LE QUOTIDIEN. Quelles sont les stratégies actuelles dans les infections chez le cirrhotique ?
Dr Arnaud Pauwels. Les infections bactériennes sont le plus souvent dues à des bacilles gram négatif et pendant longtemps nous avons utilisé les céphalosporines de 3e génération (C3G) en traitement probabiliste de première intention. Mais dans un contexte d'augmentation des résistances, cette stratégie n’est plus adaptée chez les patients cirrhotiques ayant une infection nosocomiale ou liée aux soins. En 2014, l'Association Européenne pour l'Étude du Foie (EASL) a publié un « position paper » préconisant de garder les C3G pour les infections communautaires, mais d’utiliser d’emblée une antibiothérapie à plus large spectre dans les infections nosocomiales. Le cas des infections liées aux soins n’a pas été tranché.
Ces recommandations sont-elles suivies ?
Nous manquions de données en France, ce qui nous a conduit à réaliser l'étude RESIST qui a inclus entre janvier et juin 2016 plus de 1 000 patients cirrhotiques hospitalisés pour une complication de leur maladie dans 42 centres (CHU et CHG). Parmi ces patients, 37 % avaient une infection : 48 % en CHU (dans deux-tiers des cas une infection nosocomiale) et 32 % en CHG (où la proportion d’infections communautaires est plus importante). Les résultats sont clairs : il nous faut changer nos pratiques car la mortalité varie du simple au triple selon que l’antibiothérapie initiale est adaptée ou non : 18 % vs 48 %. Chez ces patients fragiles si l’antibiothérapie n’est pas d'emblée la bonne, il y a une perte de chance.
Qu'en est-il des infections liées aux soins ?
Elles doivent, en France, être traitées comme des infections nosocomiales. Leur sensibilité aux C3G était dans notre étude très proche de celle des infections nosocomiales (61 % et 58 %), bien moindre que dans les infections communautaires (81 %). De même, la fréquence des bactéries multirésistantes, de 15 %, était comparable à celle observée dans les infections nosocomiales (16 %), alors qu'elle n'était que de 5 % dans les infections communautaires.
L’étude révèle également des erreurs d’antibiothérapie, par exemple des colonisations urinaires traitées par excès ou des associations d’antibiotiques sans justification de type C3G-métronidazole. L’ensemble de notre communauté médicale doit s’intéresser davantage aux bonnes pratiques, à la fois en termes de choix, d’indications et de durées d'antibiothérapies.
Dr Isabelle Hoppenot D’après un entretien avec le Dr Arnaud Pauwels, centre hospitalier Gonesse.CO.166 Etude observationnelle prospective multicentrique sur les infections àbactéries résistantes chez les patients atteints de cirrhose en France (étudeRESIST)
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Dr Pauwels : "La mortalité varie du simple au triple selon que l'antibiothérapie initiale est adaptée ou non"
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