LE QUOTIDIEN : La santé peut-elle enfin peser dans le débat présidentiel ?
GAËL SLIMAN (Odoxa) : Oui, un grand oui ! La santé se hisse en deuxième position des préoccupations des Français pour la présidentielle, selon notre sondage publié le 29 novembre*. 45 % des Français citent le pouvoir d’achat comme une priorité et 30 % la santé. C’est une thématique nettement devant certains sujets dont on parle beaucoup, comme l’immigration ou la sécurité. Nous avions posé la même question en mars 2017, et, à l’époque, la santé n’était placée qu’en sixième position, avec 18 % de citations. C’est une progression spectaculaire, qui s’explique par la crise sanitaire. C'est certain : la santé va mobiliser le débat présidentiel en début d’année 2022.
Mais la gestion de la crise sanitaire par Emmanuel Macron est-elle un angle d’attaque pour la droite ?
Malheureusement pour la droite, plus tellement. De mars 2020 à mars 2021, les Français étaient très mécontents de la gestion de la crise sanitaire par Emmanuel Macron – avec deux tiers à trois quarts d’avis négatifs. Mais depuis le printemps, la perception positive des Français sur son action ne cesse d’augmenter. 45 % d’entre eux tirent un bilan positif, selon un sondage du 25 novembre**. Cela rend plus complexe la possibilité pour la droite de critiquer Macron dans ce domaine.
Quels sont les marqueurs de droite que vous percevez sur la santé ?
D'abord, la santé reste la grande absente des débats LR ! Dans les trois premières confrontations, les candidats n’avaient parlé que quelques minutes de santé et la plupart du temps sur un angle régalien ou sécuritaire : passe sanitaire, confinement… Seul Philippe Juvin a essayé tant bien que mal de ramener le sujet sur la table.
Pourtant, avec un électorat de plus de 65 ans qui vote massivement à droite, c’est une thématique très importante pour les LR. Ce sont des électeurs qui, par leur âge et leur profil, sont intéressés par la thématique du grand âge, de la dépendance, de l’hôpital… Mais la droite ne parle quasiment jamais de santé, du coup elle donne le sentiment d’avoir abandonné ces sujets. Cela dit, une fois désigné, le candidat des Républicains aura le temps de s’investir sur la santé et de rattraper le coup. Et il marquera des points auprès de son électorat.
À ce stade, percevez-vous des différences sur la santé entre les candidats LR ?
Il y a surtout une différence énorme entre Juvin et les autres. Il connaît les sujets et essaye de les mettre en avant. Les autres ont parlé assez peu de santé, et de manière peu clivante. Quand l’un des trois favoris – Bertrand, Pécresse et Barnier – dit quelque chose sur la santé, l’autre l’imite.
Les médecins – du moins les libéraux – sont-ils un vivier de voix pour la droite ?
Bien sûr. Les médecins forment un électorat qui vote classiquement à droite. Par ailleurs, les hommes et les femmes politiques de droite ont longtemps pensé que le médecin – ou le pharmacien – jouait un rôle d’influence possible. Mais, force est de constater que les candidats de la droite ne s’adressent plus réellement aux médecins. La droite donne le sentiment d’avoir un peu oublié cette profession. C’est un tort !
* Sondage Odoxa/FG2A/Europe 1 ; **Sondage Odoxa/Le Figaro
Article précédent
Pr Philippe Juvin : « Candidat des services publics »
Éric Ciotti : « Débureaucratiser la santé »
Les choix de santé de Valérie Pécresse, désignée candidate LR à la présidentielle 2022
Michel Barnier : « Choc d'attractivité pour l'hôpital »
Xavier Bertrand : « Supprimer l'aide médicale d'État »
Pr Philippe Juvin : « Candidat des services publics »
Gaël Sliman : « La droite ne s'adresse plus réellement aux médecins »
Transition de genre : la Cpam du Bas-Rhin devant la justice
Plus de 3 700 décès en France liés à la chaleur en 2024, un bilan moins lourd que les deux étés précédents
Affaire Le Scouarnec : l'Ordre des médecins accusé une fois de plus de corporatisme
Procès Le Scouarnec : la Ciivise appelle à mettre fin aux « silences » qui permettent les crimes