Le Mans
DR BRIGITTE HOURTAL-BAUDET
Lors de son déjeuner avec des acteurs du monde médical, Nicolas Sarkozy se serait étonné que « les médecins expriment un malaise alors qu’ils ont un métier fantastique, des revenus confortables et qu’ils sont adulés par leurs patients ».
J’en ai avalé mon café de travers !
Confortée dans mon opinion par votre éditorial du 15 novembre, expliquant le désamour des médecins pour le pouvoir en place, je me permets d’utiliser mon droit de réponse et de crier haut et fort « M. le président vous vous moquez sans doute ! »
PRIVILÉGIÉ, le médecin qui fait 35 heures en deux jours et encore ?
PRIVILÉGIÉ, le médecin qui se lève à toute heure de la nuit pour une urgence ?
PRIVILÉGIÉ, le médecin qui assure des gardes jour, nuit et week-end parfois sans repos compensateur ? PRIVILÉGIÉ, le médecin qui a fait 8 à 10 ans d’études difficiles avant de pouvoir exercer ?
PRIVILÉGIÉE, la femme médecin qui il y a encore 15 ans travaillait jusqu’à son accouchement faute de bénéficier de congés maternité et qui encore à la retraite ne bénéficie pas de trimestres supplémentaires pour enfants élevés ?
PRIVILÉGIÉ, le médecin qui n’a sa retraite qu’à 65 ans ? Bien sûr son travail est nettement moins pénible qu’un conducteur de train
PRIVILÉGIÉ, le médecin accablé de contraintes administratives et des taxes comme un vulgaire colporteur (Urssaf, taxe sur les salaires, taxe professionnelle…) et qui doit passer deux heures par semaine pour sa comptabilité ?
PRIVILÉGIÉ, le médecin qui a des responsabilités majeures et parfois la vie d’êtres humains entre ses mains mais que l’on n’hésite pas à traîner en justice pour resquiller quelque argent car on oublie qu’il n’a pas d’obligation de résultat ?
PRIVILÉGIÉ, le médecin dont le taux de suicide est trois fois supérieur à celui de France-Telecom ? PRIVILÉGIÉ, le médecin qui est de plus en plus traité par le patient comme un larbin prescripteur ?
Alors pardonnez-moi, mais que dire en comparaison des députés et sénateurs avec leurs retraites faramineuses, leurs cumuls de mandats, leurs avantages en nature, leurs dédommagements multiples, leurs indemnités non imposables : pas privilégiés ? Des PDG avec leurs indemnités de départ et leurs retraites chapeaux faramineuses : pas privilégiés ?
La valeur intellectuelle du médecin est donc si inférieure à un énarque ou Sciences Po devenu PDG car bien sûr, les salaires sont plus intéressants dans le privé !
Que dire encore des corps de métier comme EDF, SNCF et autres avec des avantages en nature très substantiels… Pas privilégiés ?
Et vous vous étonnez que seulement 10 % des jeunes médecins s’installent
Sincèrement comment voter pour un pouvoir qui nous ignore à ce point.
Le seul privilège que l’on ait, consiste à exercer un métier que l’on aime et de le considérer comme un art car « science sans conscience n’est que ruine de l’âme ».
Quand Nicolas Sarkozy s’étonne…
Pouilly en Auxois (21)
Dr PIERRE MARIE GIROUX
Nicolas Sarkozy reçoit quelques médecins libéraux à déjeuner pour « garder un lien avec le terrain et prendre la température… ». Il se dit étonné de notre malaise ! D’accord nous avons un « métier fantastique », mais pas tout à fait d’accord sur nos « revenus confortables »
Comparons avec bon nombre de concitoyens qui n’ont pas forcément bac plus sept, dix ou plus, chefs d’entreprises, ingénieurs, juristes, fiscalistes, etc., la balance ne penchera pas forcément du côté des méchants médecins qui « font du fric » sur le malheur des autres pauvres humains.
Le Président ajoute : « adulés par nos patients ». Après 41 ans d’exercice, je pense que les médecins prennent de plus en plus souvent le chemin des prétoires que celui de l’Olympe où l’on peut respirer l’odeur de l’encens et où l’on reçoit la couronne de lauriers !
Si dans notre profession tout était idyllique comme le prétend notre président, le recrutement devrait être facile et cela dans toutes les spécialités.
Le chef de l’État veut aller plus loin encore « afin de conforter l’attraction de la médecine de proximité ». Petit à petit on remplace le mot libéral par proximité : ne nous faisons pas d’illusion, dans la tête des technocrates, la médecine libérale, c’est fini
Il poursuit : « attractivité… » en accompagnant les mutations en cours (suivez mon regard…) de l’exercice libéral de la médecine (et non de l’exercice de la médecine libérale)
J’ai bien peur que ces mutations aboutissent à l’enterrement de notre médecine libérale « la meilleure du monde ».
Si, sur certains aspects nous apprécions la volonté de réformes de Nicolas Sarkozy, en ce qui concerne la médecine libérale, la réforme est en route depuis 1960 date de la première convention et cette réforme s’est effectuée par des grignotages continus de nos libertés.
J’ai toujours dit que la fin de la médecine libérale sera sûrement moins catastrophique pour les médecins que pour les malades qui ne seront plus soignés par leur médecin mais par un service national de santé soumis pieds et poings liés à une administration toute puissante.
Ce qui ne changera pas grand-chose pour le greffé du cœur, ou pour celui qui sera en épuration extra-rénale, mais ce qui sera un grand changement pour les millions de Français qui consultent quotidiennement "leur" médecin.
Nicolas Sarkozy confirme le bonus de 1 euro sur le C au 1er janvier. Le Président a beau penser que nos revenus sont confortables : 4,6 % d’augmentation sur trois ans et demi, cela fait ne fait que 1,3 % par an.
Si le médecin avait pu augmenter ses honoraires de 140 %, comme certains, sa consultation serait à 50 euros. Ainsi il pourrait retirer un revenu convenable et non confortable, il ne serait pas obligé de faire de "l’abattage" et il pourrait dispenser des soins encore plus performants, et qui à terme feraient faire des économies à la sécurité sociale !
Apprécions enfin la flatterie avec l’invention du « spécialiste en médecine générale ». Que change le titre à la fonction, de celui qui reste corvéable à merci, réquisitionné au gré de la fantaisie d’un préfet, qui devrait répondre présent 24 heures sur 24, que l’on voulait priver de vacances s’il n’était pas resté au garde à vous, le petit doigt sur la couture du pantalon.
Je pense à tirer bientôt ma révérence. Bon courage à nos successeurs.
Oyonnax (01)
DR PHILIPPE VIENNOIS
Monarques des hôpitaux
À propos du livre de Jean Loup Durousset sur « le médecin roi ! » : que dire des directions des hôpitaux qui dépensent des budgets inutiles comme refaire tous les sièges en cuir pour une salle de conseil administration pendant que dans les services on manque de tout… Il faudrait évaluer l’efficacité de tous ces chefs de services parasites qui ont le droit de dépenser pour des choses ne concernant pas les services. Ce sont eux les monarques des hôpitaux.
Châteauroux(36)
DR DANIEL CHERVONAZ
Fibromyalgie et indemnisations
J’ai noté la singularité du diagnostic basé sur des algies sans particularité. Cette relative vacuité de tout signe objectif m’a toujours impressionnée. Dans mon exercice professionnel pendant plus de 40 ans en tant que rhumatologue et expert, j’avais pour mission de vérifier l’adéquation entre le fait de porter l’étiquette de « fibromyalgique » et une activité personnelle ou professionnelle. L’aspect non médical, bien entendu, d’une indemnisation sous forme d’indemnités journalières (de la part des Organismes Sociaux ou de Sociétés d’Assurances), de subrogation de paiement de crédits d’achats de maison, voiture(s), meubles etc., ou de rentes « d’invalidité » m’était indiqué dans la mission.
Je comprends donc tout à fait que le rhumatologue traitant n’ait pas du tout eu à connaître cet aspect financier et qu’il n’en soit jamais fait état dans les articles « scientifiques ». L’examen clinique expertal minutieux, complet, répété parfois à quelques mois d’intervalle ne m’a effectivement jamais montré de déficit fonctionnel ni d’anomalie cliniquement objectivable. Je n’ai jamais noté, lors de la relation de l’historique de l’affection, d’impossibilité totale d’effectuer l’ensemble des gestes de la vie courante et des loisirs.
Lors des examens à domicile, expressément demandés par certaines sociétés, j’ai effectivement noté la conservation des possibilités des actes de la vie courante, de travaux de bricolage, de jardinage mais bien entendu avec les algies décrites.
Mon activité sur quatre décennies m’a permis de nombreuses fois de revoir ces malades, le plus souvent pour d’autres souscriptions d’Assurances ou pour des accidents parfois lors de trajets ou lors de leurs activités personnelle ou professionnelle. J’ai noté l’effet thérapeutique tant de la reconnaissance d’un état d’invalidité que de la non – reconnaissance de cet état (mais dans ce cas souvent après des expertises contradictoires voire judiciaires) et la forte diminution voire l’arrêt de toute quête thérapeutique à la fin des recours. Il me semble que l’aspect sociétal et indemnitaire devrait être étudié par les médecins des organismes sociaux ou des sociétés d’assurances afin de bien éclairer de façon globale cette bien mystérieuse affection.
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