conformes aux recommandations d’antibiothérapie. « Souvent, le conditionnement correspond aux recommandations en vigueur au moment de l’autorisation de mise sur le marché, sauf que ces recommandations ont pu changer entre-temps. Il faut que les industriels produisent des boîtes qui correspondent aux recommandations actuelles », insiste-t-il.
En 2019, la fédération de l'industrie pharmaceutique (Leem) avait, elle aussi, dénoncé une fausse bonne idée, précisant que « la principale cause de gaspillage ne provient pas des conditionnements mais de prescriptions inappropriées et d'un mauvais suivi du traitement des patients ».
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation