Droit du sexe

De plus en plus d’interdits et de sanctions

Publié le 27/09/2010
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S’ADRESSANT aux juristes, aux médecins et à tous les professionnels confrontés à ce type de questions, ce livre étudie aussi l’évolution historique du droit de la sexualité, non sans mettre en avant un certain nombre d’incohérences, que ce soit en matière de lois ou de sanctions. Dès que l’on s’éloigne des rives rassurantes du « sexe protégé » au sein du mariage, puis du concubinage hétéro- ou homosexuel, les frontières du « sexe toléré » deviennent plus floues, et les évolutions législatives récentes n’ont pas toujours aidé à la clarté. Ainsi, si les « atteintes aux bonnes mœurs » ont disparu, le concept d’atteinte à la « dignité humaine » est tout aussi arbitraire et imprécis, explique l’auteur.

Mais c’est surtout le renforcement spectaculaire des interdits et des sanctions contre le « sexe illicite » qui marque le droit français de ces dernières années. Le durcissement des lois et des peines pour viol ou agressions sexuelles s’est accompagné d’autres lois qui, elles, n’échappent pas à certaines incongruités. Ainsi, un adolescent de 18 ans peut être lourdement condamné pour avoir des relations sexuelles avec une jeune fille de 14 ans – la majorité sexuelle étant fixée à 15 ans –, mais un adolescent de 16 ans peut, lui, avoir des rapports sexuels en toute impunité avec un enfant de 8 ans... car la loi garantit aux mineurs une totale liberté sexuelle entre eux, sans tenir compte de l’évolution de leur âge et de leur consentement.

Autre bizarrerie, certes moins dramatique, la levée de l’interdiction de la zoophilie, mais son remplacement par des mesures de lutte contre la cruauté infligée aux animaux. Il est donc interdit de sodomiser son chien... mais une femme peut tout à fait avoir un rapport vaginal avec son berger allemand, dont le consentement est alors présupposé.

Dommages collatéraux.

Francis Caballero, par ailleurs bien connu pour son engagement dans la lutte contre le tabac et contre les fabricants de cigarettes, plaide pour un peu plus de logique et de raison dans l’empilage législatif qui a marqué ces dernières années, et qui a porté essentiellement sur la sexualité des mineurs, la prostitution et toutes les nouvelles formes de contacts liées au développement d’Internet et des nouvelles technologies. Parfois, s’inquiète-t-il, le législateur fait courir de réels risques aux libertés individuelles pour prévenir des délits certes très graves, à l’image des sévices sexuels sur enfants ou de la prostitution forcée, mais avec des effets collatéraux préoccupants. Abordant tous les chapitres de la sexualité sous leur angle juridique puis sociétal, il montre enfin, dans ce livre, dont seule la couverture est rose, combien le droit du sexe, au-delà des frontières qu’il pose ou repousse, épouse toute la société et dépasse très largement les seules relations privées entre les individus.

Francis Caballero : « Droit du sexe », LGDJ/Lextenso éditions, 750 pages, 50 euros.

DENIS DURAND DE BOUSINGEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 8823