Après un traumatisme, tel que les attentats de novembre 2015, des images intrusives de l'événement peuvent survenir chez les personnes qui souffrent de stress post-traumatique (SPT). Ce phénomène pourrait être lié à un dysfonctionnement des réseaux cérébraux impliqués dans le contrôle de la mémoire, comme le montre l'étude d'imagerie médicale Remember publiée dans « Science ».
Cette étude française cherche à comprendre pourquoi certaines personnes vont développer un trouble du SPT après un événement traumatique et d'autres non. Elle a été menée à Caen auprès de 175 participants, 102 étant des survivants des attentats de novembre et 73 n'ayant pas été exposés. Sur les 102 personnes exposées, 55 ont développé un trouble de SPT.
La méthode Think/No-Think
Les souvenirs intrusifs sont caractéristiques de ce trouble. Ils peuvent se manifester par des images, des odeurs ou bien des sensations associées au traumatisme, et s'accompagnent de vives émotions.
Pour étudier ce phénomène sans confronter les participants aux images traumatisantes des attentats, les chercheurs ont eu recours à un modèle d'intrusion des souvenirs : la méthode Think/No-Think. Les participants doivent apprendre des paires de mots et d'images n'ayant rien à voir l'un avec l'autre, comme le mot « chaise » et l'image d'un ballon. Après cet apprentissage, la présentation du mot « chaise » va naturellement induire l'intrusion d'une image de ballon.
L'activité cérébrale du cerveau a été étudiée par IRM fonctionnelle en condition « Think », le mot apparaît alors en vert et le participant doit voir l'image associée, et en condition « No think », le mot apparaît en rouge et le participant doit maintenir son attention sur ce mot et tenter d'empêcher l'image d'apparaître à son esprit.
« Nous pouvons ainsi étudier la capacité des participants à chasser et supprimer l’image intrusive de leur esprit surgissant contre leur gré lorsqu’ils sont confrontés au mot indice », précise la chercheuse Alison Mary, première auteure de l’article.
Un défaut d'adaptation
Les chercheurs ont analysé les connexions cérébrales entre les régions de contrôle (au niveau du cortex frontal) et les régions de la mémoire (comme l'hippocampe) au moment des tentatives de suppression de l'image intrusive.
Chez les individus non exposés et chez ceux exposés mais sans trouble post-traumatique, une réponse adaptative s'est mise en place pour refréner l'intrusion par le biais d'une réduction significative de la connectivité entre les systèmes de contrôle et de mémoire.
Cette réduction de la connectivité n'a quasiment pas été mise en évidence chez les personnes souffrant de trouble post-traumatique qui ont eu plus de difficultés à réprimer les images.
Ces résultats suggèrent une défaillance au niveau des mécanismes qui permettent de supprimer et de réguler l'activité des régions de la mémoire lors d'une intrusion. La persistance des souvenirs traumatisants serait donc liée à un défaut d'adaptation.
Reste à déterminer si ces difficultés de contrôle se sont instaurées après le traumatisme, ou étaient présentes avant, rendant l'individu plus vulnérable, soulignent les auteurs.
Piste thérapeutique
Aujourd'hui, les traitements disponibles s'appuient sur le souvenir traumatique. Ces nouvelles découvertes pourraient compléter ces approches par le biais d'interventions déconnectées de l'événement traumatique, visant à stimuler les mécanismes qui permettent de supprimer les images intrusives et ainsi favoriser la résilience.
L'étude Remember s'inscrit dans un programme plus vaste qui s'est mis en place après les attentats de novembre 2015. Baptisé 13-novembre, ce projet transdisciplinaire s'est fixé comme objectif d'étudier la manière dont se construisent mémoire collective et mémoire individuelle mais aussi de mieux comprendre les facteurs qui protègent du stress post-traumatique.
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